Ben Gordon raconte sa terrible descente aux enfers dans un texte incroyable

Ben Gordon s'est livré dans un texte poignant, pour raconter la dépression et l'agonie qui l'ont frappé lorsque sa carrière NBA lui a échappé.

Ben Gordon raconte sa terrible descente aux enfers dans un texte incroyable
La parole s'est libérée en NBA sur les problèmes de santé mentale. Les joueurs n'ont plus peur d'admettre qu'ils combattent des démons intérieurs et qu'ils ont besoin d'aide. Les récits à se sujet se sont multipliés ces dernières années, notamment de la part de stars comme Kevin Love et DeMar DeRozan. Ni l'intérieur des Cleveland Cavaliers, ni l'arrière des San Antonio Spurs ne sont toutefois passés par les mêmes choses que Ben Gordon. Les fans les plus jeunes ne se souviennent probablement pas de l'ancien arrière des Chicago Bulls. Kevin Love, ses mots forts pour son combat contre la dépression BenGordon a pourtant remporté le titre de meilleur sixième homme de l'année après avoir été champion NCAA avec UConn et connu une première partie de carrière prometteuse et très respectable. C'était avant de disparaître petit à petit des radars après des expériences ratées à Detroit, Charlotte et Orlando. A vrai dire, on n'avait plus de nouvelles de l'international anglais, venu s'installer aux Etats-Unis avec sa famille lorsqu'il était petit. Gordon était en fait en proie à d'énormes difficultés qui l'ont fait petit à petit basculer dans ce que lui même appelle la folie. Il a choisi de témoigner dans un texte publié dans le Players' Tribune. En voici quelques extraits parmi les plus poignants. On y apprend notamment que...

Ben Gordon a concrètement tenté de se suicider

"Il ne me restait qu'une chose à faire pour sortir de ce purgatoire. J'étais obsédé par cette idée de me suicider. Je ne pensais qu'à ça. Un soir, mes attaques de panique sont devenues si violentes que je ne pensais plus qu'à m'échapper. [...] J'ai pris l'une des cordes lourdes et épaisses et l'ai nouée autour de mon coup. J'ai pris une chaise. Et je me suis pendu, pour de vrai. [...] Je pouvais sentir les vaisseaux sanguins sur le point d'exploser dans ma tête. C'est là que cette pensée m'a saisi, venue de nulle part. [...] Yo, BG, tu vas vraiment mourir. Tu ne veux pas mourir. Tu ne veux pas vraiment te suicider, mais juste tuer cette angoisse. Tu veux VIVRE espèce d'enfoiré stupide".

Sa vraie taille lui a posé des problèmes

"C'est drôle parce que ma réputation en tant que joueur était très différente de la réalité. J'étais mutique. Je ne disais rien. Tu pouvais me parler mal, me bousculer, me faire n'importe quoi, je restais de marbre. A l'intérieur, je pensais en fait à des millions de choses.
"J'avais une mentalité de serial killer"
J'avais une mentalité de serial killer. J'étudiais tes tendances, tes faiblesses et je ne pensais qu'à te massacrer. C'était violent. Mais il faut me comprendre. On a toujours essayé de me lister à 1,90 m pendant ma carrière, mais laissez-moi vous dire un secret. L'enfoiré que j'étais mesurais 1,86 m. J'étais là sur le terrain avec Kobe Bryant ou Tony Allen qui défendaient sur moi. Vous avez idée de la difficulté de déclencher un shoot face à ses mecs quand on fait 1,85 m ? Il faut avoir une concentration incroyable, méthodique et de l'obsession. [...] Quand tu vis avec cette mentalité pendant près de 30 ans et que d'un coup tu te retrouves en fin de carrière, sans jouer la moindre minutes, avec toute cette colère, cette douleur, cette peur et ces regrets que tu as intégrés et compartimentés pendant toute ta putain de vie, qu'est ce qui peut se passer ? Aller voir un psy ? J'étais le noir type. Mes problèmes sont mes problèmes et ce ne sont ceux de personne. Je gère ce bordel".

Il a été interné et croyait à un quiproquo

"Il m'arrivait de marcher près du thermostat chez moi qui indique la température quand tu passes devant. 72 degrés (Farhenheit). Je ne pouvais plus m'en détacher. Ben, tu vas mourir à 72 ans. Puis je suis devenu bipolaire. Je ne dormais plus, mais j'avais des pics d'énergie. [...] J'ai commencé à halluciner, à voir des trucs qui n'étaient pas là. J'entendais des voix. Je me disais que c'était peut-être Dieu qui me parlait et essayait de me dire quelque chose. C'est là que j'ai commencé à déclencher des alarmes incendie et tout ce bordel. C'est aussi là que j'ai commencé à me faire arrêter par la police. C'est devenu tellement sévère qu'on m'a fait interner dans un hôpital psychiatrique. Et le problème, c'est que je ne comprenais pas pourquoi j'étais là. C'était comme dans les films. Je me suis retrouvé dans une chambre blanche avec des médecins et des infirmières qui m'attachaient sur un lit. Ils avaient des blouses et des gants pour me planter des aiguilles dans le bras. Ils découpaient mon pantalon à hauteur de mes hanches. C'était terrifiant. Je me souviens les avoir supplié de ne pas me faire de mal et je croyais vraiment que tout ça arrivait sans raison et que c'était un quiproquo. [...]
"Qui était ce gars que je voyais dans le miroir ? Où est le gentil Ben ?"
Pourquoi est-ce que ces gens ne me reconnaissaient pas, putain ? Qui était ce gars que je voyais dans le miroir ? Où est le gentil Ben ? Ce mec avec les cheveux en bataille, qu'il faut attacher à son lit et piquer, même la police ne le reconnaît pas. Ce n'est pas Ben Gordon. C'est là que j'ai commencé à me dissocier de Ben Gordon. J'étais convaincu qu'il s'agissait d'un clone et que ce corps dans lequel j'étais n'étais pas le mien. [...] J'ai donné un autre nom à cette personne. Une autre adresse et un autre numéro de téléphone. J'envoyais des mails aux gens pour leur dire que j'avais un nom différent et qu'il ne fallait le dire à personne".
Depuis plusieurs mois, Ben Gordon consulte une psychiatre et va mieux. Il estime que son message peut servir à d'autres personnes qui pourraient se retrouver dans le même cas. Il est même persuadé que plusieurs joueurs NBA courent le risque de vivre la même expérience que lui. A ceux-là, il dit :
"Oui, je suis devenu fou. Mais ce n'était qu'un moment. On m'a aidé. J'ai appris à me connaître et il y a encore des traumatismes que je ne suis pas prêt à raconter. Mais pour moi, c'est un début. J'espère que ça aidera quelqu'un. Si cette histoire vous parle, ne faites pas ce que j'ai fait. Faites vous aider. Vous n'êtes pas fous. Vous n'êtes pas abîmés. Juste humains, comme le reste d'entre nous".
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