Les Cavaliers ne peuvent pas gagner avec Kevin Love

Le constat est cruel mais il est de plus en plus fort : aussi talentueux soit-il, Kevin Love handicape plus les Cleveland Cavaliers qu'il ne les avantage dans cette série.

Antoine PimmelPar Antoine Pimmel | Publié  | BasketSession.com / MAGAZINES / Analyse
Les Cavaliers ne peuvent pas gagner avec Kevin Love
«La situation de Kevin Love me fait penser à Marty McFly lorsqu'il disparaît progressivement de la photo dans Retour Vers le Futur.» La punchline est signée de Chris Ryan, rédacteur et éditeur pour The Ringer. Et il est difficile de trouver une métaphore plus parlante que cette référence au film culte des années 80. Le rôle de Love aux Cleveland Cavaliers est flou depuis le jour où LeBron James a décidé qu'il ne voulait pas jouer avec Andrew Wiggins, envoyé à Minnesota pour former un nouveau trio de stars avec Kyrie Irving et l'ex-intérieur All-Star auteur de 26,1 points, 12,5 rebonds et 4,4 passes lors de sa dernière saison avec les Wolves. Une époque et des statistiques qui semblent désormais très lointaines.

Les Cavaliers, meilleurs sans Kevin Love ?

Une promesse dans la défaite. C'est ainsi qu'une partie des supporteurs de Cleveland et de journalistes NBA ont interprété les deux manches gagnées par un LeBron James titanesque lors des finales 2015. La promesse de retrouvailles avec les Golden State Warriors et le pari de faire mordre la poussière aux Californiens une fois au complet. Autrement dit, Irving, out après le Game 1 l'an passé, et Love incarnaient les rêves d'un titre qui échappe à la cité de l'Ohio depuis plus d'un demi-siècle. [superquote pos="d"]Les Warriors craignent les joueurs longs, rapides et athlétiques... tout sauf du Kevin Love [/superquote]Il faut être sacrément optimiste - ou désespéré - pour miser toutes ces chances de bague sur les épaules de deux joueurs talentueux mais incomplet qui n'ont jamais mené leurs équipes respectives en playoffs avant le retour du King au pays. Au complet, les Cavs ont pris deux roustes sévères d'entrée. Et une question revenait alors à la surface : comment cette équipe de Cleveland dépeuplée et menée par un James esseulé avait-elle pris deux rencontres aux Warriors ? Le Oklahoma City Thunder a donné plusieurs éléments de réponse en finale de Conférence : qualités athlétiques, taille, défense, vitesse. Les champions en titre, et plus particulièrement Stephen Curry, souffrent lorsqu'ils affrontent des adversaires longs, physiques, rapides et capables de changer sur les écrans. Ils ont perdu leur premier match de la saison contre les Milwaukee Bucks de Giannis Antetokounmpo, Khris Middleton, Michael Carter-Williams, Jabari Parker et compagnie. Ils ont été poussés dans leurs derniers retranchements par le Thunder de Kevin Durant, Russell Westbrook, Serge Ibaka, Steven Adams et Andre Roberson, soit une version de luxe des Bucks. Et ils ont complètement pris l'eau contre des Cavaliers guidés par James, un Irving retrouvé, des Tristan Thompson et J.R. Smith appliqués et un Richard Jefferson surprenant. [caption id="attachment_279141" align="alignleft" width="318"] Timofey Mozgov était l'un des principaux alliés de LeBron James lors des finales 2015.[/caption] L'équipe de Cleveland collection juin 2015 n'était pas de première qualité mais elle était robuste. Matthew Dellavedova et Timofey Mozgov sont les deux autres joueurs à s'être illustrés en plus de James et Thompson en finales NBA. Ce sont des bien meilleurs défenseurs que Kevin Love. Sans sa star, son shoot extérieur, ses moves dos au panier et son sens de la passe, les Cavaliers ont battu les Warriors de 30 points. Ils ont perdu de 46 points les deux premières rencontres disputées avec le natif de Santa Monica. La simple montée en grade dans le cinq d'un Richard Jefferson de 79 balais et le passage de LeBron au poste d'ailier-fort a métamorphosé une équipe sous assistance respiratoire après les deux premiers K.O. Love n'est pas assez grand - ou disons plutôt qu'il n'a pas assez d'envergure - pour protéger le cercle. Il n'est pas assez vif pour chasser un ailier fuyant loin du panier. Pas assez athlétique et puissant pour résister aux quinzaines d'écrans posés par les joueurs de Steve Kerr sur chaque possession. Le schéma offensif de Golden State est simple lorsqu'il est sur le parquet : l'isoler, le forcer à défendre et laisser son vis-à-vis l'agresser en permanence et ce qu'il s'agisse d'Harrison Barnes, Andrew Bogut, Draymond Green ou Andre Iguodala. Les joueurs des Warriors sont parmi les plus intelligents de la ligue. Ils sentent instinctivement les duels avantageux. Et ils se régalent avec Love sur le parquet. Richard Jefferson a beau avoir 86 ans, il se donne et défend dur. Il n'a pas une cible placardée sur son crâne. C'est fou de se dire qu'un vétéran de 95 piges est pu s'avérer plus efficace qu'un ancien All-Star. L'intérieur a connu quelques bons passages pendant ces playoffs : 25 points dans un Game 5 décisif contre Toronto, 28 lors de l'ouverture de la série contre Detroit ou encore 8 double-doubles consécutifs pour lancer la première 'vraie' campagne de post-saison de sa carrière. Il ne manque pas de talent. Son profil ne colle simplement pas aux besoins des Cavaliers contre les Warriors et même ceux de la franchise en général. D'où le fait qu'il disparaisse progressivement du paysage de 'The Land'.

Un avenir, oui, mais où ?

[caption id="attachment_327558" align="alignleft" width="318"] Kevin Love et Kyrie Irving, pas assez complémentaires pour gagner ensemble.[/caption] C'est à se demander si Tyronn Lue va laisser son centenaire Jefferson dans le cinq ou relancer Love une fois qu'il sera déclaré apte au combat - et bon dieu qu'il est soft (pas dans sens péjoratif, enfin si, mais dans le fait qu'il se blesse dès le moindre contact. Ce n'est même pas vraiment de sa faute finalement). Les Cavaliers veulent-ils seulement le faire revenir ? Voulaient-ils même qu'ils jouent hier soir ? Plusieurs médias soulignaient l'apport de... l'absence de Love quelques minutes seulement après l'officialisation de son forfait pour le Game 3.
«On sait que Kevin veut jouer et qu'il est frustré de ne pas pouvoir le faire. Mais c'est le protocole et il faut protéger les joueurs. C'est au tour d'un autre joueur d'élever son niveau de jeu», remarquait Tyronn Lue.
C'est l'ancien camarade de classe de Jeanne Calment Richard Jefferson qui a pris le relais. Les Cavaliers auraient-ils fait le forcing auprès de la ligue si LeBron James avait été victime d'une commotion cérébrale à 0-2 ? N'auraient-ils pas insisté pour le laisser jouer ? [superquote pos="d"]Kevin Love sera-t-il replacé dans le cinq majeur ? [/superquote]Lue ne peut pas soudainement décider de se passer de sa troisième option offensive. Love sera évidemment réintégré dans la rotation. Mais avec quel rôle ? CBS Sports propose de le laisser dans un rôle de sixième homme aligné sur certaines séquences contre les remplaçants des Warriors. C'est un statut réducteur pour un joueur de son standing mais c'est une idée intéressante - et sans doute la meilleure option pour Cleveland. Le joueur de 27 ans demeure une valeur sûre dos au panier et il est susceptible de punir les défenseurs moins démunis du banc de Golden State. Festus Ezeli est moins mobile que lui. Marreese Speights n'a aucune chance s'il a face à lui un adversaire technique et inspiré. A voir si Lue a les guts. Quitte à spéculer, autant ouvrir une grande parenthèse : qu'adviendra-t-il de l'avenir de Kevin Love dans l'Ohio si les Cavaliers prennent à nouveau une fessée à son retour dans le cinq ? Ou s'il est cantonné à un rôle mineur ? La franchise, dont la masse salariale volumineuse, même après explosion du Cap, limite le recrutement de joueurs de qualité, peut-elle se permettre de lâcher une vingtaine de millions annuels à une star qu'elle ne peut pas aligner durablement contre son principal rival ? Ce 'Big Three' des Cavaliers ne peut pas gagner ensemble. Il n'est pas assez complémentaire - Irving et Love ne savent pas jouer ensemble - et il n'est pas assez complet. Chris Bosh était critiqué mais sa défense était terriblement précieuse au Miami Heat. Il fermait sur les pick&roll et était suffisamment mobile/rapide pour recouvrir à temps sur les intérieurs. Ce 'Big Three' ne peut pas gagner avec deux défenseurs aussi inconstants parmi les trois meilleurs joueurs de l'équipe. [superquote pos="d"]Love contre Melo et tout le monde est content ? [/superquote]Il est temps de songer à nouveau à cette rumeur qui envoyait Carmelo Anthony aux Cavaliers en l'échange de Love. 'Melo' est proche de LeBron. Il est un défenseur capable quand il est appliqué et son étiquette de passoire lui colle à la peau malgré des progrès évidents depuis plusieurs saisons. Le contexte doit aussi être pris en compte. Comme J.R. Smith, on serait d'avis de prendre le pari qu'Anthony serait plus concentré et déterminé s'il évoluait au côté de James pour un vrai candidat au titre. De plus, LeBron arrive à un âge où il est vraiment préférable de l'aligner au poste d'ailier-fort où il peut faire parler sa puissance et son explosivité encore hors normes mais en léger déclin par rapport aux saisons précédentes. Ses pannes d'adresse fréquentes en dehors de la raquette - hier soir étant une exception - le condamne presque à évoluer dans la peinture pour le reste de sa carrière. Love, lui, aurait tout à gagner à jouer avec un intérieur long capable de protéger le cercle à sa place mais suffisamment bon pour lui créer des espaces en attaque. Jonathan Tjarks propose Karl-Anthony Towns et Kristaps Porzingis comme partenaires idéaux. Ironie du sort, le premier évolue dans l'ancienne équipe de Love et le second est la star montante des Knicks. Ce ne sont pas des conclusions tirées sur un match gagné par les Cavaliers sans leur star. Elles sont simplement les fruits de plusieurs réflexions entamées sur le sujet depuis presque deux ans maintenant.
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