La nouvelle vie de Dwyane Wade

Alors qu'il a l'opportunité de signer son dernier gros contrat, Dwyane Wade devrait sans doute accepter une "paycut". A-t-il vraiment le choix ? A 32 ans, l'ancienne superstar semble sur la pente descendante.

Antoine PimmelPar Antoine Pimmel | Publié  | BasketSession.com / MAGAZINES / Focus
La nouvelle vie de Dwyane Wade
La carrière d’une superstar NBA se décompose en plusieurs étapes. Le joueur en question est d’abord drafté à sa sortie de l’université, suscitant l’excitation des fans et des journalistes. Ses quatre premières saisons lui permettent de s’acclimater aux divers rudiments de la ligue. Une fois son « contrat rookie » arrivé à expiration, il peut alors signer une première extension au montant maximum – Autour des 80 ou 100 millions sur cinq ans selon si le joueur est éligible à la Rose provision* – synonyme d’ascension vers les sommets de la ligue. Selon la durée de la première prolongation, il se retrouve alors en position de signer un premier « vrai » contrat maximum. Le joueur est alors à l’aube des meilleures années de sa carrière, « his prime » en V.O. Quatre ou cinq plus tard, la trentaine dépassé, il se retrouve alors à un carrefour de son histoire. C’est exactement à ce point précis que l’on retrouve Dwyane Wade. Une star avec dix ans NBA au compteur à deux options au moment d’aborder pour la deuxième fois la (unrestricted) free agency : a) signer un deuxième et dernier contrat max, b) accepter une paycut pour aider sa franchise à se maintenir au sommet de la ligue. Au vu de ses premières huit ou neuf premières saisons, il semblait d’ores-et-déjà acquis que Dwyane Wade opterait pour la première option et serait ainsi l’heureux bénéficiaire de la coquette somme de 130 millions de dollars sur 5 ans (un montant similaire à celui que pourrait percevoir Carmelo Anthony s’il reste à New York). Avant l’arrivée de LeBron James et Chris Bosh à South Beach, « Flash » s’est imposé en moins de dix ans comme l’un des cinq ou six meilleurs arrières de l’histoire. Il a conduit le Heat au titre NBA en 2006 en décrochant le trophée de MVP des finales, disputé 10 All-Stars Game et s’est imposé comme l’une des idoles du public.

De "Flash" à "Flashes"

Ce Dwyane Wade n’existe plus. « Flash » est devenu « Flashes » pour reprendre la blague de Jalen Rose, ancien joueur NBA désormais contributeur pour Grantland. Son attitude sur et en dehors du terrain (flops, déclarations, etc) a fini par lasser une partie du public. La domination du Miami Heat sur la ligue a également contribué à diminuer la cote de popularité du joueur, dont les maillots floqués du numéro 3 se vendaient encore comme des petits pains il y a cinq, six ans. La réalité du terrain est également différente : le futur Hall Of Famer ne domine plus. Ses genoux ont eu raison de sa capacité à mener – seul – une franchise en playoffs. En 2009, il portait le Heat vers le premier tour avec 30,2 pts, 5 rbds et 7,5 pds de moyenne. Ses lieutenants à l’époque ? Jermaine O’Neal, Michael Beasley et Dorell Wright. Quatre ans plus tard, jusqu’où serait allé le Heat – sans James et Bosh – avec Wade pour seul leader ? Les dirigeants floridiens ont pourtant mis le vétéran dans les meilleures dispositions cette saison. Alors qu’il était gêné par des douleurs aux genoux lors du sacre l’année passée, il a cette fois pu bénéficier de jours de repos supplémentaires tout au long de la saison. Dwyane Wade a joué 54 matches cette saison. Il a pu CHOISIR ses matches. Il a pu décider de quel soir il serait en état de tenir son rang.  Il a pu décider de laisser LeBron James, et à un degré moindre Chris Bosh, porter le Heat à la deuxième place de la Conférence Est alors que ces derniers venaient d’avaler trois saisons et autant de finales consécutives à plus de 100 matches (avec une Olympiade pour James et Wade en 2012). L’immense talent du « King », les progrès de Bosh à trois-points, les fondamentaux du Heat et la faiblesse de la Conférence Est ont permis aux Floridiens de s’accrocher sur le podium. Mais quel aurait été le classement du Heat au sein de la Conférence Ouest avec un Wade limité en saison régulière ? Surtout que LeBron a manifesté à plus d’une reprise sa lassitude vis-à-vis des absences répétées de son premier lieutenant.
[superquote pos="d"]"C'est dur sans Wade" LeBron James.[/superquote]« J’ai ressenti beaucoup de frustration lié aux allers et retours au sein de la rotation cette saison. Ça nous a affecté », expliquait LeBron James après la défaite du Heat face aux Spurs en finales NBA.   Plus tôt dans la saison, en janvier, il s’était déjà exprimé à ce sujet : « Avec plusieurs gars qui font des allers et retours à l’infirmerie, et avec les problèmes de D-Wade, c’est dur pour nous de compenser. »   « Je peux dire que du point de vue du rythme, ça nous gêne. Et nous sommes une équipe construite sur le rythme, construite sur l’alchimie, et nous avons eu tellement de changements de lineups, tellement de gars absents pour blessures que ça impacte négativement notre niveau de performance. Nous n’aimons pas utiliser cela comme une excuse. Mais c’est dur, c’est dur. »
Dwyane Wade a tout de même compilé 19 points et près de 5 rebonds et 5 passes de moyenne en saison régulière. Sur 54 matches. 54 matches sur les 82 que compte une longue, longue, longue saison NBA. Malgré sa fraîcheur, il n’a pas su répondre présent sur toute la durée des playoffs. Il a certes montré quelques « flashes » (d’où son nouveau surnom) de son talent par moment, notamment lors de certains quatrièmes QT où il a parfaitement épaulé LeBron mais il n’a pas su peser sur les résultats de son équipe en finales. Déjà face à Indiana, Wade n’a pas su faire la différence lorsque James a été gêné par des problèmes de fautes. Idem lors du premier match des finales, le fameux « cramps game ». Le « King » a quitté le parquet avec un peu plus de cinq minutes à jouer. Le Heat était repassé devant. Sans James, Miami a sombré. Comme Wade. En 2011, il tenait la baraque lorsque LeBron se cachait en fin de match. Cette époque paraît désormais très, très, très lointaine.

Quel contrat pour Dwyane Wade ?

Revenons-en à ce fameux carrefour. Dans moins de dix jours, il aura l’opportunité de mettre un terme à son contrat via la « early termination option » et conclure un nouveau deal avec la franchise qui l’a drafté en cinquième position en 2003. Le « Big Three » de Miami a déjà marqué l’histoire en remportant deux titres et en disputant quatre finales en autant de saisons. Mais les trois amigos ont déjà prévu de se concerter afin de décider si, oui ou non, ils prolongent leur aventure en Floride, et surtout à quel prix.
« On veut continuer à jouer ensembles », annonce déjà Chris Bosh. « Nous avons le sentiment que si nous restons ensemble, nous pouvons continuer de nous battre pour le titre. Franchement, nous aimons être ici, il se passe de bonnes choses. »   « C’est plus facile d’être sur la même longueur d’onde maintenant qu’en 2010. Tout simplement parce que je ne les connaissais pas comme je les connais maintenant », ajoute LeBron James.
Les trois stars ont beau se concerter, la décision revient principalement à LeBron James. Il est le meilleur joueur du monde et la superstar de l’équipe. Les dirigeants vont devoir le convaincre que le Heat est capable de conquérir le titre la saison prochaine. Et la suivante. Et ainsi de suite. Le « King » est encore dans la meilleure période de sa carrière – contrairement à Dwyane Wade, déjà sur la pente ascendante – et il veut uniquement gagner. Pour renforcer l’effectif tout en assurant un salaire « décent » à James, les dirigeants du Heat vont devoir convaincre les deux autres stars d’accepter une baisse de salaire. Pour Wade, celle-ci est inévitable. [superquote pos="d"]Futur sixième homme comme Manu Ginobili ?[/superquote]Combien vaut un Dwyane Wade sur la pente descendante ? 40, 44 ou 48millions sur quatre ans ? 56 millions sur cinq ans ? Il ne faudra pas s’attendre à une extension similaire à celle signée par Kobe Bryant avec les Los Angeles Lakers (48,5 millions sur deux ans) il y a quelques mois, et ce malgré la fidélité du joueur à la franchise floridienne. Il n’y a pas moyen que cela arrive. No way. Vous imaginez une seconde Wade avec un salaire supérieur à 20 millions de dollars ? Ce serait le meilleur moyen pour le Heat de forcer LeBron James à réfléchir à un départ… Michael Jordan était un acharné de travail. Kobe Bryant aussi. LeBron James aussi. Nul doute que Dwyane Wade a cravaché pour atteindre un tel niveau. Mais son éthique professionnel n’est pas aussi rigoureuse que les plus grands de l’histoire. Il n’a jamais su évoluer son jeu quand son corps ne lui permettait plus de faire la différence sur son premier pas. Grâce à son jeu de feintes, il parvient toujours à marquer des points en un-contre-un. C’est encore l’un des meilleurs joueurs de la ligue si l’on se met dans l’optique qu’une franchise ne joue qu’un seul match par semaine… Mais son manque d’adresse à trois-points pénalise le Heat et pose des problèmes de spacing à Erik Spoelstra. Même son jeu dos au panier ne semble plus aussi efficace. Si son jeu n’évolue pas, alors c’est son rôle qui doit être repensé. Dwyane Wade doit-il encore débuter les rencontres au sein du Heat collection 2014-2015 ? Spoelstra a déjà pris l’habitude de l’aligner avec les remplaçants dans le deuxième QT. Il est alors le leader de la second unit et profite d’une adversité plus faible pour prendre le dessus. Un rôle à la Manu Ginobili lui tend les bras. « El Manu » a su parfaitement se ressaisir après ses performances catastrophiques lors des finales 2013. On a vu le résultat au cours des dernières semaines… L’Argentin a trouvé le chemin de la rédemption alors que l’on pensait fini. Ce n’est donc pas seulement une « paycut » qui attend Dwyane Wade mais aussi un nouveau rôle qui convient mieux à ses capacités actuelles. Pas forcément celui d’un sixième homme mais certainement plus non plus celui d’une deuxième option offensive. Parviendra-t-il à prendre conscience des limites de son corps et de son jeu alors qu’il fut un temps au sommet de la ligue ? La carrière d’une superstar est semée d’embûches. Mais pour continuer à gagner des titres NBA, Wade a tout intérêt à rester au contact de LeBron James… et ainsi écrire de nouvelles pages à sa légende.   *En application de la « Rose provision », tous les joueurs nommés MVP ou deux fois All-Star ou  élu dans l’une des trois All-NBA Team avant l’expiration de leur contrat rookie sont susceptibles de toucher 30% du Salary Cap au lieu des 25% prévu dans le cas d’un contrat maximum « classique ». 
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