JO 2016 : Les Bleus ont-ils raison d’y croire ?

Les Bleus de Vincent Collet font leur entrée en matière aux JO 2016 contre l'Australie. Décryptage de leurs chances avec l'oeil aiguisé d'Angelo Tsagarakis.

Shaï MamouPar Shaï Mamou  | Publié  | BasketSession.com / MAGAZINES / Analyse
JO 2016 : Les Bleus ont-ils raison d’y croire ?
Les Bleus débutent les JO 2016 samedi, à 19h15, contre l'Australie. On rêve bien évidemment de voir l'équipe de France décrocher une médaille, malgré une concurrence plus féroce que jamais derrière Team USA. Avec l'aide d'Angelo Tsagarakis (l'ex-joueur de NCAA, des U20 français et dernièrement de Vichy), dont la pertinence,  l'objectivité et le bagou sont toujours un régal dès lors qu'il s'agit de parler de basket, on a décrypté pour vous les chances des Bleus d'atteindre leur objectif.

Comment ils en sont arrivés là

Une fois la désillusion de la défaite contre les "meilleurs ennemis" espagnols à l'Euro 2015 à domicile un peu digérée (on dit bien "un peu"...), les Bleus étaient au courant du deal. Pour que la génération Parker-Diaw-Pietrus ait le droit de boucler la boucle sur une campagne olympique, il allait falloir raccourcir les vacances des uns et des autres et disputer, avec une équipe possiblement hybride, un tournoi de qualification aux Philippines au mois de juillet. Les forfaits fâcheux se sont succédés (Rudy Gobert et Evan Fournier notamment) pendant que l'incertitude planait autour de Nicolas Batum, en pleine négociation avec Charlotte pour y signer un contrat historique. [superquote pos="d"]"Les défaites en prépa, un mal pour un bien"[/superquote]Vincent Collet a finalement pu compter sur un effectif loin d'être bancal et qui est allé faire le job à Manille, sans briller mais en assurant l'essentiel avec des victoires contre les Philippines, la Nouvelle-Zélande, la Turquie et le Canada. Il y a bien eu le mini-mélodrame autour d'Alexis Ajinça, qui s'est senti mis en marge du groupe et n'a pas hésité à s'en émouvoir dans la presse avant même l'annonce de la liste pour le TQO, mais en dehors de ça, la cohésion a de nouveau été de mise chez les Bleus. On a même retrouvé un Tony Parker incroyablement déterminé et transcendant en finale contre le Canada (voir la vidéo ci-dessous). 'est durant les matches de préparation qui ont suivi que les choses se sont un peu gâtées, avec des défaites contre la Croatie, la Serbie et l'Argentine. L'avis d'Angelo Tsagarakis : "Je ne suis pas inquiet outre-mesure. Je l'aurais été si on avait parlé d'un groupe jeune et friable mentalement, mais là j'imagine mal ces gars-là, avec toute leur expérience, arriver la fleur au fusil et ne pas rebondir tout de suite. C'est même peut-être un mal pour un bien que de ne pas arriver avec une dynamique de victoires qui peut vous mener au relâchement. Et puis ils n'ont pas perdu contre des inconnus ! La Croatie a montré en remportant son TQO contre la Grèce et l'Italie qu'elle était forte. La Serbie n'en parlons pas et l'Argentine est en mode dernier run et sera redoutable. La préparation a été un peu perturbée par les questions contractuelles, par la petite histoire avec Alexis Ajinça et une communication parfois perturbante des uns et des autres. Mais ça ne les empêchera pas selon moi d'être là quand il faut". http://www.dailymotion.com/video/x4jxn64_tony-parker-s-amazing-performance-against-canada_sport

Les 12 Bleus de Vincent Collet

Dans l'ensemble, le groupe tricolore était celui que tout le monde attendait, de par les indications données par Vincent Collet avant le TQO et l'expérience collective au détriment de l'individu qui lui est si chère. Seul l'un de ses choix, celui de ne pas emmener Evan Fournier au Brésil, a été un peu contesté. "More Champagne" n'ayant pas fait de vagues dans la foulée, la présence de Charles Kahudi, Thomas Heurtel, Antoine Diot ou Kim Tillie n'entraînera a priori de contestation que si les Bleus manquent complètement leur compétition. Lorsque l'on se penche sur le cinq, la confiance et de mise et pas seulement par pur chauvinisme. [superquote pos="g"]"Ne pas prendre Fournier est respectable et défendable"[/superquote]ESPN a dévoilé son power ranking des équipes qualifiées pour les JO et la France y figure au 3e rang avec une mention pour le moins flatteuse : "Aucun adversaire dans ce tournoi ne peut proposer un cinq plus à même de contrer Team USA que l'équipe de France. Tony Parker et Nando De Colo à l'arrière, Nicolas Batum et Boris Diaw sur les ailes et l'extraordinaire protecteur de cercle Rudy Gobert au poste 5. Le coach capable d'aligner cette composition est le très sous-coté Vincent Collet, qui est le prospect européen au coaching le plus doué dont personne ne parle". Il y aurait presque de quoi s'enflammer... [caption id="attachment_282523" align="alignleft" width="318"] Evan Fournier n'est pas du voyage au Brésil.[/caption] L'avis d'Angelo Tsagarakis : "Si je dis souvent que pour partir à la guerre il vaut mieux avoir les meilleurs soldats et que j'aime beaucoup Evan Fournier, qui sera l'un des porte-drapeaux du basket français à l'avenir, je ne suis pas sûr que l'on ait pris 'les moins bons soldats'. Le choix de Collet est défendable et respectable. Surtout, ce n'est pas une situation où l'on a préféré un joueur à un autre, mais plutôt une façon de procéder à une autre. Le fait de prendre Charles Kahudi, par exemple, me fait penser au choix de sélectionner Makan Dioumassi aux JO en 2000. Ça avait été très critiqué au début, mais tout le monde a crié au génie ensuite. Prendre Kahudi va dans ce sens-là, tant il peut apporter sur certaines séquences en termes d'intensité et de dureté, et qu'il a progressé offensivement. A chaque fois qu'il a participé à une compétition, il y a eu une médaille au bout, donc le coach est peut-être superstitieux..." "Collet a aussi pris trois meneurs parce que Tony Parker aura besoin de souffler. Il était complètement cramé à la fin du dernier Euro. Dans tous les cas, il y a une argumentation valable de la part de Vincent Collet et comme toujours c'est le résultat qui lui donnera raison où permettra aux gens de le critiquer. Je retiens quand même que le fait qu'Evan ait accéléré les négociations avec Orlando pour se rendre disponible était admirable. On ne l'a pas entendu critiquer la décision depuis et c'est tout à son honneur" Le cinq attendu : PG - Tony Parker SG - Nando De Colo SF - Nicolas Batum PF - Boris Diaw C - Rudy Gobert Les remplaçants : Thomas Heurtel, Antoine Diot, Charles Kahudi, Mickaël Gelabale, Joffrey Lauvergne, Kim Tillie

Le Monsieur Plus : Nando De Colo

[superquote pos="d"]"De Colo, un charisme à la Duncan"[/superquote]Le grand public connaît forcément moins Nando De Colo que Tony Parker ou Nicolas Batum, le Nordiste n'ayant pas eu l'opportunité d'exploser véritablement en NBA. Mais les gens comprennent-ils seulement le niveau atteint par Nando cette saison ? En club, où il a tout gagné avec le CSKA Moscou et même été élu MVP d'une Euroleague archi-compétitive, comme en sélection, où il est monté en puissance à chaque compétition, le #12 des Bleus a prouvé qu'il était aujourd'hui le meilleur arrière d'Europe et l'un des meilleurs au monde à son poste. La confiance et la régularité qui sont les siennes à chacune de ses sorties libèrent ses camarades et mettent nettement moins de pression sur ses camarades plus médiatisés. Si tout se passe bien, il devrait être le leader offensif des Bleus durant ce tournoi olympique et leur meilleur joueur tout court. L'avis d'Angelo Tsagarakis : "Nando marche sur l'eau. Le fait qu'on ne parle pas beaucoup de lui est intégrant à sa personnalité et ça lui va bien qu'on ne parle pas trop de lui. Je prends des pincettes pour dire ça, mais à mon sens il est très comparable à Tim Duncan au niveau du charisme : très dominant sur le terrain, impossible à défendre correctement, mais jamais en quête de lumière et d'exposition. Le grand public ne le reconnaît pas complètement à sa juste valeur, mais les connaisseurs et les autres basketteurs savent très bien que le patron, c'est lui." http://www.dailymotion.com/video/x4jzgov_nando-de-colo-mvp-2016-fiba-olympic-qualifying-tournament-manila_sport

Le facteur X : Nicolas Batum

Il y a généralement deux écoles lors que l'on évoque Nicolas Batum. Celle de ceux qui estiment qu'il n'est pas normal qu'avec son talent le Normand ne soit pas encore le leader offensif et même global de cette équipe, et celle de ceux qui considèrent que sa personnalité et les caractéristiques de son jeu font qu'on devrait se contenter d'apprécier ce qu'il propose en termes de polyvalence à la Pippen, ce qui est déjà assez extraordinaire en soi. Il faudra sans doute quelques années de recul pour évaluer "Batman" convenablement une fois sa carrière terminée.
[caption id="attachment_297697" align="alignright" width="318"] Nicolas Batum sera comme souvent attendu au tournant avec les Bleus.[/caption] L'ailier des Hornets a la chance d'avoir encore quelques compétitions devant lui pour écrire une histoire personnelle un peu plus brillante avec les Bleus. Ces JO sont néanmoins l'occasion pour lui de prouver que cette équipe de France doit et va être la sienne une fois les tauliers partis en retraite. De ses prestations des deux côtés du terrain dépendront peut-être le classement final des Tricolores... L'avis d'Angelo Tsagarakis : "Les attentes autour de Nicolas sont légitimes. C'est quelqu'un de très humble, qui est conscient de son potentiel et du fait qu'il doit davantage le concrétiser. On est forcément frustré parfois quand on ne le voit pas donner la pleine mesure de son talent. Il doit encore passer un cap et ne plus proposer de 'teasers' de la grandeur qui peut être la sienne. Dans un sens, c'est similaire à ce que le public ressent depuis presque toujours avec Boris Diaw, un joueur fantastique et qui sait tout faire, mais qui peut parfois se montrer passif et nonchalant. Bien entendu que si Nicolas est au top niveau, cela peut faire la différence entre une médaille et une compétition décevante pour les Bleus". http://www.dailymotion.com/video/x4jxfur_batum-with-the-fantastic-block-against-ejim_sport

Les adversaires

Australie

Vincent Collet l'a clairement dit, la 2e place du groupe se jouera entre les Bleus, les Serbes, bien évidemment, et l'Australie. Le manque d'accomplissement des Australiens à l'échelle internationale ne doit pas permettre de les toiser. Avec 5 joueurs NBA dont Andrew Bogut, Patty Mills et Matthew Dellavedova (Aron Baynes et Joe Ingles sont moins connus du grand public) et quelques vieilles connaissances du basket européen comme David Andersen, les Boomers ont de quoi embêter toutes les équipes du groupe en dehors de Team USA. On sait d'ores et déjà que les joueurs d'Andrej Lemanis ne pratiqueront pas un basket champagne mais mettront tout ou presque sur l'impact physique et le combat, Patty Mills se chargeant de noircir les cases offensives de la feuilles de stats. Prudence ! Roster : Patty Mills, Damian Martin, Matthew Dellavedova, Chris Goulding, Joe Ingles, Ryan Broekhoff, Kevin Lisch - Cameron Bairston, Brock Motum, David Andersen, Andrew Bogut, Aron Baynes.

Venezuela

Ce n'est jamais très agréable de voir les meilleurs joueurs adverses blessés. Mais on ne va quand même pas se plaindre de l'absence de Grevis Vasquez, insuffisamment remis de sa blessure à la cheville. Méfiance tout de même à ne pas y aller la fleur au fusil. Les Vénézuéliens ne sont pas du genre à s'avancer en victimes et vont tout faire pour justifier leur seconde participation aux JO. John Cox, le cousin de Kobe Bryant, pourra en plus jouer les indics, lui qui a évolué pendant près de 10 ans dans le championnat de France... Roster : David Cubillan, Gregory Vargas, Harold Cazorla, Cesar Garcia, Jose Vargas, Dwight Lewis - Nestor Colmenares, Luis Bethelmy, Anthony Perez, Miguel Ruiz, Windy Graterol, Gregory Echenique.

Chine

Depuis la retraite de YaoMing, on ne connaît plus pour ainsi dire que Yi Jianlian dans le roster chinois. La réputation du pivot Zhou Qi est plutôt flatteuse, mais on attendra de le voir en action pour se prononcer sur ses réelles capacités. Un paramètre saute aux yeux lorsque l'on se penche un peu sur cet effectif, c'est la taille de ses intérieurs. Un atout assez clair face à un groupe français où l'accent est davantage donné à la mobilité et la vitesse. C'est ce qu'il faudra avant tout surveiller dans cette partie, même si ce n'est a priori pas cette année que la Chine réussira sa première performance digne de ce nom aux Jeux Olympiques. Roster :  Zhao Kiwei, Sui Ran, Guo Ailun - Ding Yanyuhang, Zhai Xiaochuan,  Zhou Peng, Li Gen - Wang Zhelin, Yi Jianlian, Zou Yuchen, Zhou Qi, Li Muhao.

Serbie

[superquote pos="g"]"Teodosic, pas au niveau de Spanoulis ou TP"[/superquote]Les Serbes sont tranquillement en train de devenir notre bête noire et l'équipe la plus talentueuse d'Europe au coude à coude avec l'Espagne. Il faut dire qu'avec un effectif composé d'autant de types doués et qui transpirent le basket comme Milos Teodosic, Bogan Bogdanovic, Nemanja Nedovic ou le jeune intérieur des Denver Nuggets Nikola Jokic, il y a de quoi faire. Même en l'absence de Nemanja Bjelica, l'équipe coachée par Sasha Djordjevic va être redoutable et ambitionnera, ni plus ni moins qu'une nouvelle accession à la finale comme lors du dernier Mondial. Roster : Milos Teodosic, Stefan Markovic, Stefan  Jovic - Nemanja Nedovic, Bogdan Bogdanovic, Marko Simonovic, Nikola Kalinic - Stefan Bircevic, Milan Macvan, Nikola Jokic, Vladimir Stimic, Miroslav Raduljica.

Team USA

On ne va pas entrer dans l'analyse détaillée et se contenter d'espérer que les Bleus n'aient pas à joueur leur qualification ou la 2e place sur ce dernier match. Sauf miracle ou menace de dévoiler des photos intimes exclusives de Draymond Green, la défaite sera au rendez-vous. Roster : Kyrie Irving, Kyle Lowry, Jimmy Butler, DeMar DeRozan, Klay Thompson, Paul George, Harrison Barnes, Kevin Durant, Draymond Green - DeMarcus Cousins, DeAndre Jordan. L'avis d'Angelo Tsagarakis : "Il faut les respecter, mais le Venezuela et la Chine me paraissent nettement en dessous. La seule inconnue pour moi concerne la place de 2e, entre la France et la Serbie. Je vois l'Australie 4e en mode poil à gratter grâce à leur hargne et leurs énormes qualités de coeur. Ce n'est pas un pays de rugby pour rien ! Notre premier match contre eux va définir selon moi ce que l'on peut faire dans cette poule. Ce qui est sûr, c'est qu'il vous nous emmerder... En ce qui concerne la Serbie, j’émets une petite réserve sur Teodosic. Je respecte son talent et je sais qu'il y a une sorte de culte autour de lui. Simplement, je trouve que c'est un joueur qui craque souvent dans les grands moments et je n'arrive pas à le mettre au même niveau qu'un Spanoulis ou un Parker en Europe. Il ne faut pas exclure la possibilité qu'il dégoupille sur un ou plusieurs matches et que la Serbie en patisse. Dans tous les cas, c'est très solide et il est normal qu'ils visent une médaille".  
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