Griffin aux Pistons : Analyse d’un transfert incompréhensible

Griffin aux Pistons : Analyse d’un transfert incompréhensible

Zoom sur les motivations des Detroit Pistons et des Los Angeles Clippers après le transfert massif de l'intérieur All-Star Blake Griffin.

Antoine PimmelPar Antoine Pimmel | Publié  | BasketSession.com / MAGAZINES / Analyse
Thibault Fingonnet, confrère contributeur pour le site QI Basket, a défini le transfert de Blake Griffin de la meilleure des manières : « Il fait penser à ceux concoctés par l’ordinateur entre deux équipes que tu ne contrôles pas dans 2K. » Pour ceux qui ne seraient pas adeptes du jeu vidéo, sachez que le mode My GM permet donc de prendre la tête d’une franchise en jouant les matches mais en gérant aussi tous les à côtés d’une organisation. Transferts, recrutement, licenciement, entraînements, prix des places, etc. L’IA s’occupe de diriger les vingt-neuf autres organisations de la même manière. Et pour éviter la monotonie, la console négocie des échanges entre ses différents profils. Et souvent, ils ne ressemblent à rien. Aucun respect des positions (une équipe peut ainsi se retrouver avec deux All-Stars au même poste), une surcharge de la masse salariale, mauvais timing, etc. Ah, le timing. C’est peut-être l’élément le plus bluffant du blockbuster mis en place par les Los Angeles Clippers et les Detroit Pistons cette nuit. Le timing, parlons-en un tout petit peu plus. En janvier 2016, les Denver Nuggets, déterminés à mettre la main sur une star pour faire décoller l’attractivité d’un marché peu désiré, avaient proposé plusieurs joueurs pour récupérer Blake Griffin. Allez, les noms, pour se marrer. Nikola Jokic, alors rookie, Danilo Gallinari et Will Barton. Les Californiens ont refusé. Aujourd’hui, Jokic est l’un des meilleurs pivots NBA, Gallo a finalement signé aux Clips pour 65 millions sur trois ans (et il est blessé) et Barton est un très bon sixième homme. Comme quoi, le timing… Les Pistons ont suivi la même logique que les Nuggets à l’époque. Detroit est une franchise historique. Mais une organisation qui n’intéresse personne ou presque – No Offense. Il n’y pas d’Isiah Thomas. Pas de « Bad Boys » charismatiques. Pas de Grant Hill. Ni l’esprit cols bleus qui régnaient quand Chauncey Billups, Rip Hamilton, Tayshaun Prince, Rasheed Wallace et Ben Wallace limitaient toute la NBA à moins de 90 points par match. Il n’y a plus d’âme à ‘Motor City’ et ce depuis cette tentative déjà désespérée de rallumer la flamme en échangeant Billups contre Allen Iverson en 2009.

Blake Griffin pour séduire Detroit... et sa population !

Une nouvelle salle a été construire en contre ville. Fini le légendaire mais sombre Palace d’Auburn Hills. Bienvenue à la Little Caesars Arena, enceinte toute pimpante qui sonne creux. Personne n’y va. Les tribunes sont vides et brancher son League Pass sur les Pistons piquent les yeux. Le taux de remplissage est le deuxième plus mauvais de la NBA devant les Hawks, toujours aussi impopulaires à Atlanta. La franchise de Géorgie est pourtant un modèle de réussite – sportive – pour Detroit après l’arrivée de Blake Griffin. L’intérieur All-Star n’a plus les mêmes qualités athlétiques que par le passé mais il reste un joueur très spectaculaire. Posters, dunks, passes dans le dos, dribbles entre les jambes. La panoplie pour faire le show. Un grand nom et des highlights pour enfin donner un peu d’engouement à l’organisation. Revenons à Atlanta. Quand Al Horford, Joe Johnson, Jeff Teague et compagnie volaient parmi les faucons, les Hawks attiraient un peu plus de monde à la salle. Surtout, ils squattaient les sommets de la Conférence Est tout en sachant pertinemment qu’ils n’avaient pas les armes pour aller plus haut. Ce n’est pas en réunissant les deuxièmes et troisièmes options qu’une équipe se fraie un chemin vers les sommets. Mais elle au moins le mérite de participer – aux playoffs ! – chaque année. Et bien peut-être que c’est exactement le but des Pistons. C’est en tout cas ce que ce transfert laisse penser. Hormis un premier tour en 2016 (un sweep contre les Cleveland Cavaliers), ils n’ont jamais joué au-delà du mois d’avril depuis 2009. Avec la paire Blake Griffin - Andre Drummond dans la peinture, ils se donnent enfin le droit d’y croire durablement. Pendant trois ou quatre ans. Le temps que le contrat gigantesque de « Quake » (signé pour 171 millions sur cinq ans par les Clippers en juillet dernier) paraisse de plus en plus dégueulasse. Une énorme partie de la masse salariale sera réservée au duo. Stan Van Gundy, en imaginant qu’il reste encore Président longtemps, en plus de sa casquette de coach, va devoir se révolutionner pour trouver des alternatives pas chères pour entourer tout ça. Tout en sachant que les Pistons n’ont toujours pas régler leur problème à la mène. Reggie Jackson est une bille – en comparaison de la concurrence en NBA – souvent blessée. Mais une bille qui palpe quand même 16, 17 puis 18 millions jusqu’en 2020. Difficile d’imaginer Detroit monter une formation en mesure de luter pour autre chose qu’un simple tour d’honneur avec de telles contraintes financières.

Retour à zéro pour les Los Angeles Clippers ?

C’est un chemin vers la classe moyenne. Les Clippers, eux, ont pris la direction inverse. Finies, les saisons à 50 victoires et les sorties prématurées en playoffs. Retour aux sources. A la bonne loose. Enfin, peut-être pas. En tout cas, pas tout de suite. Tant que Lou Williams, Avery Bradley, Tobias Harris, Milos Teodosic, DeAndre Jordan et compagnie cohabitent ensemble, ils seront en course pour la post-saison. C’est le Miami Heat de la Conférence Ouest. Une collection de joueurs B, B+. Mais les Californiens auraient pour projet de se séparer de Williams et Jordan. Comme l’a écrit Shai Mamou, ce move ressemble à une prise de pouvoir de Jerry West. L’architecte des ex-Lakers et des Golden State Warriors actuels a pris place dans l’organigramme de la franchise l’été dernier. Pour y mettre sa patte, autant tout casser. Virer les contrats lourds. Longs. Coûteux. Ils ont plusieurs options devant eux : A) avec la place libérée sous le Cap, ils peuvent tenter leurs chances avec LeBron James, Paul George ou la superstar de leur choix cet été. Le marché hollywoodien est toujours porteur en NBA. B) La reconstruction classique : prendre des picks, des jeunes, collectionner les assets, les entourer et essayer de retrouver un jour le devant de la scène. Néanmoins, Los Angeles a déjà un trop bon bilan pour tanker cette saison. Les Pistons manqueront peut-être les playoffs et céderont un pick éventuellement intéressant. Mais il est finalement peu probable que les Clippers piochent dans le top dix d’une cuvée de rookies encore plus chargée que la promotion actuelle. Le tanking est une manœuvre attirante pour toute équipe qui se situe entre la dixième et la sixième place chaque saison. Le système est fait ainsi. Sans relégation et avec un seul champion, la tentation est grande pour les franchises qui n’ont plus la marge nécessaire pour passer un cap et qui n’ont que quelques échanges à faire pour soudainement se retrouver tout en bas. Avec l’espoir de remonter tout en haut grâce à la draft qui récompense les moins méritants. Mais le tanking est aussi un risque. Un pari. Il y a des organisations qui ne s’en relèvent pas. Qui finissent par végéter dix piges – hello, les Sacramento Kings ! – sans vraiment réussir à se fixer une direction claire. Dans ces moments-là, il faut « Trust The Process ». Faire confiance à Jerry West. Les quelques saisons à venir et les décisions qui découleront de ce transfert étrange détermineront un éventuel vainqueur de l’échange. Mais en attendant, tout le monde reste sur le cul.
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