Changement d’ADN pour les Chicago Bulls

Fred Hoiberg, le nouveau coach des Chicago Bulls, n'a pas tardé à rompre avec la méthode Thibodeau. La franchise peut-elle réussir ce lifting ?

Changement d’ADN pour les Chicago Bulls
La chose la plus difficile à acquérir pour une franchise NBA, c'est probablement une identité de jeu. La plupart des équipes ont des individualités qui se démarquent et représentent, aux yeux des fans, l'organisation qu'ils soutiennent. Une identité, ce n'est pas ça. C'est plutôt ce qu'a apporté Tom Thibodeau pendant 5 saisons à Chicago. Une intransigeance défensive, une intensité quasi-constante et un goût affirmé pour les fondamentaux plutôt que pour le spectacle à tout prix. Le style "Thibs" a permis aux Bulls de passer un cap et de retrouver un peu de leur lustre d'antan après des années de galère, faute de pouvoir atteindre les Finales NBA, leur objectif avoué. Tom Thibodeau avait ses défauts, notamment celui de ne pas suffisamment ménager ses joueurs-clés, d'autant que ceux-ci avaient malheureusement une prédisposition aux blessures fâcheuses ou récurrentes, à l'image de Derrick Rose (131 matches manqués sous l'ère Thibodeau) ou de Joakim Noah (89 matches manqués). Impossible en revanche de lui reprocher de ne pas être resté fidèle à sa philosophie. Au plus fort des tensions entre l'ex-assistant de Doc Rivers à Boston et sa direction (Gar Forman le GM en particulier) celui-ci a conservé l'ADN qui lui avait permis d'acquérir autant de respect à travers la ligue. Son entêtement presque attachant, l'absence de résultats marquants et un désir de changement venu d'en haut ont finalement eu raison de son mandat dans l'Illinois.

Tout le monde n'adhère pas à la nouvelle méthode

[superquote pos="d"]Butler : "On a toujours été fiers de jouer dur et de faire le sale boulot".[/superquote]Fred Hoiberg, ancien joueur de la franchise et coach très estimé en NCAA du côté d’Iowa State est donc arrivé cet été pour une révolution de palais. Hoiberg n’a pas tardé à monter que s’il respectait le travail de son prédécesseur, il entendait provoquer une certaine rupture. C’est en axant nettement moins son discours sur l’importance de la défense qu’il s’est déjà démarqué de Thibodeau. En sortant Joakim Noah, ancien Defensive Player of the Year, pour y inclure Nikola Mirotic, sa large palette de moves offensifs et sa connivence avec Pau Gasol, Hoiberg n’a pas laissé de place au doute : il veut faire des Chicago Bulls une équipe plus sexy et plus dangereuse offensivement. Sauf qu'on ne chamboule pas les habitudes des gens sans faire grincer quelques dents. "Fan favorite" par excellence, Noah a accepté son sort mais n'a que peu goûté la manière dont Hoiberg a communiqué sur le sujet, prétendant que c'était le Français qui avait demandé à sortir du banc. D'autres au sein du groupe n'apprécient pas franchement que la protection du cercle et la récupération du ballon ne soient plus des priorités. Jimmy Butler, qui court et défend toujours pour deux depuis le début de la saison, a fait une sortie très remarquée il y a quelques jours pour stigmatiser ce changement d'approche. S'il ne vise pas directement son nouveau coach, on sent que la méthode ne le convainc pas encore.
"On ne défend pas, on attend que les équipes ratent leurs shoots. L’attaque n’est pas le problème. Mais on doit vite arrêter d’avoir cette mentalité parce qu’on ne gagnera pas des matches comme ça toute la saison. On a toujours été fiers de jouer dur sans hésiter à faire le sale boulot. Dernièrement, on a été trop soft et on s’est fait torcher (sic). La défense, c’est une question de volonté", a lâché Jimmy « Buckets » sur ESPN.
[superquote pos="g"]Butler ne respecte pas l'éthique de travail de Rose.[/superquote]On peut supposer que Derrick Rose fait partie de ces éléments que le MIP 2015 aimerait voir mettre les bouchées doubles. Avant le début de la saison, la presse locale s'était d'ailleurs faite l’écho de tensions latentes entre les deux hommes, Butler reprochant à son meneur de ne pas montrer l’exemple.
"Ils ont des divergences de points de vue en ce qui concerne le boulot. Butler ne respecte pas l’éthique de travail de Rose. Il le voit certes comme le visage de la franchise, mais ne comprend pas qu'en tant que star de l’équipe, il ne donne pas tout pendant les entraînements. L’image qu’il renvoie aux autres n’est pas bonne", raconte Joe Cowley, du Chicago Sun Times en citant une source interne.
Rose et Butler ont depuis mis de l'eau dans leur vin et réussi à cohabiter. Après les déclarations du second, les Bulls ont passé et réussi un test de taille contre Oklahoma City la nuit dernière. Face à deux des attaquants les plus meurtriers de la ligue, on a à la fois vu un groupe concerné défensivement et un Derrick Rose capable de prendre ses responsabilités au moment opportun. On ne peut évidemment pas savoir à ce stade de la saison s'il s'agit de la vérité d'un match ou d'une tendance amenée à se confirmer, mais Chicago a trouvé le bon équilibre entre jeu offensif et sérieux dans sa moitié de terrain le temps de cette partie.

Un cinq toujours pas bien défini

Les changements sont néanmoins toujours en cours et palpables. Dans son cinq pour affronter le Thunder, Fred Hoiberg avait décidé de sacrifier Tony Snell, dont on attend l'éclosion cette année, au profit du nettement moins défensif Doug McDermott, gâchette bien connue des amateurs de NCAA. Snell n'a passé que 10 minutes sur le terrain et ne semble pas être l'un des favoris du nouveau boss. Ce choix donne néanmoins une tonalité extrêmement défensive au second unit des Bulls, entre Joakim Noah, Taj Gibson et Tony Snell, ce sur quoi Hoiberg pourra s'appuyer dans les moments chauds ou les rencontres de playoffs. [superquote pos="d"]Rose : "Thibs était un grand coach, mais c'est le passé".[/superquote]Il y en a un qui ne parait pas plus nostalgique que cela de l'époque Thibodeau. Derrick Rose, que certains ont décrit comme une victime de Tom Thibodeau (qui l'avait laissé sur le terrain contre Philadelphie lors de sa tristement célèbre blessure alors que le match était gagné), vit plutôt bien le changement.
"Thibs était un grand coach, mais c’est le passé. Désormais, on pense au futur. Avec Fred, c’est différent, il est plus cool. Il nous met de la musique à l'entraînement et amené une atmosphère nouvelle que tout le monde apprécie. Les gars viennent même quand il n'y a pas match pour prendre des shoots. Ce n'étais pas le cas avant", a déclaré Rose sur NBA.com.
Après six matches, les Bulls affichent un bilan de 4 victoires et 2 défaites. Rien de scandaleux ou de particulièrement inquiétant, d'autant que derrière Cleveland le tableau parait extrêmement ouvert à l'Est pour une place de choix en playoffs. On attend simplement de voir se dessiner plus clairement le nouveau visage de cette franchise qui ne laisse personne indifférent.