Reggie Miller était-il si bon que ça dans le money time ?

Peut-être n’a-t-il jamais été le tueur à gage prétendu...

Reggie Miller était-il si bon que ça dans le money time ?

Cet article est une tribune parmi plusieurs que nous a envoyé Aurélien, comme celui de vendredi sur Kobe Bryant. Si un sujet vous tient à coeur ou que vous avez un avis clivant ou tranchant dessus, n'hésitez pas à nous le faire parvenir pour qu'il soit publié. Aujourd'hui, un questionnement sur Reggie Miller.

Que Reggie Miller soit un shooteur d’exception, cela ne fait pas débat. Lorsqu’il prend sa retraite en 2005 après 18 ans de bons et loyaux services chez les Indiana Pacers, outre le fait d’avoir cumulé 12 saisons avec un true shooting percentage de 60% ou plus (!), d’avoir été membre du club 40-50-90, ou d’avoir été désigné à cinq reprises joueur le plus adroit de la ligue aux lancers francs, personne dans l’histoire de la NBA n’a marqué plus de trois points que lui (2560 paniers primés, 39,5% de réussite en carrière).

Fait-il pour autant partie des 75 meilleurs joueurs de l’histoire de la NBA comme il en a été décidé en 2021 ? Le doute est permis.

D’une part, parce qu’il n’a jamais remporté de titre, et de l’autre, parce que son palmarès individuel plutôt maigrelet se résume à cinq sélections au All-Star game, trois petites sélections au All-NBA Third Team... et c’est tout !

Auteur des 18,2 points, 3 rebonds, 3 passes et 1,1 interception par match, à poste égal, non seulement il est à des années-lumière de concurrencer les GOAT Michael, Jerry, Kobe & Co. mais il peine à faire jeu égal avec ses contemporains Joe Dumars, Mitch Richmond, Glenn Rice et Clyde Drexler.

Joueur unidimensionnel, Reggie Miller n’est en effet ni un défenseur, ni un passeur, ni un dribbleur, ni même un scoreur. Sa légende repose exclusivement sur sa capacité à enquiller les paniers dans les moments chauds.

Héros d’un nombre incalculable de compilations TikTok et YouTube qui mettent en scène ses tirs salvateurs, pour ne retenir que les playoffs, il compte parmi ses plus grands exploits d’avoir inscrit 25 points dans le dernier quart-temps face aux New York Knicks en 1994, puis de leur avoir passé l’année suivante 8 points en 9 secondes en fin de match, d’avoir planté le trois points de la victoire face aux tout-puissants Chicago Bulls de 1998, d’avoir arraché une prolongation face aux New Jersey Nets en 2000 grâce à un tir à plus de 10 mètres…

Jugez plutôt.

D’ailleurs, au dire de ses pairs, il n’y aurait pas plus décisif que Reggie.

C’est Magic Johnson qui clame que « plus le match est important, plus il est bon ». C’est Larry Bird qui estime « qu’il a probablement réussi plus de shoots dans les moments cruciaux que n’importe qui ». C’est Isiah Thomas qui l’adoube comme « l’un des plus grands clutch players de l’histoire ». C’est Ray Allen qui confie qu’il était « le joueur qu’il voulait être ».

Bref, à écouter la petite musique qui résonne depuis bientôt deux décennies, on aurait vite fait de confondre le « money time » avec le « Miller time ».

Et pourtant...

Les faits, rien que les faits

Pour peu que l’on passe à la loupe ses performances quand l’enjeu est de taille, il y a de quoi pas mal relativiser les choses.

En 1994, tandis que Pacers et Knicks sont au coude à coude en finale de conférence Est (2-2), Miller s’enflamme comme jamais (39 points) pour arracher le game 5 au Madison Square Garden – de ce jour date le fameux « choke sign » adressé à Spike Lee.

De retour à la maison, Indiana est en position de force pour accéder à la finale. Miller, 28 ans, s’apprête ainsi à disputer le match le plus important de sa carrière.

48 minutes plus tard, c’est la douche froide. New York a égalisé, porté par John Starks qui jouait ce soir-là avec un compas dans l’œil (26 points, 8 sur 11 aux tirs, dont 5 sur 6 à trois points). Penaud, Miller a certes enfilé 27 pions, mais à un piteux 38% de réussite (8 sur 21 aux tirs).

Et quand est venu le game 7, le numéro 31 a encore shooté tous azimuts (25 points à 7 sur 17 aux tirs, 41,2% de réussite), non sans manquer un potentiel trois-points victorieux dans les dernières secondes.

Qu’importe, lors des playoffs suivants, Indiana se hisse à nouveau en finale de conférence, cette fois face au Orlando Magic de Shaquille O’Neal et Penny Hardaway.

La série se joue à nouveau en sept manches, et Reggie Miller est à nouveau transparent quand tous les regards sont braqués sur lui (12 petits points dans le game 7, 5 sur 13 aux tirs).

De retour en playoff en 1998, Reggie Miller trouve sur sa route les Bulls de MJ en finale de conférence Est. Excepté son illustre three dans le game 4, ses stats piquent du nez : 17,4 points de moyenne à 41, 6% de réussite sur la série contre 19,5 à 47,7% en saison…

Une fois Jordan parti pour sa seconde retraite, les Pacers retrouvent les Knicks en demi-finale de conférence. La messe semble être dite quand PatricK Ewing se déchire le talon d’Achille au game 2.

Miller disparaît pourtant complètement des radars au match suivant (0 point dans les 19 dernières minutes), avant de se faire marcher dessus par Allan Houston dans le game 6 (8 points à 3 sur 18, contre 32 points à 12 sur 17 pour le New-Yorkais !).

Surnommé peut-être un peu hâtivement « le bourreau des Knicks », Miller encaisse là en phase finale sa troisième défaite en cinq confrontations face à New York

On pourrait poursuivre encore longuement cette liste (son panier à 3 secondes de la fin du game 1 face aux Sixers d’Allen Iverson en 2001 suivi de 3 défaites de rang, son égalisation sur le buzzer face aux Nets en 2002 qui n’aboutit à rien en prolongation...), mais à ce stade, vous avez compris : Reggie Miller n’est pas le faiseur de miracles vendu par la NBA et les fans.

Beaucoup de shoots, beaucoup de déchets

En réalité, sa très flatteuse réputation s’explique principalement par le fait qu’il ait énormément tenté sa chance.

Entre la saison 1996-1997, date à laquelle NBA.com a commencé à compiler les tirs clutch (un tir primé dans les 5 dernières minutes d’un match alors qu’il y a au maximum 5 points de différence entre deux équipes), et la saison 2004-2005, date à laquelle il est parti à la retraite, Reggie Miller a shooté 102 fois dans le money time (!).

Sur ces 102 fois, il a manqué sa cible 63 fois.

Lucide, il est le premier à admettre que ses fails sont un peu trop vite passés sous le tapis (« Lorsque vous tirez pour gagner, il faut être prêt à rater car vous n’allez pas viser dans le mille à tous les coups »), non sans reconnaître qu’il existe un biais de mémoire sélective (« Les gens tendent à retenir les événements les plus marquants, alors que j’ai raté un paquet de shoots »).

Bien évidemment, pour en revenir à ces 102 shoots, cela signifie également qu’il a fait mouche 39 fois, soit un pourcentage de réussite absolument remarquable de 38,2%.

Largement de quoi faire taire les voix qui s’élèvent pour cancel sa place au Hall of Fame ou dire de lui qu’il est « le joueur NBA le plus surcoté de tous les temps »... mais pas de quoi se souvenir de lui comme le God qu’il n’était pas.

Sources : Bleacher Report, Forbes, Medium, Le Roster

Est-ce la faute de Patrick Ewing si New York n’a jamais remporté le titre ?

Y abeaucoup de vrai là-dedans, c'est vrai que Reggie est un peu excessivement adulé parfois, peut-être. Par contre, il faut aussi remettre un peu les choses dans leur contexte : les séries de playoffs, au milieu des années, 90, c'était souvent du pugilat et les pourcentages de réussite aux tirs, c'était pas toujours fameux.
Donc faire des 8/21 ou 7/17 sur des matchs décisifs, surtout pour un shooteur, n'était pas franchement révoltant.

Par exempel un Pat Ewing, qui lui jouait près du cercle, à fait une finale à 36%FG en 94, et personne n'a vraiment considéré qu'il avait foiré sa finale.

Au final Reggie reste un gars qui a élevé son niveau de jeu en Playoffs (+2,4ppg), en gardant une réussite plus que correcte (44,9%, 39% à 3pts sur 144 matchs de PO).

Dire qu'il avait du mal à rivaliser avec des gars comme Richmond ou Rice me semble erroné, et pourtant j'aime beaucoup ces deux là. Mais ce sont des joueurs qui ont scoré à profusion dans des contextes où ils avaient tous les ballons, et qui les plus rares fois où ils ont été en playoffs (surtout pour Richmond) ont bien moins brillé que Reggie.
Pour Drexler c'est différent parce qu'il était certes plus complet.
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Alors là c'était très intéressant. Il semble en effet que Reggie soit surcôté.
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