Le Thunder peut-il encore atteindre les finales NBA ?

Comme en 2012, le Thunder se retrouve dos au mur et mené 0-2 par les San Antonio Spurs en finale de Conférence. Mais les jeunes stars d'Oklahoma City parviendront-elles encore à renverser la vapeur ?

Le Thunder peut-il encore atteindre les finales NBA ?
Deux ans après leur dernier affrontement en finale de Conférence, le Thunder d’Oklahoma City et les San Antonio Spurs se retrouvent dans une situation – à priori – similaire. Comme en 2012, les Texans ont bénéficié de l’avantage du terrain. Comme en 2012, ils ont remporté les deux premiers matches avant deux déplacements à Oklahoma City. Nous y revoilà. Il est facile de faire le rapprochement entre ces deux séries. Elles sont pourtant complètement différentes. Zach Lowe, rédacteur pour Grantland, a soulevé un point évident qui met en lumière les différences fondamentales – au-delà des forces en présence et des absents – entre la finale de Conférence remportée par OKC en 2012 et la série actuelle, dominée outrageusement par les Spurs. Il y a deux ans, le Thunder a perdu le premier match de trois petits points (101-98) avant de s’incliner de peu quelques jours plus tard (120-111, les Spurs ont accéléré en fin de match). Les hommes de Scott Brooks s’étaient inclinés à deux reprises mais ils n’avaient pas à rougir. Au contraire, ces deux défaites serrées ont entraîné un vent de révolte et une soudaine prise de conscience des jeunes joueurs d’OKC. Comme s’ils s’étaient rendu compte que, oui, ils ont les armes pour battre les Spurs et ce malgré tout ce que représente San Antonio aux yeux de la ligue.

Un casting différent

Cette nuit, le Thunder a encaissé la plus lourde défaite de son histoire. 112-77. Une déculotté dans les règles de l’art. Une défaite sévère qui fait mal quelques jours après la leçon infligée par les Spurs (122-105). +52 pour San Antonio en cumulé. James Harden exerce désormais ses talents à Houston. Serge Ibaka est indisponible pour la suite des playoffs et les San Antonio Spurs sont plus forts que jamais. Kawhi Leonard a pris de l’âge et il a engrangé de l’expérience et de la confiance. Idem pour Tiago Splitter, Danny Green et Patty Mills. Marco Belinelli a débarqué et le collectif texan est au sommet de son art. Et pourtant cette série remportée par le Thunder en 2012 revient une nouvelle fois sur la table. Même les Spurs ne cessent de mentionner cette défaite traumatisante en finale de Conférence.
« On ne peut rien prendre pour acquis. En 2012, nous avions très bien débuté et nous avons perdu la série. Nous jouons contre une équipe tellement talentueuse et qui marquer de plusieurs façons différentes… ce n’est pas fini tant que nous n’avons pas remporté un quatrième match. On sait ça, la plupart de nos joueurs étaient déjà là en 2012 », explique Manu Ginobili.

Un trou dans la peinture

[caption id="attachment_149249" align="alignleft" width="300"] Serge Ibaka n'est plus là pour combler les lacunes défensives du Thunder.[/caption] Le Thunder n’est jamais aussi fort que lorsqu’il s’applique en défense. La franchise a beau compter Kevin Durant et Russell Westbrook, deux scoreurs voraces, dans ses rangs, le coach est d’abord porté sur la défense. On peut critiquer Scott Brooks pour ses mauvais ajustements ou pour le manque de solutions en attaque mais toujours est-il que le tacticien a mis en place des systèmes défensifs intéressants à Oklahoma City. C’est d’ailleurs dans cette optique que les dirigeants ont récupéré Kendrick Perkins. Les joueurs du Thunder sont grands, athlétiques et rapides. Grâce à la mobilité de Serge Ibaka, au dynamisme de Russell Westbrook, à l’acharnement de Nick Collison et Thabo Sefolosha, aux longs bras de Kevin Durant ou encore à la puissance de Steven Adams et Kendrick Perkins, Scott Brooks dispose d’un groupe capable d’étouffer l’adversaire dans un style peu conventionnel. Le Thunder ne défend pas comme les Chicago Bulls, les Memphis Grizzlies ou les Indiana Pacers. Mais lorsque les joueurs sont concentrés en défense, lorsqu’ils jouent dur, ils figurent parmi les sept ou huit meilleures défenses de la ligue. Sans Serge « Ibloka », c’est une autre histoire. L’intérieur congolais représente à merveille ce cocktail de vitesse et de puissance. Surtout, sa présence à un impact psychologique sur les adversaires mais aussi sur ses coéquipiers.
[superquote pos="d"]« Vous devenez un peu paresseux en jouant avec Serge » Reggie Jackson[/superquote]« C’est très dur de jouer sans Serge. Vous devenez un peu paresseux en jouant avec un mec comme lui qui conteste tellement de tirs. Votre corps vous indique de guider votre adversaire vers Serge. Il faut que l’on enlève ça de nos têtes, » expliquait Reggie Jackson à l’issue du premier match perdu par le Thunder.   « Evidemment, il y a une énorme différence lorsque Serge Ibaka n’est pas là. C’est l’un des meilleurs défenseurs de la NBA », ajoutait Tony Parker.
Serge Ibaka doit encore parfaire son positionnement sur les pick&roll mais ses grands bras et sa vivacité lui permettent de contester ou de bloquer des tirs en deuxième rideau – même lorsqu’il est en retard. De quoi dissuader les meneurs adverses friands de paniers tout cuit près du cercle après un écran. En l’absence d’Ibaka, les Spurs n’ont pas hésité à appuyer là où ça fait mal et donc à tuer le Thunder dans la peinture dès le premier match de la série. [caption id="attachment_157231" align="alignnone" width="640"] Toujours en mouvement, Tony Parker fait souffrir les défenseurs d'OKC. Ici, il dispose d'un boulevard pour conclure dans la peinture.[/caption] Avec ou sans le ballon, les joueurs des San Antonio Spurs sont en perpétuel mouvement. Lorsque Tony Parker manœuvre sans le ballon, il bénéficie non pas d’un mais de deux ou trois écrans. Il part à droite revient à gauche, repart à droite, file au centre… les Texans épuisent leurs adversaires avant de trouver la faille, la bonne passe pour le coéquipier en meilleur position pour marquer. Il est presque impossible de freiner les Spurs sans d’excellent fondamentaux et une rigueur défensive exemplaire. Le Thunder n’est pas encore à ce niveau, et ce malgré les progrès effectués. Et Ibaka n’est plus là pour boucher les trous ou combler les lacunes défensives avec ses blocks spectaculaires. Sans surprise, les Spurs ont cherché le duel avantageux à chaque possession. Tim Duncan (27 pts) et Boris Diaw (9 pts) s’en sont donnés à cœur joie dans le premier match, profitant de leur puissance pour s’imposer au poste bas. Dès l’ouverture de la série, les hommes de Gregg Popovich ont inscrit 66 points dans la peinture avec 31 paniers dans la zone la plus proche du cercle. Un festival.
« Ils (les Spurs) ont pu faire tout ce qu’ils voulaient. On a pris 66 points dans la raquette dont 40 en première période. Habituellement, on est fier de notre défense, mais hier soir nous n’avons pas été bons dans ce domaine », constatait alors Scott Brooks.

Les Spurs au sommet de leur art

Il faut dire que le Thunder a affaire à une sacrée équipe. Le collectif de San Antonio s’est développé saison après saison et les coéquipiers de Tony Parker n’ont jamais paru aussi forts – ils étaient déjà brillants en 2012. Tous les joueurs sont sur la même longueur d’onde. Chaque joueur connait son rôle et chacun récite sa partition à la perfection. Les amateurs de basket en mouvement se régalent. Après avoir pris le contrôle de la raquette dans le premier match, les éperons ont achevé le Thunder derrière la ligne à trois-points lors de la deuxième rencontre – tout en inscrivant encore plus de 50 points dans la peinture. [caption id="attachment_157267" align="alignnone" width="640"] Aux Spurs, tout est fait pour permettre au shooteur d'être dans la meilleure position possible. Alors que la balle a été ressortie pour Danny Green, Tiago Splitter pose un écran rus Russell Westbrook pour empêcher le joueur du Thunder de venir contester le tir.[/caption] [caption id="attachment_157269" align="alignnone" width="640"] Une spéciale "Tony Parker". Le meneur joue le pick&roll avec Tim Duncan pour attaquer le cercle. Kevin Durant hésite entre aider et abandonner Danny Green. Une erreur qui se paye cash. "TP" sert son shooteur, seul dans le corner.[/caption] Après avoir encaissé 66 points dans la raquette au premier match, les joueurs du Thunder auraient pu être tentés de s’ajuster et de blinder la peinture. Mais dans ces cas-là, il s’expose directement au « drive&kick » des Spurs, comme le montre l’illustration ci-dessus. Les Texans sont tout simplement injouables lorsqu’ils parviennent à trouver des espaces et Tony Parker – comme Manu Ginobili – sont exceptionnels pour trouver les bonnes lignes de passes et le shooteur idéalement placé. De plus, les Spurs peuvent compter sur leur as de la gâchette pour mettre dedans. Lors du deuxième match, Danny Green a inscrit 21 points à 7/10 à trois-points. Injouable. [youtube hd="0"]https://www.youtube.com/watch?v=Tn14cU7_TVI[/youtube] REGARDEZ CETTE PASSE DE MANU GINOBILI !!! (0'26").
« Nous sommes déçus. Cela ne sent vraiment pas bon. On s’est fait botter le cul, » reconnait Scott Brooks.

Le Thunder trop dépendant du duo Westbrook – Durant

[superquote pos="d"]« Cela ne sent vraiment pas bon. On se fait botter le cul » Scott Brooks.[/superquote]On peut critiquer Russell Westbrook et Kevin Durant pour certains de leurs mauvais choix mais soyons honnêtes : le Thunder n’a que deux vrais options. Reggie Jackson tend à s’affirmer comme un Bobby Jackson 2.0, un joker offensif capable de dynamiter la défense adverse. Même si lui arrive de faire quelques cartons, le jeune joueur est encore bien trop tendre pour s’imposer comme une troisième option (NB : il a encore le temps et il continue d’engranger de l’expérience). Il faudrait un Reggie Jackson autour des 20 pts de moyenne pour qu’Oklahoma City sorte vainqueur de cette série. Il nous offrirait sans doute un carton lors des prochains matches mais de là à tenir sur quatre rencontres… c’est une autre histoire. Sans James Harden, Sans Serge Ibaka, le Thunder se retrouve plus dépendant que jamais de ses deux superstars. Lors du dernier match, « KD » et « RW » ont inscrit 30 points en cumulé… à 13/40 aux tirs. Impossible de gagner dans ces conditions. Nick Collison est valeureux mais il n’est pas aussi efficace qu’Ibaka à mi-distance et, surtout, il n’est pas considéré de la sorte par la défense des Spurs. Alors que le Congolais est souvent gardé de près, Collison est laissé libre et les défenseurs se resserrent sur Durant ou Westbrook. Logique. [caption id="attachment_92577" align="alignleft" width="300"] 30 pts à 13/40 en cumulé pour Durant et Westbrook dans le Game 2.[/caption] Il est facile de s’en prendre aux deux superstars. Elles sont censées faire gagner le Thunder. Il est facile de prétendre que les autres joueurs ne sont pas assez impliqués. Mais qui, hormis Durant et Westbrook (et à un degré moindre Reggie Jackson donc), est capable de créer du jeu ? Derek Fisher, Caron Butler et Jeremy Lamb ne sont que des spot-up shooteurs. Des plots plantés dans le parquet. OKC manque sérieusement d’options mais aussi de systèmes pour exploiter au mieux les forces de son effectif en attaque. On l’a bien vu. Lorsque Kevin Durant et Russell Westbrook se reposent, le jeu offensif du Thunder a des airs de trou noir. Scott Brooks et ses assistants ne vont pas trouver un nouveau système miracle en quelques jours. L’écart est trop grand entre les Spurs actuels et ce Thunder privé d’Ibaka. Il y a tout de même des ajustements à faire et les troupes d’Oklahoma City ne sont pas encore mortes pour autant.
« Nous sommes déjà passés par-là. C’est (juste) une défaite, » assure le coach du Thunder   « Même s’ils (les Spurs) n’avaient gagné que d’un point, nous serions toujours menés 0-2. Nous avons déjà connu ça, » poursuit Kevin Durant.
Le Thunder tient donc à rester optimiste. Mais pour franchir l’obstacle dressé par les Spurs, Kevin Durant et Russell Westbrook devront pratiquer le meilleur basket de leur vie. Reggie Jackson, Derek Fisher, Steven Adams, Caron Butler et compagnie peuvent effectivement faire la différence sur une ou deux rencontres. Mais pour battre San Antonio, « KD » et « RW » devront évoluer sur une autre planète. Pendant trop longtemps, le Thunder s’est reposé sur le talent et la capacité de réaction de ses deux superstars. On en voit là les limites au plus haut niveau, face à une équipe taillée et déterminé à conquérir un nouveau titre. Les années se suivent mais ne se ressemblent pas toujours autant que ce que l’on pourrait penser finalement. [poll id="83"]