Trevor Ariza, au nom du frère

Près de 20 ans après avoir connu un drame familial douloureux et 5 ans après le titre avec les Lakers, Trevor Ariza s'est reconstruit pour devenir l'une des pièces maîtresses des surprenants Wizards.

Trevor Ariza, au nom du frère
Alors que tout le monde insiste sur la jeunesse et l'inexpérience de certains cadres des Wizards, John Wall et Bradley Beal en particulier, on en oublierait presque que Washington compte un champion NBA dans ses rangs. Seul joueur de l'effectif de Randy Wittman à avoir remporté une bague, Trevor Ariza n'est pas n'importe qui et les habitués du Verizon Center s'en sont rendus compte cette saison. Depuis le titre obtenu avec les Lakers en 2009, où il avait joué un rôle important en sortie de banc (24 minutes par match), on a eu du mal à retrouver un Ariza au top niveau. Après une bonne première saison à Houston, le Californien s'est fait oublier à New Orleans et, à un degré moindre, à Washington. La montée en puissance des Wizards cette saison coïncide avec son retour en forme sur le plan statistique : 14.4 points par match, 6.2 rebonds (record en carrière) et 40% à 3 points (sa meilleure moyenne également). Initialement en concurrence avec Martell Webster pour le poste de starter, l'ailier de 29 ans a fait comprendre à Wittman qu'il était l'homme de la situation. Son game 4 face aux Bulls est même à marquer d'une pierre blanche, puisqu'il a battu son record de points en playoffs (30 pts), en y ajoutant 8 rebonds pour faire le break face aux Bulls et conduire Washington en demi-finale de Conférence.

Un drame personnel terrible

Comme beaucoup de ses congénères, la vie n'a pas toujours souri à Trevor Ariza avant qu'il ne soit grassement payé pour ses qualités de basketteur. L'ancien d'UCLA a connu un drame personnel dans son enfance sur lequel il s'exprime rarement. Entre 8 et 10 ans, il parcourait le globe au gré des nouveaux contrats de son beau-père, l'ancien joueur Kenny McClary, découvrant ainsi l'Argentine, l'Australie, le Brésil, les Philippines, la Turquie ou le Venezuela. C'est à Caracas qu'est survenu l'incident. Alors qu'il se trouve au match de son beau-père, ses deux jeunes frères, Kenny, 8 ans, et Tahj, 6 ans, restent à l'hôtel en compagnie d'une baby-sitter. Pas suffisamment attentive, celle-ci ne voit pas le petit dernier jouer près d'une fenêtre ouverte et chuter du 30e étage... Resté seul au stade pendant que son beau-père et sa mère quittaient les lieux précipitamment pour constater le drame, Trevor ne comprend pas immédiatement qu'il vient de perdre celui avec qui il partageait son lit.
"Je me suis reporté sur le basket après ça, pour m'échapper du monde réel. J'ai travaillé dur pour continuer d'échapper à ce qu'il s'était passé. Mon fils m'a demandé pourquoi je ne l'avais pas appelé Trevor Jr. Je lui ai dit qu'il portait le nom de quelqu'un de meilleur, du garçon le plus génial que j'ai connu : Tahj", a-t-il expliqué au Washington Post.
[superquote pos="g"]"Phil Jackson est un maître pour manipuler les esprits. C'était magnifique de travailler avec lui".[/superquote]S'il a remporté un titre à seulement 24 ans avec les Lakers, Ariza a eu son lot de déceptions avant et après. Heureux d'atterrir à New York grâce à Isiah Thomas lors de la Draft 2004, il s'embrouille avec Larry Brown, pas assez prévenant et pédagogue selon lui. Ses quatre saisons suivantes à Orlando puis aux Lakers sont anecdotiques et on pense alors que son profil de slasher unimensionnel ne peut que lui offrir une carrière de bourlingueur en sortie de banc. C'est avec Phil Jackson que le déclic se produit.
"Il me disait que j'étais capable de shooter et que je devais le faire. Je suis quelqu'un qui a parfois besoin qu'on lui dise qu'il est bon. Phil est un maître pour manipuler l'esprit des joueurs de la façon dont il l'entend. C'était magnifique de travailler avec lui".
Tradé contre Ron Artest, il ne se sent pas plus à l'aise que ça dans le Texas et encore moins en Louisiane, lorsqu'il est envoyé à New Orleans, malgré la confiance placée en lui pour épauler Chris Paul durant les playoffs. A Washington, sa première saison est marquée par les blessures. La seconde s'annonce elle plutôt mal lorsqu'il apprend que les Wizards ont drafté Otto Porter Jr, un poste 3, et prolongé Martell Webster, un autre concurrent direct. Porter ayant été longtemps blessé et Webster s'étant avéré moins régulier que lui, Trevor Ariza a sauté sur l'occasion pour devenir une pièce essentielle du dispositif de Randy Wittman. Dans un rôle de "3 and D", ses qualités défensives jusque-là sous-cotées font merveille. Alors que les Wizards se déplacent dans l'Indiana pour le game 1 de leur demi-finale ce lundi, ils savent qu'ils devront s'appuyer sur Ariza pour espérer poursuivre l'aventure. L'intéressé sera free-agent cet été et vraisemblablement très demandé.
"Je ne sais pas encore ce qu'il se passera. Evidemment, revenir dans la Conférence Ouest serait bien pour me rapprocher de ma famille mais je n'ai pas de désir particulier pour le moment. Je n'ai pas forcément à partir d'ici. Je serai là où on a envie de moi, là où je me sentirai désiré".
Avant de réfléchir à tout cela, Trevor Ariza a un certain Paul George à neutraliser, en plus des séquences où il se retrouvera face à Lance Stephenson. Des tracas suffisants pour se concentrer uniquement sur l'instant présent...