Pourquoi il ne faut pas s’enflammer sur les Wolves

La franchise de Minneapolis est en passe de construire une équipe taillée pour les playoffs. Mais si la meute fait peur, elle est loin d’être unie.

Pourquoi il ne faut pas s’enflammer sur les Wolves
Les Minnesota Timberwolves sont l’une des organisations les plus actives en NBA depuis deux semaines. Ils ont lancé les hostilités le soir de la draft, en rameutant Jimmy Butler, loup perdu dans l’Illinois et échangé contre Kris Dunn, Zach LaVine et sa patte cassée ainsi que le septième choix de la draft Lauri Markkanen. Sur le papier, une très belle affaire… mais une mauvaise idée ? Déjà après cette opération salivante, les Wolves se plaçaient en outsiders à l’Ouest. Et déjà, les doutes sur la complémentarité de l’effectif prenaient place dans les discussions. Le ton était donné. La suite fut dans la même lignée que ce premier transfert. Jeff Teague a signé pour 59 millions sur trois ans. Taj Gibson a suivi avec 28 millions sur deux ans. Shabazz Muhammad a été sacrifié, manque de financement oblige. Voilà la troupe armée. L’engouement pour l’équipe du grand Nord est compréhensible. Nous y avions cédé l’an dernier, même si nous avions aussi souvent rappelé qu’il était très rare que deux jeunes stars de 21 ans finissent par mener une formation en playoffs. Karl-Anthony Towns et Andrew Wiggins ont logiquement échoué. Leur franchise est maintenant prête à enfin passer un cap. Mais il nous semble important de tempérer ceux qui imaginent déjà les Minnesota Timberwolves s’inviter dans le quatuor de tête à l’Ouest. L’avenir vous donnera peut-être raison. Sans jouer les rabat-joies, nous sommes encore sceptiques. Pas sur le niveau de jeu des talents assemblés mais plutôt sur leur capacité à briller ensemble au-delà du premier tour de playoffs. Jimmy Butler est l’un des quinze meilleurs joueurs de la ligue. Cela ne fait aucune contestation possible. En revanche, la saison précédente semble avoir prouvé que l’associer à deux autres slashers incapables d’être constamment adroits de loin était une mauvaise idée. C’est pourtant exactement ce qu’on fait les Wolves. Ils ont désormais trois joueurs qui ont besoin de la balle pour exister sur les trois postes extérieurs. Jeff Teague est un meneur correct, légèrement au-dessus de la moyenne de la ligue sur sa position. Mais comme Butler et Wiggins, son jeu repose essentiellement sur l’attaque en dribble et le picks-and-roll. Les trois hommes vont donc devoir apprendre à cohabiter et à se relayer. Tous les trois passaient la plupart de leur temps balle en main la saison dernière. Il y a donc un ajustement nécessaire pour tout ce beau monde.

Les Minnesota Timberwolves sont forts.... sur le papier

Seul hic, les défenses ne vont sans doute pas hésiter à blinder la peinture pour fermer tout accès au panier. Car non seulement Teague, Butler et Wiggins sont des slashers, mais en plus aucun des trois n’est vraiment une menace derrière l’arc. En tout cas, pas suffisamment pour que le coach adverse demande à ses hommes de garder un œil sur les shooteurs. C’est tout l’inverse d’un Stephen Curry par exemple. Le meneur des Golden State Warriors attire l’attention de ses vis-à-vis même sans toucher la gonfle une seule fois sur une possession. Son adversaire direct reste près de lui, ce qui a pour conséquence d’étirer le jeu pour ses coéquipiers. Là, il est facile d’imaginer Jimmy Butler jouer le pick-and-roll et de voir rapidement deux autres défenseurs – ceux chargés de contenir Wiggins et Teague – se rapprocher d’au moins un ou deux pas vers le panier. Idem quand les deux autres joueurs attaqueront le cercle. Contrairement çà la plupart des équipes de la ligue, les Minnesota Timberwolves alignent d’ailleurs deux vrais intérieurs de formation. La raquette sera donc d’autant plus bouchée ! Non seulement les lignes de pénétration ne seront pas en claires mais, en plus, si l’un des trois agresseurs venaient à passer le premier rideau, il ferait immédiatement face à un embouteillage. Gorgui Dieng a du touché à mi-distance mais les défenses modernes laissent de toute façon ouverts les tirs entre quatre et six mètres.
Dommage de compter sur l'intérieur potentiellement le plus dominant depuis Shaq et de le contraindre à shooter de loin parce que ses coéquipiers sont maladroits...

Karl-Anthony Towns obligé de s'écarter du panier ?

Karl-Anthony Towns est sans doute le meilleur shooteur du lot. Et c’est presque fâcheux. Sa capacité à tirer de loin va aérer certaines possessions. Le risque, cependant, c’est que le jeune homme se retrouve contraint de s’éloigner de plus en plus du cercle pour faire de la place. Un intérieur de sa trempe qui tire trois à quatre fois derrière l’arc, ça passe encore. Surtout s’il est en réussite. Mais ce serait vraiment dommage de pousser un jeune aussi athlétique et aussi puissant à jouer les Kevin Love pendant une majeure partie de la rencontre. Il n’y a pas eu d’intérieur aussi fort dessous depuis Shaquille O’Neal. Et pourtant, le développement de KAT pourrait être ralenti en raison de l’incapacité de ses camarades à trouver la cible derrière la ligne à trois-points. Réussite à trois-points en 2016-2017 Jeff Teague : 35,7% Jimmy Butler : 36,7% Andrew Wiggins : 35,6% Karl-Anthony Towns : 36,7% Voilà qui va poser problème. L’idée n’est pas de construire une équipe avec uniquement des shooteurs. Personne n’a demandé ça. Mais nous sommes en 2017. S’il y a bien un constat à faire, c’est qu’aucune franchise ne parvient à passer un tour de playoffs sans avoir au moins deux menaces permanentes à trois-points. A savoir un joueur autour des 40%. Les Minnesota Timberwolves n’en ont pas un seul. Nemanja Bjelica a intérêt à faire mouche de loin pour sauver la mise.

Tom Thibodeau, un coach-GM encore dans le passé

Plus globalement, nous avons le sentiment que Tom Thibodeau reste coincé en 2013. La NBA a énormément évolué entre son dernier passage aux Bulls et son arrivée à Minneapolis. Le laps de temps était très court, certes, mais les Warriors ont entamé une révolution. Le coach doit se mettre à la page. Les joueurs sont doués et l’addition des talents permet parfois de surpasser le manque de complémentarité. Cela devrait en tout cas le faire pour accrocher les playoffs. Et ne soyons pas mauvais, ce serait déjà une belle victoire pour la franchise qui ne s’est pas qualifiée pour la post-saison depuis treize ans. Difficile d’imaginer les Wolves passer le second tour avec cet effectif. Même d’ici deux saisons. Avec ces décisions, les dirigeants ont blindé la masse salariale. Le groupe en l’état est celui des deux ou trois prochaines saisons. Il va falloir faire avec. Pour l’instant, tout est beau et les fans s’enflamment. C’est de bonne guerre. Mais une fois l’excitation retombée, une fois les lacunes exposées en playoffs, les signatures de Teague et le transfert de Butler sembleront peut-être bien moins terrifiantes. L’hiver se rapproche… mais les autres franchises de l’Ouest comme Houston, San Antonio et Golden State ont encore quelques saisons pour profiter du soleil avant que Minnesota se mette réellement à dominer la NBA.