Pour la NCAA, les athlètes sont des esclaves et des criminels…

Le journaliste Shaun King a révélé l'argument utilisé par la NCAA pour faire face à une récente plainte contre elle. Difficile de ne pas trouver ça scandaleux.

Pour la NCAA, les athlètes sont des esclaves et des criminels…
Voilà des années que des personnes se battent pour faire reconnaître aux jeunes athlètes de NCAA le droit d'être rémunérés. Ne serait-ce qu'en tant qu'employés à temps partiel comme d'autres étudiants américains. L'argument moral évoqué est toujours le même : contentez-vous de la bourse universitaire à laquelle vos talents sportifs vous donne droit, c'est une chance. Qu'importent les 8 milliards de dollars que paye CBS à la NCAA pour avoir le droit de diffuser la March Madness et sur lesquels les basketteurs ne touchent pas un centime. Qu'importent le merchandising phénoménal réalisé autour de ces mêmes joueurs, qui se chiffre là aussi en milliards de dollars. Jusqu'ici, l'organisation toute puissante avait à peu près joué franc-jeu en maintenant sa ligne de défense traditionnelle. Mais la manière dont elle s'est défendue face à la dernière tentative de changer la donne est tout simplement hallucinante. Le journaliste Shaun King, qui s'est procuré les documents officiels de la plainte émise par l'ancien joueur de football américain "Poppy" Livers, s'en est ému dans un article cette semaine. Les avocats de la NCAA entendent utiliser l'argument suivant, en s'appuyant sur un cas jugé en 1992 : ils n'ont pas à payer leurs étudiants-athlètes parce que le 13e amendement (celui qui a permis d'abolir l'esclavage) autorise toujours le travail forcé non-rémunéré sous certaines conditions. Autant dire l'esclavage. Expliquons en détails ce que signifie ce coup de boutoir invraisemblable. En 1992, Daniel Vanskike, un prisonnier de l'Indiana, a exprimé le fait qu'il était injuste qu'on le force à travailler au sein de la prison sans recevoir un salaire minimum. Le juge a rendu un verdict défavorable à Vanskike. Motif invoqué : le 13 amendement et la clause méconnue qui autorise le travail forcé/l'esclavage pour les personnes reconnues coupables d'un crime. La NCAA n'a donc pas le moindre scrupule à comparer, même indirectement, ses athlètes à des criminels que l'on peut contraindre à l'esclavage. En 2018. Dans un sport majoritairement représenté par des Afro-Américains. Des gens dont les ancêtres ont été réduits en esclavage... Les avocats de Poppy Livers ont beau avoir mis en lumière le côté scandaleux et inapproprié du cas cité par les représentants de la NCAA, ces derniers comptent bien maintenir l'utilisation de ce précédent. Difficile de croire que le jour où les choses évolueront dans le sport universitaire est proche.