Toronto, et si c’était l’heure de tanker ?

Les Toronto Raptors n'ont pas les armes pour inquiéter les Cavs dans les années qui viennent. Alors pourquoi ne pas tenter une approche différente ?

Toronto, et si c’était l’heure de tanker ?
C'est assez rare pour être signalé. Au beau milieu de leur série et presque dès le début, les Raptors ont affiché un fatalisme assez ahurissant et ont presque abdiqué avant d'avoir combattu. "LeBron est trop fort". "Avec LeBron ils peuvent faire ce qu'ils veulent, c'est injuste", "Si quelqu'un sait comment arrêter LeBron, on lui file 100 balles", etc... Être conscient que l'un des meilleurs joueurs de tous les temps vous fait face n'a rien d'humiliant. A chacune des six campagnes victorieuses des Bulls, les adversaires savaient parfaitement quel animal hors-norme se dressait face à eux. Peut-être savaient-ils intérieurement que leurs chances de l'emporter étaient faibles. Mais jamais, après un, deux ou même trois matches, l'un d'entre eux n'a donné l'impression, face aux médias, d'attendre les vacances avec impatience parce que lutter ne servait à rien. Les déclarations de DeMar DeRozan, Kyle Lowry et de plusieurs autres membres des Raptors ces derniers jours ont interloqué et mené vers l'inévitable 4 à 0 entériné dimanche soir à l'Air Canada Center. Mais s'ils partent perdants parce qu'ils se savent trop faibles, à quoi bon conserver ce noyau dur entretenu ces dernières années ? Pourquoi avoir offert un pont d'or à DeMar DeRozan l'été dernier ? Ou prétendre aujourd'hui que faire signer un nouveau deal à Kyle Lowry est une priorité ? Pourquoi ne pas directement se dire que jamais Toronto ne pourra atteindre les Finales en l'état et s'engager vers le côté obscur de la Force : le tanking ? [caption id="attachment_367493" align="alignright" width="318"] Sans James Dolan et son beau chapeau, les Raptors auraient pu tanker dès 2013...[/caption] La voie est tentante. En 2013, Masai Ujiri, fraîchement débarqué de Denver bardé du titre de General Manager de l'année, avait failli l'emprunter. Rudy Gay avait été tradé à Sacramento et Kyle Lowry, sans le génie interventionniste de James Dolan, aurait été envoyé à New York. Comme Ujiri l'expliquait il y a quelques mois, ces Raptors constamment à la lutte pour un top spot à l'Est depuis quatre ans sont presque une anomalie par rapport à ce qu'il souhaitait à la base. Aujourd'hui, l'horizon vers des défaites à répétition et une place enviable à la loterie se dégage à nouveau.

Laisser filer Lowry, trader DeRozan ?

Repartir avec ce groupe sans le moindre changement est impensable et, en pratique, très compliqué. En re-signant tout le monde dans des termes acceptables, Toronto se mettrait au-dessus de la luxury tax d'environ 30 millions de dollars. Ce serait évidemment insensé de s'infliger cette "amende" pour un collectif certes compétitif et méritant, mais tellement loin du titre ! Tout se dégoupillera lorsque l'on en saura plus sur l'avenir de Kyle Lowry. Aujourd'hui, les chances de le voir rejoindre une autre écurie (soit à l'Ouest pour éviter LeBron, ce qui semble être important à ses yeux, soit chez lui à Philly pour être au coeur du prometteur projet des Sixers) sont importantes. On imagine mal les Raptors lui offrir sans broncher les 200 millions de dollars sur 5 ans auxquels il peut prétendre et miser à nouveau sur son duo avec DeMar DeRozan. Les deux All-Stars sont d'excellents joueurs de basket, mais aucun des deux n'est une superstar capable de faire d'une équipe un prétendant au titre. Lowry sort notamment de quelques blessures fâcheuses et, à 31 ans, est à un stade crucial de sa carrière, à mi-chemin entre l'apogée et le déclin. Si Lowry reste, les Canadiens tenteront alors de changer le visage du supporting cast (exit DeMarre Carroll, Patrick Patterson, Jonas Valanciunas et Serge Ibaka ?), mais trouver de quoi devenir une vraie menace pour les Cavs sur le marché sera compliqué. Si Lowry s'en va, le moment sera alors venu de repartir de zéro, tant il est peu probable qu'un autre joueur de ce calibre vienne joindre ses forces à celles de DeMar DeRozan. Toronto n'est pas la destination privilégiée des gros poissons de la ligue, aussi agréable soit la vie dans l'Ontario.

Eviter de reproduire le fiasco Bargnani

Il ne paraît pas si compliqué de passer du statut d'équipe du top 4  à celui de candidat à la loterie. Si conserver les jeunes Powell, Poeltl, Siakam et Wright est une nécessité, la présence de DeRozan ne le sera plus. On peut imaginer qu'une franchise en quête de résultats immédiats sera tentée de monter un deal autour de lui. Pourquoi pas OKC ? Masai Ujiri aura probablement carte blanche s'il veut tanker un an ou deux tout en développant les talents intelligemment draftés ces dernières saisons (ceux évoqué plus haut + Bruno Caboclo). [caption id="attachment_106439" align="alignleft" width="318"] Andrea Bargnani, l'un des n°1 de Draft les plus décevants de l'histoire.[/caption] Simplement, il sera dur de "vendre" à l'une des fanbases les plus enthousiastes et dynamiques du moment un projet de transition dans l'espoir de drafter un talent générationnel. Chat échaudé craint l'eau froide. La dernière fois que les Raptors ont eu l'un des trois premiers choix, en l'occurrence le 1er en 2006, ils ont sélectionné... Andrea Bargnani. Avec le #5, en 2011, c'est Valanciunas qui a eu leurs faveurs. Mais ils n'avaient alors pas Masai Ujiri comme General Manager. Les compétences de ce dernier ne sont plus à prouver et s'il opte pour cette stratégie, c'est qu'il aura bien pesé le pour et le contre et qu'il faudra lui faire confiance. C'est peut-être au prix de quelques mois pénibles que les Raptors deviendront enfin une vraie force dans cette ligue dont ils ont tutoyé le sommet sans jamais l'embrasser...