La paradoxe Philly

Les Sixers ne sont pas la meilleure équipe de l'Est. Pourtant, c'est peut-être l'équipe qui peut poser le plus de problèmes aux Warriors en Finales.

La paradoxe Philly
Il reste du temps avant les playoffs. Pourtant, c'est déjà un bain de sang qui se profile en demi-finales de la Conférence Est. Si à l'Ouest personne n'imagine les Warriors louper les Finales, bien malin celui qui peut affirmer connaître le nom de leur adversaire. Quatre équipes classées dans le top 5 à l'heure de ces lignes semblent d'un niveau à peu près similaire et ont des arguments à faire valoir en vue des playoffs. Sans faire injure aux très valeureux Pacers, privés de leur meilleur joueur jusqu'à la fin de la saison, Milwaukee, Toronto, Philadelphie et Boston ont tous une tête de vainqueur. Les Bucks et les Raptors se tirent la bourre en tête et ont de bonnes chances de se disputer le trône de la saison régulière jusqu'au bout. Mais ce n'est peut-être pas la "meilleure équipe" qui aura la chance de défier Golden State (ou quiconque réalisera l'exploit de les priver d'une 5e participation de suite). Tout le monde s'accorde à dire, bilan à l'appui, que les Sixers sont moins performants que le duo Milwaukee-Toronto depuis la reprise. Philadelphie est pour le moment 4e à l'Est et présente des bilans négatifs contre ses rivaux : 0-2 contre Boston, 0-1 contre Milwaukee et 1-2 contre Toronto. Il y a, à ce jour, cinq victoires d'écart entre les Bucks et la franchise de Pennsylvanie. Autant dire qu'à moins d'un sprint final fou, Philly ne sera pas tête de série n°1 en post-saison. Le paradoxe est là. Les Sixers ne sont pas la meilleure équipe de la Conférence. Pourtant, ils semblent être les mieux armés pour opposer un semblant de résistance à Golden State en cas d'affrontement final. Brett Brown a à sa disposition le pivot le plus dominant de la ligue, Joel Embiid. Le Camerounais fait une saison remarquable, sans blessure problématique, et est un vrai leader des deux côtés du terrain. C'est autour de lui que l'alchimie restait un peu mystérieuse, Ben Simmons, Jimmy Butler et consorts ayant du mal à être au diapason tous les soirs. Les choses ont un peu changé ces derniers jours.

Une équipe deep et cauchemardesque en termes de mismatches

L'arrivée de Tobias Harris, le joueur le plus prolifique des Clippers, borderline All-Star, a modifié la force de frappe des Sixers. Harris a déjà l'air à l'aise et paraît complètement prêt à être moins exposé mais tout aussi prépondérant qu'en Californie. Il n'y a aucune inquiétude à avoir concernant "Toby", qui a aussi montré de belles dispositions lorsqu'il a fallu accompagner le second ou le third unit. Butler, qui avait jusqu'ici du mal à trouver sa place, commence à se contenter de prendre ce que le jeu lui offre et augmente son degré d'agressivité dans le 4e quart-temps. C'est exactement dans ce registre qu'il est le meilleur et sera le plus efficace pour les Sixers. S'il est vraiment le "gagnant" qu'il prétend être depuis son cirque à Minneapolis, il a tout intérêt à continuer de se plier aux désirs de Brett Brown et à se "sacrifier". Il faudra évidemment attendre de voir de quelle manière il réagira si l'équipe est en difficulté en playoffs, mais l'attitude est pour le moment adéquate. L'aspect sous-coté de ce qu'a réussi à faire Elton Brand, le General Manager, avant la deadline, est à chercher du côté du banc. Philadelphie est beaucoup plus "deep" avec les renforts de Mike Scott, Boban Marjanovic et Jonathan Simmons, trois joueurs aux registres très différents mais aussi très précieux en fonction des situations. L'échantillon est faible (deux matches avec Harris et les nouveaux venus), mais il s'agissait quand même de deux victoires contre Denver (2e à l'Ouest) et les Lakers (10e mais qui comptent LeBron dans leurs rangs). Les promesses entrevues sont à reporter sur un éventuel affrontement final avec les Warriors. Aucun autre des trois prétendants de l'Est ne peut proposer une telle faculté à switcher en défense et à créer des mismatches, le nerf de la guerre. En configuration playoffs, avec une rotation serrée, chaque joueur présent sur le parquet pose un problème majeur. La taille et a créativité de Ben Simmons, la capacité d'Embiid à brutaliser au poste ou à s'écarter à mi ou longue-distance, les jumpers de Jimmy Butler et Tobias Harris, pas maladroits lorsqu'il s'agit de créer leurs propres shoots, l'adresse létale à 3 points de JJ Redick... Un cauchemar potentiel, même pour une armada comme les Warriors, si Brett Brown parvient à faire fonctionner l'ensemble de manière optimale. Ce qui n'est évidemment pas gagné. Il reste 26 matches de saison régulière à l'ancien adjoint de Gregg Popovich pour que la mayonnaise prenne complètement. Avant de songer à perturber la machine des doubles champions en titre, il faudra sortir de l'Est. Et on peut parier que Giannis Antetokounmpo, Kawhi Leonard et Kyrie Irving, entre autres, se feront un plaisir de mettre des bâtons dans les roues des Sixers. En attendant, personne à l'Est ne peut se vanter de pouvoir aligner un cinq plus talentueux sur le papier que celui-ci : Ben Simmons - JJ Redick - Jimmy Butler - Tobias Harris - Joel Embiid. Vivement le mois d'avril que l'on voit si le coup de poker de Brand avait du sens, ou si Philly va devoir se pencher avec inquiétude sur la free agence de Jimmy Butler et Tobias Harris...