Ben Simmons est-il vraiment le prodige annoncé ?

Propulsé au rang de future superstar avant le début de sa carrière NCAA, Ben Simmons subit les critiques après sa probable unique saison universitaire.

Ben Simmons est-il vraiment le prodige annoncé ?
La carrière de Ben Simmons en NCAA s'est achevé par une humiliante défaite contre Texas A&M en demi-finale de la SEC, 71-38. Une rouste. La défaite était pourtant interdite pour les Tigers de LSU, condamnés à décrocher un titre de Conférence pour participer à la March Madness. Pour le dernier match de ce qui restera sans doute son unique trimestre à l'université, le prodige australien a cumulé un nouveau double-double - 10 points et 12 rebonds - sans pour autant peser sur la rencontre pourtant primordiale pour son équipe. Louisiana State comptait dans ses rangs l'une des individualités les plus brillantes de la dernière décennie mais la faculté n'est pas parvenue à se qualifier pour la traditionnelle grande kermesse du basket universitaire à l'issue d'une saison régulière décevante (19 victoires, 14 défaites). [superquote pos="d"]"Le meilleur all around depuis LeBron James." Magic Johnson[/superquote]Des préoccupations pour Johnny Jones, le coach des Tigers. Pas pour Simmons. A 18 ans, le gamin est déjà présenté comme une future star NBA. Il est déjà adoubés par les plus grands.
"C'est le meilleur all-around player que j'ai vu joué depuis LeBron James", s'enthousiasmait Magic Johnson.
Validé mais aussi comparé aux meilleurs joueurs NBA : LeBron et Magic pour les plus fameux mais aussi des valeurs solides comme Lamar Odom, Blake Griffin ou Boris Diaw. Quand l'on parle de lui, on parle avant tout d'un garçon qui sait tout (bien) faire - ou presque - sur un terrain de basket. Parmi ses principaux atouts, DraftExpress a listé sa "vision du jeu, ses instincts en défense, son ambidextrie, son sens du rebond, son jeu en transition et sa capacité à attaquer le cercle." https://www.youtube.com/watch?v=kWuBjwG8PN0 Simmons a le package complet. Il est extrêmement talentueux. Ses statistiques lors de sa première année NCAA sont impressionnantes et le classent d'emblée parmi les plus grands : 19,2 points à 56%, 11,8 rebonds, 4,8 passes et 2 steals. Des chiffres hors du commun des mortels pour un freshman.
 "C'est rare qu'un gars de 2,08 et 114 kilos (il est listé à 102 - NDLR) puisse foncer comme ça à pleine vitesse sur la défense pour ensuite créer du jeu pour lui ou ses coéquipiers", assure Billy Kennedy, le coach de Texas A&M, au New York Times. "Il pose des problèmes non seulement parce qu'il est talentueux mais aussi parce qu'il implique tous ses coéquipiers."
Kennedy est flatteur mais la superstar des Tigers n'a clairement pas montré son meilleur visage au moment d'affronter les Aggies.
"Contre Texas A&M, le gars était ailleurs. Contre Tennessee, il faisait des fautes stupides, a été mis sur le banc et n'avait pas l'air d'en être préoccupé. Sa défense sur ces deux matches a été lamentable. Il y a des moments où il ne domine pas du tout", explique Aleph, collaborateur pour DraftExpress et REVERSE spécialiste de la NCAA.
C'est pourtant ce qui est demandé à un gars de sa trempe. Personne ne conteste les capacités athlétiques, ni même la polyvalence du natif de Melbourne.
[superquote pos="d"]Absent du money time ? [/superquote]"La déception n'est pas liée à sa production totale mais plutôt [son absence de production] dans des moments spécifiques", remarque Sean Farnham, analyste pour ESPN.
[caption id="attachment_305068" align="alignleft" width="318"] Brandon Ingram, lui aussi candidat au 1er pick.[/caption] Donnons de suite le ton : le but n'est pas de descendre Ben Simmons aussi vite qu'il a été propulsé au sommet. Il est l'un des joueurs les plus prometteurs d'une cuvée annoncée comme assez faible et il est toujours le favori pour être appelé en premier par Adam Silver le soir de la draft en juin prochain. Mais le fossé béant qu'il avait creusé avec ses concurrents s'est resserré ces dernières semaines, au point où Brandon Ingram (Duke) est une alternative de plus en plus crédible à l'Australien. Et lui disputera la March Madness.
"Ben Simmons devrait rester en NCAA. Il devrait y avoir une règle qui empêche les gars qui n'ont pas joué la March Madness d'aller en NBA", faisait remarquer Charles Barkley.
Il y a déjà un (autre) point contesté du règlement qui a contraint Simmons à s'inscrire à l'université alors qu'il semblait déjà prêt pour la NBA. Le passage du lycée à la grande ligue n'est plus autorisé et c'est la raison pour laquelle il a traversé l'Océan Pacifique et quitté tous ses repères à 18 ans à peine. Il a fait acte de présence, a cumulé des statistiques rares et s'apprête désormais à débarquer chez les professionnels avec un statut de future superstar. Il se murmure même qu'un contrat à plus de 100 millions de dollars l'attend au chaud chez Nike. Mais lorsque l'on parle d'un prodige en devenir, on se penche non seulement sur son style de jeu et ses aptitudes sur le parquet mais aussi sa personnalité et son comportement sur et en dehors des terrains. C'est là que sont nés les doutes sur le jeune homme.
"Il ne sourit jamais et ne discute jamais avec ses coéquipiers", poursuit Aleph.
Simmons s'est distingué récemment pour avoir été écarté de la liste des candidats au Wooden Award, le trophée qui récompense le meilleur joueur de l'année en NCAA, en raison de notes insuffisantes (une mésaventure similaire était arrivée à Carmelo Anthony en 2003). Il avait débuté une rencontre sur le banc pour les mêmes raisons en fin de saison.
[superquote pos="d"]"Pourquoi s'intéresser à l'Océanographie alors qu'il va signer un contrat à 100 millions ?"[/superquote]"Je suis toujours convaincu d'être le meilleur joueur et c'est tout ce qui compte. Je veux juste gagner et aider mon équipe", commentait l'intéressé.
Seuls les étudiants dont la moyenne atteint au moins 2.0 PGA sont éligibles au Wooden Award. Pourquoi diable s'entêter à être fort à l'école alors qu'il ne compte pas y rester plus d'un trimestre et demi ?
"Il a 18 ans et il va signer un contrat supérieur à 100 millions de dollars avant d'avoir foulé un parquet NBA. Pourquoi s'intéresserait-il à l'Océanographie ?" Ajoute Farnham.
Les résultats scolaires n'auront peut-être pas d'influence sur la longue et brillante carrière qui lui est promise. Son attitude sur le parquet est plus parlante. Malgré sa domination statistique, il n'a pas réussi à mener son équipe au succès. Sa disparition dans certains moments clés - notamment en fin de match où il s'est parfois montré plus spectateur qu'acteur - est plus inquiétante. Il est facile, presque trop, au point où il semblait parfois ne pas s'intéresser à ce qui se passe sur le terrain. Des critiques similaires dont a été - et est toujours - victime Andrew Wiggins. Un trait de caractère qui laissaient penser certains scouts que le prodige Canadien serait sans doute une superstar mais pas un meneur d'homme capable de porter sa franchise au titre en tant qu'unique leader (mais qui le peut ? Et, coup de bol, les Timberwolves l'ont associé à Karl Towns Jr, une star parmi les stars). [caption id="attachment_290383" align="alignleft" width="318"] Ben Simmons, futur superstar ou grosse machine à statistiques ?[/caption] Simmons rejoint peut-être cette catégorie. Il est fort, très, très fort, mais son manque d'adresse extérieure et ses moments d'errance sur jeu placé pourraient le pénaliser, du moins lors de ses premières années dans la ligue.
"Ce n'est pas un go-to-guy", conclut Aleph.
Un avis partagé par une partie des scouts, qui souligne à chaque fois le talent du bonhomme, ses qualités athlétiques supérieures à la norme et ses capacités de playmaker très intéressantes. Alors oui, Ben Simmons a les qualités d'un grand joueur. Un futur crack ? On demande encore à voir. Mais, surtout, pour une fois, nous aimerions laisser le temps au jeune homme de se développer avant de vraiment l'élever ou de le descendre dans tel ou tel catégorie plus ou moins flatteuses.