Faites confiance à Larry Bird

Larry Bird a été sidérant de franchise au moment d'annoncer son choix de ne pas conserver Frank Vogel, considéré comme l'un des meilleurs coaches de la ligue.

Faites confiance à Larry Bird
Les réactions ont été vives après l'annonce de Larry Bird jeudi. Le président des Indiana Pacers avait convoqué la presse à 11h à Indianapolis, pour les informer d'une nouvelle importante. Depuis la veille, tout le monde avait compris qu'il s'agissait de la fin de la collaboration entre "Larry Legend" et le coach Frank Vogel, en poste depuis cinq ans et demi. Beaucoup ont crié à l'injustice. Il est vrai que le bilan de Vogel, ex-adjoint de Jim O'Brien, parle pour lui et que son job a été remarquable malgré des faits contrariants. Les deux défaites en finale de la Conférence Est auraient pu être un préambule à quelques saisons sans playoffs. La grave blessure de Paul George et les départs des cadres Roy Hibbert, Lance Stephenson et David West auraient pu le pousser à aller voir ailleurs, lui qui a constamment maintenu les Pacers au-dessus des 50% de victoires en dehors de la saison sans leur franchise player. Vogel a tenu bon, tout en contraignant ses joueurs à pratiquer un basket dur et collectif. En somme, il a fait ce qu'on lui a demandé en attendant des jours meilleurs, comme cette année, où il a poussé la tête de série n°2 à l'Est, Toronto, à disputer un game 7 sans avoir de banc décent et avec un rookie de 19 ans dans le cinq. Mais Bird a tranché et s'en est expliqué avec une sincérité rare et assez désarmante. Le Hall of Famer a concédé qu'il s'agissait de l'une des décisions les plus difficiles à prendre de toute sa carrière. Ses justifications tiennent la route et sentent bon l'ambition à une époque où la plupart des dirigeants sont prêts à sacrifier 4, 5 ou 10 saisons de basket de haut niveau rien que pour espérer avoir de la chance à la loterie et un peu de jugeote dans leurs choix de Draft. Bird n'est pas de ce moule-là.
"Je sais que beaucoup d'entre vous ne s'attendaient pas à ce que l'on soit en playoffs, mais j'ai des attentes toujours plus élevées que la plupart des gens concernant le niveau de l'équipe et ses ambitions. J'en suis arrivé à la conclusion que les joueurs avaient besoin d'entendre une nouvelle voix. Cinq ans avec le même coach, c'est long à mes yeux. La voix d'un coach s'essouffle au bout de quelque temps. C'est dur, mais Frank n'a pas été viré. Je ne l'ai juste pas renouvelé. Le plus dur dans tout ça, c'est que ses enfants sont jeunes et qu'il va devoir les changer d'école. Je suis passé par là".
[superquote pos="d"]"Je ne peux pas demander à Kevin McHale de coacher pour moi, je le respecte trop".[/superquote]Les deux hommes ont longuement discuté au téléphone et Vogel a plaidé sa cause en tentant presque d'apitoyer son supérieur, ce qui n'a visiblement pas fait mouche. Sur le plan tactique, on a pu déceler dans le discours de Larry Bird l'envie de pratiquer un basket moins axé sur la défense. Si l'assistant Dan Burke, spécialiste défensif, reste en place, Bird entend visiblement voir se mettre en place des systèmes et une mentalité plus tournés vers l'avant. Comment le blâmer pour ça alors qu'Indiana ne fait pas partie des 20 équipes les plus prolifiques de la ligue depuis deux saisons ? L'idée n'est évidemment pas de marquer 120 points par match, tout en abandonnant tout précepte défensif. Mais spectacle et rigueur dans sa moitié de terrain ne sont pas incompatibles. Les points de vue de Bird et Vogel sur l'aspect du cinq de départ, en revanche...
" Je pensais vraiment qu'on jouerait mieux avec Paul George au poste 4 mais Frank et lui m'ont dit qu'ils préféraient jouer avec deux grands. Moi j'aime le small ball. Certains soirs, on arrive à dégainer à trois points et à battre de superbes équipes. D'autres soirs, on se prend des fessées. Mais avec le temps, les joueurs prennent l'habitude et une mentalité peut s'installer".
Des noms ont évidemment été jetés en pâture à l'intéressé pour tester son honnêteté, celui de son ancien compère des Celtics Kevin McHale notamment. La réponse de Larry Bird est assez éclairante sur les rapports qu'il peut entretenir avec des coaches ou des subordonnés.
"Je ne peux pas faire ça à Kevin. Je ne peux pas lui demander de travailler pour moi. Ce ne serait pas juste. Je le respecte beaucoup trop. On a connu tellement de batailles ensemble pour que je le fasse coacher ici. J'adorerais ça, mais ça n'arrivera pas à cause de la relation que nous entretenons".
Le successeur de Frank Vogel sait à quoi s'attendre. Il devra se plier aux exigences de Larry Bird et à sa philosophie du job. Lui-même avait mis un terme à son expérience de coach après trois petites années et une participation aux Finales NBA en 2000. Depuis qu'il a pris les rênes de la franchise de son état natal, "Larry Legend" n'a pas fait beaucoup de mauvais choix. Si son palmarès est vierge (en tant que dirigeant évidemment), le fait d'être compétitif tous les ans dans une ligue où seules quelques places fortes y parviennent sur au moins une décennie, mérite le respect. Avant de crier à la bourde, attendons de voir qui le "Hick from French Lick" va ramener dans sa besace dans les semaines qui viennent. Parier sur une erreur de casting avec l'une des plus grandes éminences grises de ce sport serait risqué...