Kadour Ziani : Du quartier au Madison Square Garden

Kadour Ziani : Du quartier au Madison Square Garden

20 après les débuts de la Slam Nation, la légende du dunk Kadour Ziani est toujours au service du basket et d’une discipline qu’il a élevée au rang d’art.

REVERSE : A la fin de cette tournée, il y a Manille… KADOUR ZIANI : C’est mon meilleur show. C'était un peu spécial parce que tu vois (il marque un temps, encore touché), il y avait la pauvreté. Avant de partir à la salle, on a vu la misère. Je me suis reconnu à travers eux, ça m'a donné une double motivation, j'étais en super forme. J'ai mis que des dunks de ouf, j'avais l'impression que je flottais, que je volais. Jérémy et les autres dunkeurs, ils ont vite compris que ce jour-là j'étais comme dans un état de grâce. C'était un truc global : le moment, l'endroit, les causalités, la pauvreté autour de moi, les blessures que j'avais réussi à surmonter, dont je m'étais libéré. La plénitude. En trois jours, je m'étais blessé cinq fois. Abdoul me disait de me calmer, que c'était pas la NBA. Non, non, les jeunes ont la dalle ici, c'était plus que la NBA pour moi.
Quand tu débarques au Madison Square Garden, t'es choqué. Tu vois Spike Lee, Lennox Lewis, plein de stars au bord du terrain, tu leur parles avant de t'élancer, c'est énorme !
REVERSE : Les venues d'Américains en France, c'était aussi de gros souvenirs, non ? C'était l'occasion de prouver. KADOUR ZIANI : Oui, il y a eu la venue d'And1 en France, à Coubertin. Avec notamment Helicopter. Ils sont arrivés en mode « On est les meilleurs, on écrase tout le monde ». C'était leur mentalité battle, je kiffais. Ce battle a changé beaucoup de choses pour moi, parce qu'ils m'ont même mis dans leur DVD. La veille j'étais venu au Champ de Mars avec Jamil pour dunker un petit peu. Mais le terrain était plein de sable, j'arrivais pas à sauter. Ils ont commencé à dire à Jamil « Mais ton gars c'est un mytho, il est pourri ». J'ai fait nuit blanche, j'ai pas mangé de la journée, je pensais qu'à ça, j'ai pris juste une pomme avant d'y aller. On a fait notre truc, Helicopter il était chaud. Mais moi dans ma tête, j'étais en mode « Lui c'est Helicopter, mais moi je suis une fusée ». Il dunke, il respecte pas les règles en en faisant deux de suite. Vas-y moi aussi alors. Et quand je cale un double-moulin, il commence à pleurer « Ouais, mais c'était pas ton tour ». Ouais, mais le double-moulin, tu l'as vu ou tu l'as pas vu ? A l'échauffement, j'ai fait un reverse à la Jordan, ma tête avait tapé dans le cercle. Je les ai chambrés à mon tour. Le soir, je peux te dire qu'il ne disait plus que j'étais un mytho. Ils étaient cools, ils étaient désolés de m'avoir chambré la veille. Il y a eu l'événement de Tony Parker à La Défense aussi, avec Cuttino Mobley, Bruce Bowen. Avant, Mobley dit qu'il ne connaît personne de meilleur que Carter. Mais après, il a changé de camp. Pendant le show, il voulait faire des photos avec moi « This is my boy ! ». J'ai fait le 360 par-dessus les cinq gars, il est devenu fou. REVERSE : Un des grands moments de la Slam Nation, ce sont aussi vos dates dans quelques grandes salles NBA. KADOUR ZIANI : C’était un peu frustrant sur le coup : à la mi-temps, la moitié de la salle part chercher à manger quand toi tu fais ton show. Mais après, quand tu réfléchis, tu sais que ça n'a rien à voir avec la performance. C’est une autre culture. Et puis au final, c’est une expérience énorme. Quand tu débarques au Madison Square Garden, t'es choqué. Tu vois Spike Lee, Lennox Lewis, plein de stars au bord du terrain, tu leur parles avant de t'élancer, c'est énorme. On était comme des gamins. On faisait le show, mais on était comme des groupies. C'est dur de se concentrer, tu te dis que tu es en train de dunker sur le panier où Jordan a dunké sur Ewing ! Pareil quand t'es à Chicago. En plus, on était parmi les premiers Français à fouler des parquets NBA. Ma plus grande fierté, c'est quand tu regardes le parcours, tu fais le grand écart : du quartier au Madison Square Garden, c'est un chemin de fou. Tu commences à dunker chez toi, avec un caillou et tu finis par le faire au MSG ou au United Center. REVERSE : A l'époque, vous arriviez à en vivre ? KADOUR ZIANI : Non, en vivre, ce n'était pas possible. C'était frustrant, mais j'ai compris qu'on ne pouvait pas en vivre. Maintenant, certains comme Dunk Elite arrivent à obtenir des cachets que les sponsors mettent. Ils ont hérité de notre travail. C’est dommage qu’il n’y ait pas eu une autre génération Slam Nation pour faire comme eux. Lire la suite
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