Phil Jackson : Un an aux Knicks, quel bilan ?

La première année du mandat de Phil Jackson est écoulée. L'occasion de faire le bilan sur les décisions passées et futures du président des New York Knicks.

Antoine PimmelPar Antoine Pimmel | Publié  | BasketSession.com / MAGAZINES / Focus
Phil Jackson : Un an aux Knicks, quel bilan ?
Phil Jackson a fait son entrée dans la salle de conférence du Madison Square Garden avec le sourire aux lèvres, le costume parfaitement ajusté à sa taille, le visage rajeuni par un rasage taillé de près et les cheveux blancs soigneusement peignés. « Il n’y a pas de meilleur endroit pour gagner que New York », témoignait le fraîchement nommé président des opérations basketball des New York Knicks. C’était il y a tout juste un an. Gagner, il sait faire. Il a remporté des titres partout où il a trimbalé sa grande carcasse, son dos en compote, son zen légendaire, ses bouquins de philosophie et son sens aiguisé de la répartie. C’est d’ailleurs dans la grosse pomme qu’il a goûté pour la première fois au succès en NBA. Il était alors un intérieur remplaçant combatif au sein d’une équipe des Knicks sacrée en 1971 et en 1973. La franchise n’a plus jamais gagné depuis. Jackson, lui, a ajouté onze bagues à sa collection lors de ses passages sur le banc des Chicago Bulls et des Los Angeles Lakers. Gagner à nouveau à New York, dans un rôle différent après lequel il courait depuis déjà quelques années, c’est son objectif. Après avoir remporté 37 matches lors de l’exercice précédent, le dirigeant voyait son équipe en mesure de faire les playoffs cette saison. Il a dû revoir ses ambitions à la baisse. A une quinzaine de jours de la fin de la saison régulière, les Knicks sont bien partis pour terminer avec le plus mauvais bilan de l’histoire sur une saison à 82 matches (14 victoires, 57 défaites, le record de nullité étant détenu par les équipes de 1986 et 2006, vainqueurs de 23 matches). En un an, Phil Jackson aura délaissé ses costumes serrés pour des chemises plus amples. Ses cheveux se sont dressé plus d’une fois face au spectacle affligeant proposé par les Knicks. Sa barbe a repoussé. Ses grandes annonces ont laissé la place aux coups de gueule, aux vannes sur sa fiancée Jeanie Buss et à l’autodérision. En attendant, en l’an un après P.J, le chantier est encore immense à New York.

Les fondations

[caption id="attachment_162411" align="alignleft" width="300"] Derek Fisher, un coach débutant en période d'apprentissage.[/caption] La philosophie a une place importante dans la vie et dans chaque raisonnement de Phil Jackson. Il est donc logique qu’elle s’immisce aussi dans le basket ou même dans la gestion d’une franchise. Pour le maître Zen, les membres d’une organisation se doivent d’être sur la même longueur d’onde. Comprenez ici que chacun d’entre eux se doit de croire à la même philosophie.
« On va bâtir une culture autour des principes auxquels je crois », assurait déjà l’ancien coach lors de son introduction à la presse en mars 2014.
L’attaque en triangle est plus qu’un système de jeu, c’est une manière de penser. Ce schéma complexe mis en place par son célèbre assistant Tex Winter, est la marque de fabrique des équipes entraînées par Jackson depuis des années. Les six titres des Bulls de Michael Jordan et les bagues des Lakers de Kobe Bryant ont trouvé leurs sources dans l’immense talent de ces deux champions hors du commun mais aussi dans la mise en place de l’attaque en triangle. Même si cette philosophie est aujourd’hui considéré comme « obsolète » par certains observateurs – la NBA est désormais régit par le « Space and Pace » – le natif du Montana a immédiatement fait part de son désir de la remettre au goût du jour avec les Knicks. Il lui fallait donc trouver un coach susceptible de l'appliquer. [superquote pos="d"]« On va bâtir une culture autour des principes auxquels je crois. » Phil Jackson[/superquote]Son principal disciple, Brian Shaw, était déjà en place aux Denver Nuggets. Il a alors courtisé Steve Kerr, l’un de ses anciens joueurs, multiple champion NBA, ex-GM et consultant pour ESPN. Le shooteur a hésité, a laissé mariner les dirigeants des Knicks et a finalement filé à Oakland. Les Golden State Warriors ont désormais la meilleure équipe NBA et Kerr n’a pas opté pour l’attaque en triangle mais pour une approche plus moderne. [caption id="attachment_175089" align="alignleft" width="300"] Carmelo Anthony a reconnu qu'il était proche de signer à Chicago l'été dernier.[/caption] Phil Jackson a embauché Derek Fisher, un autre de ses anciens poulains. 25 millions de dollars sur 5 ans pour un coach débutant. Un manque d’expérience qui s’est fait ressentir, notamment en début de saison. Fish apprend sur le tas et il ne pouvait de toute façon pas faire des miracles avec l’effectif actuel des Knicks. Brian Shaw a lui été licencié par les Nuggets. L’autre priorité estivale de Mr President consistait à prolonger Carmelo Anthony, libre et convoité par les Chicago Bulls, les Dallas Mavericks, les Los Angeles Lakers ou encore les Houston Rockets. Il espérait convaincre Melo d’accepter une ristourne. Après s’être laissé séduire par les taureaux chicagoans, la superstar a finalement rempilé à NYC pour 124 millions de dollars sur cinq ans, soit un million annuel de moins que le maximum. Félicitation. Anthony est aujourd’hui en vacances. Il a joué 40 matches, suffisamment pour participer briller devant son public au All-Star Game, avant de se faire opérer du genou.

La destruction

[caption id="attachment_205005" align="alignleft" width="300"] Non désiré par Phil Jackson, Tyson Chandler est devenu l'un des cadres des Mavericks cette saison.[/caption] Phil Jackson a voulu bâtir une équipe composée de joueurs susceptibles de briller au sein de l’attaque en triangle. Il s’est donc séparé de Raymond Felton, de ses briques à cinq mètres, de ses guns et de ses kilos en trop et de Tyson Chandler afin de mettre la main sur deux seconds tours de draft (Cleanthony Early et Thanasis Antetokounmpo), deux joueurs expédiés par la suite (Wayne Ellington et Samuel Dalembert), Shane Larkin et José Calderon. [superquote pos="d"]Moins de six moins après son arrivée, Calderon était déjà placé sur la liste des transferts[/superquote]Le profil de l’Espagnol correspond à la philosophie prônée par Jackson. Le meneur vétéran ne s’est pas réellement imposé à New York et les Knicks ont donc cherché à s’en séparer en cours de saison. En définitive, le front office a balancé un joueur sous contrat jusqu’en 2016 (3,9 millions annuels) contre un autre dont le deal se poursuit jusqu’en 2017 (7,7 millions de dollars). Mauvais calcul. Le départ délicat des Knicks a permis à Phil Jackson de remodeler ses plans. Il a fait une croix sur les ambitions dès le début de l’année civile en sacrifiant le jeune Iman Shumpert et l’ancien meilleur sixième homme de la saison J.R. Smith, tous les deux envoyés à Cleveland. Ils se sont aujourd’hui tous les deux imposés dans la rotation des Cavaliers, grands favoris au sein de la Conférence Est. Dans l’échange, la franchise new-yorkaise a récupéré deux choix au second tour, deux trades exceptions et de la place sous le Cap pour dépenser cet été.

La (re)construction

[caption id="attachment_231919" align="alignleft" width="300"] Langston Galloway, le seul sujet de satisfaction de la saison new-yorkaise.[/caption] D’une certaine manière, l’effectif actuel est déjà à l’image de Phil Jackson. Seuls Carmelo Anthony, Tim Hardaway Jr et Andrea Bargnani portaient les couleurs des Knicks avant l’arrivée du maître Zen. Tous les autres joueurs ont été signés par le dirigeant ou récupérés via des trades. Les New-yorkais ont d’ailleurs fait quelques bonnes pioches, à commencer par Langston Galloway, prodige en D-League et révélation de la saison dans la grosse pomme (11 pts de moyenne). Le jeune homme est même susceptible d’intégrer le projet à long terme de la franchise. Alexey Shved, Lance Thomas et Lou Amundson ont connu leurs moments de gloire mais ils n’occuperaient même pas le douzième spot au sein d’un effectif taillé pour le titre et il y a peu de chance qu’ils soient conservés par les Knicks. L’Italien Andrea Bargnani a fait remonter sa cote auprès des dirigeants NBA – enfin, surtout ceux des Knicks – en enchaînant les prestations de qualité. Son adresse extérieure peut s’avérer précieuse au sein de l’attaque en triangle et New York – enfin surtout… bref, vous savez – serait prêt à lui offrir une seconde chance de relancer sa carrière dans la grande ligue moyennant un salaire raisonnable (entre le minimum vétéran et 3 millions annuels ?) [superquote pos="d"]Aldridge, Love ou Gasol sont-ils seulement intéressés par les Knicks ? [/superquote]Phil Jackson l’a affirmé : la free agency demeure sa priorité de l’été. Plusieurs bons joueurs seront sur le marché à commencer par des stars comme LaMarcus Aldridge, Kevin Love, Marc Gasol ou Rajon Rondo (est-ce vraiment une star ?). Des lieutenants de luxe comme Paul Millsap, Goran Dragic, Wesley Matthews ou Greg Monroe sont également disponibles, de même que certains restricted free agent très convoités comme Jimmy Butler, Reggie Jackson ou Draymond Green. Certains des joueurs cités seront certainement approchés par les Knicks. En revanche, le marasme dans lequel est plongée la franchise pourrait refroidir les plus ambitieux. Green joue pour la meilleure équipe NBA, Butler a un rôle primordial aux Bulls, Aldridge et Gasol trustent les sommets avec Portland et Memphis, etc. La possibilité de voir les Knicks offrir un contrat maximum à Tobias Harris n’est pas à exclure… et on doute que sa signature suffirait à ramener New York sur le devant de la scène. [caption id="attachment_246973" align="alignleft" width="300"] Jahlil Okafor, le nouvel espoir des Knicks ?[/caption] Heureusement, les Knicks peuvent compter sur un choix haut placé lors de la prochaine draft. Selon les différentes rumeurs, Phil Jackson ciblerait plutôt un intérieur. Karl Towns Jr et Jahlil Okafor, les deux principales stars de la cuvée, sont des pivots (le prodige de Kentucky peut jouer ailier-fort) et les dirigeants devront étudier soigneusement leur profil afin de faire un choix si jamais les Knicks venaient à piocher en première position. D’Angelo Russell et Emmanuel Mudiay sont aussi des prospects suivis avec attention par les franchises susceptibles de tirer haut à la prochaine draft. Phil Jackson pourrait prendre la décision de sacrifier le pick et de chercher à l’échanger contre un joueur confirmé. Hormis DeMarcus Cousins – mécontent à Sacramento – aucun All-Star n’est plus ou moins proche d’être placé sur le marché. Echanger un choix haut placé contre un joueur moins fort, du calibre de Tobias Harris/Greg Monroe/Goran Dragic serait sans doute une erreur. Phil Jackson est à la tête des Knicks depuis un an mais il est finalement trop tôt pour vraiment juger son apport dans la reconstruction de la franchise. Le succès futur des New-yorkais semble étroitement lié aux décisions qui seront prises lors de la prochaine intersaison qui s’annonce déterminante.
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