Manu, t’en va pas…

Manu Ginobili a peut-être joué son dernier match à San Antonio dimanche. L'Argentin a encore le feu sacré et on serait dévastés de le voir mettre un terme à sa carrière.

Manu, t’en va pas…
Dimanche, devant le game 4 entre les Spurs et les Warriors, on n'avait qu'une envie : faire un gros câlin à Manu Ginobili. Peut-être était-ce le contexte. Une équipe des Spurs décimée, en deuil comme son architecte, et qui voyait possiblement un autre de ses joueurs emblématiques vivre le dernier match de sa carrière devant son public. "El Manu" nous a fait le coup l'an dernier. Le dernier match de la série contre ces mêmes Warriors en finale de Conférence avait un parfum inquiétant de départ en retraite. L'Argentin avait été acclamé et célébré après avoir signé 15 points et 7 passes malgré la défaite, avant de confier quelques semaines plus tard qu'il rempilait. Si ce dimanche devait être sa dernière à l'AT&T Center, Ginobili a encore mieux soigné sa sortie. Vaillants et aidés par des Californiens un peu à la masse, les Spurs ont été portés par l'énergie de leur divin chauve. On retiendra à juste titre que LaMarcus Aldridge est le patron de cette équipe et qu'il l'a encore prouvé dimanche. Mais l'âme des Spurs est bel et bien contenue dans la caboche dégarnie et le cœur de Manu Ginobili. Même s'il ne s'agissait que d'un match pour repousser une issue inévitable, "El Manu" a offert tout ce qui lui reste d'énergie et de feu intérieur, à bientôt 41 ans et après 16 saisons en NBA. Deuxième meilleur marqueur de son équipe, l'arrière vétéran a surtout été décisif dans le 4e quart-temps en y inscrivant 10 de ses 16 points, dont deux paniers à trois points précieux qui ont permis à San Antonio de contenir le retour de Golden State. Dans la foule, une trentaine d'Argentins ont accompagné le moindre de ses mouvements par des acclamations et des "Manu ! Manu !".

"J'ai souri en le voyant marquer ce shoot dans le corner juste devant notre banc à la fin du match. C'est tellement du Manu... Quarante ans, 16 points et un panier à 3 points qui plie le match. Voilà qui est Manu", a salué Steve Kerr, son ancien coéquipier, en conférence de presse.

Voir Manu Ginobili planter des paniers avec classe pendant qu'Ettore Messina s'agitait au bord du terrain avait une saveur particulière. Les deux hommes ont vécu de beaux moments ensemble à Bologne lorsque l'Argentin avait près de 20 ans de moins.

"Je suis tellement heureux pour lui. Tellement... Je considère qu'il mérite tout ce qui lui arrive et lui est arrivé dans sa vie et dans sa carrière", s'est réjoui l'intérimaire au palmarès long comme le bras.

Mais pourquoi arrêter un jour ?

Devant nos écrans on avait évidemment nous aussi le sourire. Voir un quadra réussir à tirer son épingle du jeu contre l'une des meilleures équipes jamais assemblées, ça force l'admiration. Surtout que contrairement à d'autres basketteurs qui ont prolongé le plaisir au-delà de l'âge traditionnel de péremption, Manu Ginobili ne donne pas l'impression d'être complètement cramé ou d'être sur le terrain parce que l'institution a voulu lui faire plaisir. En 25 minutes, il a prouvé qu'il était toujours un élément moteur de ce groupe, techniquement et physiquement. Ginobili a provoqué, déclenché, cavalé, défendu... Pas besoin pour Messina de "planquer" son numéro 20 ou de l'installer dans un fauteuil souvent apprécié par les grabataires de la ligue. Il y a toujours chez Manu une explosivité, une débauche d'énergie et un flair qui poussent à se demander pour quelle fichue raison il arrêterait de jouer au basket un jour. [caption id="attachment_418188" align="alignleft" width="300"] Et si c'était la dernière fois que Manu Ginobili avait fait le trajet terrain-vestiaire à San Antonio ?[/caption] L'intéressé en donnera sans doute une suffisamment bonne pour qu'on l'accepte le moment venu. Peut-être dans deux jours, dans la Bay Area. Peut-être dans un an, après avoir aidé Gregg Popovich à noyer son chagrin dans le basket. Dans tous les cas, on est prêts à honorer ce qu'il apporte au jeu et à la NBA tous les ans à cette période s'il le faut. Il n'existe aucun autre joueur comme Manu Ginobili et tant qu'il est là, on savourera chacune de ses feintes, chacun de ses shoots, chacun de ses flops. Chacun de ses passages au micro aussi, où il est à la fois capable de faire preuve d'une dignité émouvante comme au lendemain du décès d'Erin Popovich, et d'une lucidité tactique impressionnante. Au micro de NBA TV au sortir de ce game 4, il a ainsi expliqué :

"Si je suis content d'avoir porté l'équipe sur mes épaules ? On n'est pas une équipe où quelqu'un porte les autres sur ses épaules. On a besoin de passes, d'esprit collectif, de se battre les uns pour les autres. Si on se met à vouloir jouer le un contre un, on sait très bien que c'est perdu".

Allez, reste encore un peu Manu...