Ces NBAers qui ont débuté par le streetball

Pour eux, tout a commencé dans la rue. Avant de fouler les parquets de la Grande Ligue, ils répétaient inlassablement ces gestes qui font l'essence du streetball. Et posaient les fondations d'un jeu qui les emmènera jusqu'au sommet du basket américain. Retour sur l'histoire de ces joueurs dont les exploits sur les playgrounds ont été suivis par une carrière en NBA.

Ces NBAers qui ont débuté par le streetball
New York, fin des années 80. Dans le district du Queens, encore enfant, Rafer Alston s'entraîne. Sur un playground, il répète inlassablement les moves qui feront de lui « Skip 2 My Lou ». Autrement dit, l'un des streetballers les plus réputés de la Grosse Pomme. L'une des premières vedettes des mixtapes « AND1 », qui fera même la couverture du magazine SLAM pour ses exploits sur les bitumes. À deux reprises. C'est dans un parc new-yorkais que Ron Nalcerio, son futur coach au lycée de Benjamin N. Cardozo High School, repère le jeune prodige. Rafer Alston a alors 11 ans, et épate la galerie. Déjà.
« La foule réalisait et je réalisais également que ce que nous voyions n'était tout simplement pas normal pour un enfant qui, à ce moment-là, n'avait que 11 ans », raconte aujourd'hui son ancien coach.
Environ deux décennies plus tard, celui qui est entre temps devenu une légende de la scène du streetball new-yorkais affronte le duo Kobe Bryant-Pau Gasol en finales NBA. Lors du Game 3, le seul remporté par son écurie, le Orlando Magic, il fait partie des trois seuls Floridiens qui inscrivent au moins 20 points (20 points, à 8/12 au shoot, 2 rebonds et 4 passes). Fidèle à lui-même, il multiplie les dribbles afin de déstabiliser ses adversaires directs. Du pur Rafer Alston, comme la Ligue en connaît depuis 1998, date de sa draft en 39ème position par les Milwaukee Bucks. Comme Rafer Alston, d'autres NBAers ont appris grâce à l'école de la rue avant de mener une carrière en NBA. Certains d'entre eux sont devenus des légendes de la Grande Ligue. D'autres ont signé un passage plus rapidement oublié. Et la plupart se sont découvert une passion pour la balle orange au même endroit : sur le macadam de l'une des plus grandes villes des États-Unis.

Welcome to New York

Si le streetball était une religion, il ne fait aucun doute que ses croyants adopteraient Rucker Park en guise de lieu de pèlerinage. C'est sur ce playground de Big Apple situé à Harlem que les adeptes du basket de rue répètent leurs skills, enchaînent les dunks et les parties improvisées. C'est ici que Rafer Alston a tapé dans l’œil de son coach au lycée alors qu'il n'était pas encore adolescent. Ici, bien plus qu'ailleurs, Rafer Alston s'appelle depuis « Skip 2 My Lou ». Rucker Park peut se vanter d'avoir vu débuter de nombreuses stars du streetball. Mais également des futurs NBAers. Rafer Alston a ainsi croisé la route d'un natif de Brooklyn également drafté par les Milwaukee Bucks (cette fois en 4ème position) et qui a évolué entre 1996 et 2009 en NBA : Stephon Marbury. Une future star de la Grande Ligue dont le nom sera ensuite évoqué dans le film « He Got Game » de Spike Lee comme l'un des plus grands joueurs à avoir débuté dans les rues de New York. Les deux ado n'ont qu'une quinzaine d'années au compteur, mais s'entraînent sans cesse et acquièrent un jeu qui sera leur marque de fabrique lors de leur carrière dans la ligue la plus relevée au monde. En prenant plaisir à fouler le célèbre playground, ils devenaient les contemporains d'une tendance bien ancienne. En effet, le meneur Nate Archibald, qui a notamment remporté le titre avec les Celtics de Larry Bird en 1981 ou encore été désigné MVP du All-Star Game 1981, foulait le bitume de Rucker Park bien avant le parquet du Boston Garden. Il y retournait même lors de carrière NBA durant l'intersaison. En outre, deux futurs Hall-of-Famers ont répété leurs gammes à Rucker Park : Kareem Abdul-Jabbar et Julius Erving. Avant de s'envoler vers UCLA puis de remporter six titres de champion et de MVP et de disputer dix-neuf All-Star Game, le pivot drafté par les Bucks (qui ont décidément des antécédents en terme d'anciens streetballers) en 1969 commençait à se forger une réputation à ce que certains appellent « La Mecque du streetball ». De son côté, le fabuleux arrière des Sixers a gagné son surnom à Rucker Park. Ou plutôt se l'est offert. Il raconte :
« J'avais un ami au lycée qui vit à Atlanta que j'ai commencé à appeler 'The Professor', du coup il m'appelait 'The Doctor'. Plus tard, à Rucker Park à Harlem, quand les gens ont commencé à m'appeler 'Black Moses' ou 'Houdini', je leur ai dit que s'ils voulaient me trouver une surnom, qu'ils m'appellent 'Doctor'. Puis avec le temps le surnom est devenu 'Dr. Julius' puis 'Dr. J.' »
De la rue, Julius Erving a hérité un style de jeu spectaculaire fait notamment de puissants dunks. En cela, il a véritablement participé à l'introduction de certaines facettes du basket moderne. Et ce grâce à son apprentissage new-yorkais. Sa carrière culmine au début des années 80, avec un titre de MVP en 1981 puis un titre de champion en 1983 à Philadelphie. Ironie du sort : si Philly est après New York la ville dont les playground ont produit le plus de futurs NBAers, c'est bien un natif de la Grosse Pomme qui lui a apporté le troisième et dernier titre de son histoire.

Philadelphie, la petite pomme

La Pennsylvanie elle aussi a ses playground. Dont certains, comme Rucker Park, ont vu débuter de futurs stars NBA. Pour les compter, il faut tourner le regard vers Philadelphie. Là où dans les quartiers les plus difficiles de la ville, Lewis Lloyd, aka «Black Magic », a rentré ses premiers paniers. Passé par les Warriors, les Rockets ou encore les Sixers, l'ailier/arrière a émerveillé la Ligue dès 1981, en la gratifiant de passes derrière le dos, de layups acrobatiques et de dunks à la pelle. Il suivait ainsi le chemin du légendaire Wilt Chamberlain. En effet, Monsieur 100 points, est également né à Philly où il a enchaîné les playground de la ville tout en suivant sa scolarité au même lycée que Lewis Lloyd. Wilt Chamberlain n'est pas encore la star universitaire des Kansas Jayhawks, mais il tourne déjà à 37 points par match lors de ses trois saisons au lycée, mesure près de 2m10, et se plaît sur les playground de Philly. Plus tard, il racontera :
« J'ai toujours pensé qu'il y a beaucoup d'équipes aux coins des rues qui pourraient faire passer des moments difficiles à la plupart des joueurs universitaires. »
https://www.youtube.com/watch?v=OyOPC2mNR-s L'ancien pivot a également rejoint les Harlem Globetrotters en 1958. Une aventure qui l'emmène jusque Moscou en pleine guerre froide, en 1959, où il fait le show avec ses partenaires devant Nikita Khrouchtchev. Même lors de sa carrière en NBA, Wilt Chamberlain rejoignait ces professionnels du show. Celle que l'on surnomme « la ville de l'amour fraternel » a aussi vu débuter dans ses parcs l'une des légendes des New York Knicks. Comme Julius Erving a joué un grand rôle dans le dernier titre des Sixers, Earl Monroe, né à Philadelphie, a mené la franchise de la Grosse Pomme vers son second et ultime sacre. Ainsi, en 1973, lui et Walt Frazier composaient ce que certains appelaient « The Rolls Royce Backcourt ». Un duo qui a marché sur la Ligue et fait le bonheur des fans new-yorkais. Surnommé « Thomas Edinson » dès le lycée pour sa panoplie de moves et son inébranlable créativité, il fut ensuite appelé tout simplement « Black Jesus ». https://www.youtube.com/watch?v=OkQrtrlQYpI Son handle, ses qualités de passe et de dribble en faisaient un meneur redoutable. Sur les playgrounds de Philadelphie comme les parquets NBA. Devenu ensuite commentateur des rencontres au Madison Square Garden, il n'a pas peur de l'affirmer : jamais personne n'a fait preuve d'un tel style de jeu dans l'histoire.
« Vous savez, je regarde les matches et même maintenant je ne vois jamais un joueur qui me rappelle moi, et la manière dont je jouais. »
S'il n'est pas né dans la Grosse Pomme, « Black Jesus » pourrait bien avoir récupéré le melon... Le joueur qui a peut-être le plus importé un style streetball dans la Grande Ligue évoluait à Philly, mais il n'en était pas originaire. Son nom : Allen Iverson. En effet, l'ancien arrière est originaire de Virginie, où il a façonné cette manière de dribbler et de conclure d'une manière spectaculaire ses paniers qui le rendra célèbre dès son passage à sa fac de Georgetown ou son année rookie. Michael Jordan, victime de l'une des premières fulgurances d'A.I., sait plus quiconque (excepté Tyronn Lue) la qualité des crossover qui fut celle du NBAer de seulement 1m83. En quatorze ans de carrière, « The Answer » a prouvé qu'il méritait bien son surnom, apportant toujours une réponse efficace à n'importe quel défenseur qui tentait de le piéger avec une nouvelle question. Allen Iverson a beau ne pas être né à Philadelphie ou à New York, comme beaucoup de NBAers qui ont grandi sur les playgrounds, sa trajectoire est symptomatique de ce profil de joueurs en cela qu'il a connu, comme la plupart d'entre eux, un très bon début de carrière au lycée et à la fac. https://www.youtube.com/watch?v=PpFMPZk75Nc

High School Basketball

Chris Mullin est né et a grandi à Brooklyn. Très tôt, il admire Earl Monroe et son compère du « Rolls Royce Backcourt », Walt Frazier. Avant de passer la quasi-totalité de sa carrière chez les Golden State Warriors, ce New-yorkais blanc se rendait au Bronx et à Harlem, quartiers peuplés en majorité d'Afro-Américains, pour fouler les playgrounds. Et réaliser ainsi un apprentissage qui lui sera bien utile par la suite. Dans son lycée Xaverian de Brooklyn, il est désigné « Mr Basketball » de l’État de New York. Le célèbre coach Hall-of-Famer Lou Carnesecca lui ouvre les portes des Red Storm St. John, une université située dans le quartier du Queens. Chris Mullin s'y sent immédiatement comme un poisson dans l'eau. Au point de devenir le premier joueur de l'histoire à être désigné trois fois meilleur joueur de la Big East conference. Ses débuts en fanfare lui permettront d'être drafté en 7ème position en 1985 par les Warriors, et de participer au succès américain aux Jeux Olympiques l'année précédente. Comme Chris Mullin, les NBAers qui ont d'abord fait rebondir le ballon sur le macadam ont souvent connu des passages remarqués au lycée et à la fac. Ils étaient ainsi déjà armés pour affronter une telle adversité. Après avoir brillé sur les playgrounds new-yorkais, Rafer Alston a fait la couverture de SLAM une première fois alors qu'il était encore à la fac de Fresno. Impressionné, le célèbre magazine titrait : « Le meilleur meneur du monde ». Et nous promettait d'en prendre plein la vue lors de son année rookie. Kareem Abdul-Jabbar, appelé Lew Alcindor à l'époque, a tout gagné avec UCLA. Sur le plan personnel, il a établi un record dès son année junior avec un match à 56 points et a été désigné à deux reprises joueurs de l'année de NCAA (1967 et 1969). Sa domination a même obligé le championnat universitaire à interdire son arme favorite, le dunk. La « Alcindor Rule » y était ainsi en vigueur entre 1967 et 1976. Et sur le plan collectif, Jabbar peut se targuer d'avoir remporté trois titres NCAA (1967, 1968 et 1969). Ces joueurs ont démontré leurs qualités au scoring alors qu'ils n'étaient pas encore draftés. Allen Iverson a ainsi terminé ses saisons à Georgetown avec la distinction de meilleur scoreur de l'histoire de l'équipe, grâce à une moyenne de 23 points par match. Earl Monroe, lui, a débuté à 7 points par match à la fac de Winston-Salem avant d'enchaîner à 23 comme sophomore, 30 comme junior puis 41 comme senior. Une ascension fulgurante ponctuée par une sélection par les Baltimore Bullets en 2ème position en 1967. Là où il a été désigné rookie de l'année et a évolué durant cinq saisons avant d'atterrir chez les Knicks. Des qualités de finisseur que certains savaient conjuguer à un rôle précieux au rebond. Ici, il faut se rappeler de Julius Erving, qui a crevé l'écran avec l'université du Massachusetts. En deux saisons, « Dr J. » tournait ainsi à 26 points et 20 rebonds par match. Au petit jeu de la compilation des talents, Lewis Lloyd n'était pas mauvais non plus puisqu'il inscrivait 30 points et récupérait 15 rebonds par match lors de son année junior chez les Drake Bulldogs, où son numéro 30 a depuis été retiré. Autant de performances que certains ont su répéter en NBA. Et d'autres moins.

Sky is the Limit

Par leur handle, leurs passes, leurs crossovers ou leurs dunks, ces anciens streetballers qui ont percé en NBA ont tous laissé une trace dans la Grande Ligue. Leur style de jeu spectaculaire agissant comme une marque de fabrique qui attire l’œil du spectateur. En apportant ces petits plus venus tout droit de la rue qui faisaient et font encore lever de son siège le spectateur, ils ont révolutionné le jeu en NBA, qui s'en est considérablement imprégné. Ce qui n'était pas sans agacer certains adversaires directs. Rafer Alston raconte :
« Ils n'aiment pas quand quelqu'un passe entre leurs jambes, ou fasse des passes derrière leur dos. Mais vous savez, quand j'étais enfant je regardais « Pistol » Pete Maravich (l'ancien meneur réputé pour ses moves et son jeu spectaculaire dans les années 70). Et ils adoraient qu'il fasse ça. Donc je ne comprends pas. Ils étaient contents que « Pistol » Pete Maravich ait beaucoup de choses venues des playgrounds dans son jeu, mais quand c'est un gamin comme moi qui vient de New York, ça ne leur va plus. »
Véritables machines à Highlights, ces joueurs pouvaient se faire des ennemis qui interprétaient leurs fulgurances comme autant de provocations. En outre, si tous ont marqué les esprits, à l'heure du bilan, parmi tout cet ensemble, il faut savoir distinguer les légendes des bons joueurs. D'un côté, des joueurs comme Rafer Alston. Des carrières honorables, faites de passages dans de nombreuses franchises (Toronto, Milwaukee, Miami, Houston, Orlando et New Jersey pour le meneur) et de statistiques intéressantes (14 points et 6 passes par match lors de son passage aux Raptors, en 2004-2005). Llewis Lloyd, qui a connu comme lui le bonheur de jouer des finales NBA (en 1986 pour les Rockets face aux Celtics) était de cette trempe. Au-dessus, on trouve les All-Star et/ou champions qui ont su encore plus faire gonfler leurs statistiques. Comme Nate Archibald, champion, sept fois All-Star et seul joueur de l'histoire à avoir terminé une saison comme meilleur passeur et meilleur scoreur (en 1973). Comme Stephon Marbury, deux fois All-Star et qui tournait à 19 points et 8 passes par match. Ou encore comme Jason Williams, alias « White Chocolate » : un meneur fougueux devenu champion avec le Heat en 2006, qui adorait les crossovers et surtout les passes aveugles et derrière le dos. Des joueurs qui pouvaient parfois être pénalisés par leur style de jeu « streetball » et leurs prises de risques. Surtout pour les deux derniers cités. Ainsi si Stephon Marbury était un scoreur redoutable et fait partie des pionniers concernant le profil du meneur qui collectionne les points avant les assists, il était également accusé de parfois trop oublier ses partenaires et de ne pas suffisamment s'insérer dans les collectifs auxquels il appartenait. Jason Williams, lui, faisait aussi grimper ses chiffres de pertes de balles. Lors de ses deuxième et quatrième en NBA, il commettait 3,5 turnovers par match. Ce qui a conduit le coach des Sacramento Kings à le bencher lors des quatrièmes quart-temps des matches du premier tour des playoffs face aux Los Angeles Lakers en 2000. https://www.youtube.com/watch?v=DFcpzo__4Cg Enfin, au sommet de cette pyramide, les plus grands Hall-of-Famers qui ont collectionné les bagues, les All-Star Game et les récompenses individuelles. Wilt Chamberlain, deux fois champion, quatre fois MVP et treize fois All-Star. Et bien sûr le plus grand scoreur All-Time, Kareem Abdul-Jabbar, six fois champion, six fois MVP et dix-neuf fois All-Star. Deux joueurs qui tutoyaient la perfection, et n'ont pas connu les errements sportifs et extra-sportifs de nombreux de ces anciens streetballers.

Être un produit de son environnement

Chris Mullin était aux côtés de Larry Bird, Scottie Pippen, Michael Jordan, Charles Barkley, Magic Johnson et d'autres légendes de la balle orange lorsque Team USA a roulé sur le basket mondial en 1992 à Barcelone. Même s'il appartenait à cette fameuse « Dream Team », le Hall-of-Famer a traversé des phases de cauchemar lors de carrière. Drafté loin de Brooklyn, il peine à s'adapter à la sa vie de NBAer à l'autre bout du pays. Oakland devient un enfer. Le diable prend la forme d'une bouteille d'alcool. Lors de sa troisième année dans la Grande Ligue, il avoue à son coach, Don Nelson, ses problèmes liés à l'alcool. Après avoir raté plusieurs entraînements, il passe 48 jours en cure de désintoxication. Avant de terminer la saison à 20 points, 5 passes et 3 rebonds par match. Certains de ces joueurs qui ont débuté sur les playgrounds des quartiers difficiles de New York, de Philadelphie ou d'une autre grande ville américaine ont ainsi connu des passages à vide lors de leur carrière liés à des déboires extra-sportifs. « Black Magic » a par exemple été suspendu après avoir été contrôle positif à la cocaïne avec son coéquipier Mitchell Wiggins en 1986, lors de son premier passage chez les Rockets. Suspendu six mois, en attendant de pouvoir rejouer en NBA, il évoluait dans la Continental Basketball Association avec les Cedar Rapids Silver Bullets. Réputé pour avoir mené un style de vie débridé, il a défrayé le chronique à plusieurs reprises pendant et après sa carrière. Notamment lorsqu'il fut accusé de ne pas avoir pu payer une note de 50 000 dollars dans un hôtel de luxe à Houston. « Lewis est un produit de son environnement » titrait le Los Angeles Times en 1987 en citant son frère, dans un article qui rappelait les problèmes de drogue et l'enfance dans les quartiers difficiles de Philadelphie qu'a connue Lewis Lloyd. Des problèmes d'addiction pour certains, et des comportements parfois difficiles. La carrière de Rafer Alston en NBA (il a ensuite joué en Chine puis en D-League) s'est ainsi terminée sur une suspension infligée par le Miami Heat suite aux absences du joueur à un entraînement et à une rencontre. Le meneur a également été suspendu par la Ligue suite à ce début d'altercation qui a mis le Shaq dans tous ses états. Allen Iverson n'était pas non plus exemplaire au niveau disciplinaire, ses absences à l'entraînement et se relation avec Larry Brown en témoignent. Et « The Answer » a lui aussi quelques échauffourées à son actif. https://www.youtube.com/watch?v=ceGRVUjXqM4 Si bien évidemment, ce genre de déboires ne sont l'apanage des joueurs qui ont débuté par le streetball, ils constituent aussi une partie de leur carrière. C'est également un scandale qui a mis bien des battons dans les roues de Connie Hawkins, qui a débuté avec le streetball dans les rues de New York et à Rucker Park, où il fréquentait Kareem Abdul-Jabbar et racontait à qui voulait l'entendre qu'il avait dunké pour la première fois à l'âge de onze ans. Un scandale lié à des paris truqués dont il fut innocenté, mais qui a néanmoins conduit sa fac d'Iowa à s'en séparer. Le Commissioner de la Ligue Walter Kennedy avait indiqué suite au procès qu'il n'homologuerait aucun contrat entre Connie Hawkins et une franchise. Ce qui l'a obligé à briller dans l'American Basketball League avec Pittsburgh, et avec les Harlem Globetrotters entre la disparition et la réapparition de l'ABL. Après avoir laissé couler bien de l'eau sous les ponts, « The Hawk » rejoint en 1969 des Phoenix Suns fraîchement créés. L'intérieur devient immédiatement quatre fois consécutives All-Star dans l'équipe de l'Arizona. Autre ironie du sort, donc : Hawkins fut l'une des premières stars d'une franchise d'expansion d'une Ligue qui lui avait causé du tort à ses débuts.

Next Generation

Aujourd'hui, de nombreux joueurs ont grandi en apercevant les exploits de ces pro du move à la télévision. Ils les ont imités dès leur enfance, et veulent s'imposer comme leurs dignes héritiers. De leur propre aveu, Rafer Alston a émerveillé des joueurs comme Chris Paul et Deron Williams, qui ont modelé leur jeu sur lui. Contrairement à l'ancien meneur, ces nouveaux point guard, eux, n'avaient pas à se déplacer sur les playgrounds de New York pour assister à des dribbles et des passes d'exception. Grâce à la carrière en NBA de « Skip 2 My Lou » et d'autres, ils n'avaient qu'à s'asseoir devant leur canapé. L'époque où le petit Rafer devait faire le tour de la Grosse Pomme pour en prendre plein les yeux est révolue.
« Le handle et le passing pour lesquels je suis connu, je les ai développés en pratiquant beaucoup », explique-t-il. « Et aussi en regardant beaucoup. En errant dans la ville, en allant sur différents playgrounds, dans différents parcs et en observant toutes ces choses qui font lever les fans de leur chaise. »
Faire lever les fans de leur chaise : une ambition nouvelle que notamment la dernière génération des meneurs de la Ligue entend porter haut la main. Certains ont également fait rebondir la balle orange sur des playgrounds de New York ou de Philadelphie avant de s'acclimater à un basket plus « conventionnel » à la fac puis en NBA. D'autres marchaient surtout aux cassettes VHS puis aux DVD et surtout vidéos YouTube. Comme également Rafer Alston, qui alliait les plaisirs.
« J'étais toujours en train de regarder des vidéos, puis je retournais au gymnase et au park, pour bosser certaines choses... Et à chaque fois que quelqu'un me disait que je ne pouvais pas faire ça ou ça, j'y retournais pour travailler ces choses. »
Si Rucker Park et d'autres playgrounds célèbres respirent à ce point le basket, c'est bien parce que les plus grands streetballers et de grandes légendes de la NBA y ont joué de longues heures durant leur jeunesse. Le streetball devient alors le dénominateur commun rassemblant certains des basketteurs les plus adulés. Mais aussi parce que c'est ici que sont nés les gestes et les actions qui font désormais lever de leur siège les spectateurs des enceintes des trente franchises de la Ligue.