La NBA et les joueurs se foutent de notre gueule

Personne n'avait envie de jouer le All-Star Game NBA dimanche. Personne.

La NBA et les joueurs se foutent de notre gueule

Ils se foutent de notre gueule. Un des journalistes intervenant pendant mon cursus nous avait un jour avoué qu’il commençait à écrire ses papiers par « il(s) se foute(nt) de notre gueule » pour se mettre dans un ton plus agressif quand il voulait dénoncer quelque chose. Une fois l’article terminé, il enlevait sa première phrase. Là, même pas besoin de la retirer : les joueurs NBA, enfin les All-Stars, se foutent de notre gueule.

Mais c’est quoi ce… match… non, impossible d’écrire match… c’est quoi ce… truc ? Cette parodie. 211-186. Yep, c’est le score et non une faute de frappe. 211 à 186 pour la Conférence Est, vainqueur du All-Star Game 2024 à Indianapolis. Comme le disait Adam Silver d’un ton très plat pour bien marquer son agacement et sa gêne : « félicitations. »

211 points, c’est évidemment un record. 397 au total sur la soirée. Un record aussi sur une mi-temps (193, dont 104 pour l’Est). 167 tentatives à trois-points. 67 marqués, dont 42 pour l’Est. Plus de la moitié des tirs pris dimanche ont été derrière l’arc, souvent bien, bien au-delà. Luka Doncic a l’air de vouloir jouer quand il balance un missile depuis son camp ? Franchement.

Bien sûr qu’il fallait être naïf pour s’attendre à autre chose. Le All-Star Game, ça fait bien longtemps que la plupart d’entre nous n’en espèrent plus rien ou ne le regardent tout simplement plus. Parce que l’esprit enfantin qui nous faisait apprécier l’évènement a disparu. Ou parce que les joueurs se foutent de notre gueule. Mais l’ironie, c’est que la ligue, elle, continue de tout faire pour essayer de rendre son classique de février un peu plus attractif.

C’est ce qu’elle nous a vendu pendant des mois ! La NBA est revenue à son format traditionnel, Est vs West, en reprenant quatre quart-temps de 48 minutes et non plus un score à atteindre. Une première depuis 2017, année où avait été lancée l’idée de mettre des capitaines d’équipe avec une draft des All-Stars pour créer une atmosphère playground. Ça a fonctionné très brièvement. Et encore.

Les dirigeants pensaient avoir touché le fond lors de l’édition précédente à Salt Lake City. Silver et ses collaborateurs ont répété plusieurs fois qu’il était important de retrouver une forme de compétitivité lors du All-Star Game. Il y a eu des discussions avec les joueurs. Pour leur faire passer le message. Chris Paul a même expliqué qu’il était important que la routine d’avant-match soit la plus proche possible d’une rencontre de saison régulière et la NBA a essayé de faire les arrangements nécessaires. Pour quel résultat ? Un rendu encore plus pitoyable que l’an passé.

CQFR : le bilan du All-Star Weekend

Il n’y a eu que 3 fautes sur l’ensemble des 48 minutes. Une trentaine de moins qu’en 2003. Et carrément 60 (59) de moins qu’en 1993 ! Bien sûr que ça ne veut pas tout dire mais ça illustre le peu d’engagement des deux équipes la nuit dernière. Personne n’avait envie de défendre. OK, pourquoi pas. Mais personne ne donnait l’impression d’avoir envie de jouer tout court. Et ça, c’est plus grave.

« Pour moi, c’est un All-Star Game. Je ne verrai jamais ça comme quelque chose de compétitif. C’est un break, je ne pense pas que les gens aient envie de venir pour être à fond. Je ne sais pas », avoue, très cash, Anthony Edwards, qui est, au passage, l’un des principaux représentants de la nouvelle génération. Super encourageant. En même temps, on a vu lors du Skills Challenge qu’il n’en avait rien à secouer en prenant ses tirs main gauche. Et ça a bien gonflé Victor Wembanyama sur le coup. Mais bref. Il a le mérite d’être honnête et de dire ce qui saute aux yeux : les gars sont en semi-vacances, ils peuvent souffler un peu et ils n’ont pas envie de se faire chier.

Et attention, ça peut se comprendre ! Les saisons sont longues. Intenses. Sauf que, dans ce cas, pourquoi faire tout un foin autour des sélections pour le All-Star Game ? Pourquoi des joueurs se plaignent encore d’être snobés pour l’événement quand, de toute façon, ils ne jouent même pas au moment où ils sont appelés ? Comment oser parler de « manque de respect » ? Le vrai manque de respect, c’est de jouer si mollement, en trottinant, sans aucun flow, sans aucun effort, devant des types qui ont payé leur place une fortune (la NBA se fout bien de notre gueule aussi, encore plus que les joueurs).

J’entends déjà les « le public veut du spectacle. » Mais non mon gars. Non, non, non et non. Le public veut un match. Un semblant de match. Et même ça, ça n’existe plus. On ne demande pas une rencontre de playoffs entre 24 stars de la ligue. Mais au moins 5 ou 6 minutes un peu intenses à la fin. Il n’y avait même pas ça, il n’y avait aucun suspense. Rien. D’ailleurs, le public a sifflé les athlètes. Histoire de bien faire comprendre sa position.

En fait, la vraie question, c’est que veulent les joueurs ? Quel est leur but ? La réponse est automatique : l’essentiel, c’est de ne pas se blesser. Là encore, ça se comprend. C’est leur gagne-pain. Ils ne veulent prendre aucun risque. Mais est-ce que ça ne devient pas presque de la psychose à ce point ? Combien de mecs se sont blessés lors d’un All-Star Game dans les années 90 ou au début des années 2000 ? Dans ce cas-là, pourquoi s’entraîner ? Il y a un risque de blessure. Pourquoi jouer la saison régulière… enfin bref. La crainte reste légitime. Il y a des millions et des millions en jeu.

Des millions en partie engendrés par ceux, comme nous, comme vous, qui suivent constamment cette ligue, achètent des tickets, des League Pass, des jerseys, etc. On se fout bien de notre gueule. Ou alors on est vraiment naïfs. La preuve, on a l'impression de faire cet édito tous les ans.