Ancien intérieur dominant du championnat d’Indonésie (titré avec Prawira Bandung en 2023), l’Américain Jarred Shaw est détenu près de Jakarta depuis son arrestation en mai pour importation illégale de bonbons au cannabis. Montant estimé : 400$ pour 132 gummies interceptés par la police lors d’une livraison au pied de son immeuble.
Dans un entretien donné depuis la prison au Guardian, le joueur de 35 ans affirme utiliser le cannabis comme médicament pour soulager une maladie de Crohn… et se dit désormais exposé à la perpétuité, voire la peine capitale en vertu des lois indonésiennes sur les stupéfiants.
« On me charge pour presque un kilo »
Selon The Guardian, Jarred Shaw est descendu récupérer un colis lorsqu’une dizaine d’agents en civil l’ont interpellé, scène diffusée ensuite sur les réseaux sociaux. Les autorités ont présenté à la presse un lot de 869 grammes de « gummies » saisis, un poids global qui, pour l’intéressé, ne reflète pas la quantité effective de THC : « On me charge pour presque un kilo », proteste-t-il, argumentant que l’essentiel du poids provient du sucre et de la gélatine, pas de la drogue active. Il clame un usage personnel, et non une intention de revente. La police affirme, elle, que des messages suggéraient qu’il pourrait partager les bonbons avec des coéquipiers, un point que Shaw conteste.
L’Indonésie applique l’une des politiques anti-drogues les plus sévères au monde. En 2016, plusieurs exécutions ont visé des condamnés, dont des étrangers, pour des délits liés aux stupéfiants. À ce jour, plus de 500 personnes seraient dans le couloir de la mort, la plupart pour des infractions de drogue. Après l’arrestation de Shaw, un responsable de la police de l’aéroport Soekarno-Hatta a évoqué publiquement le spectre de la perpétuité ou de la peine de mort, le temps que l’enquête détermine l’ampleur de l’« importation » et d’éventuelles ramifications. Aucune date de première comparution ne lui avait été notifiée cinq mois après les faits, selon le journal britannique.
« J’utilise le cannabis comme un médicament »
« J’utilise le cannabis comme un médicament », explique Shaw, citant des douleurs abdominales, l’anxiété, des troubles du sommeil et les symptômes de sa maladie de Crohn. Hors saison, il réside en Thaïlande, où la législation est nettement plus libérale sur le cannabis. Il dit avoir déjà joué en Indonésie sans consommation mais avoir fini par « faire une erreur » en faisant venir ces produits cette année. « Ce que certains appellent drogue, j’appelle ça médicament », résume-t-il, en invoquant une différence de cultures.
Depuis son interpellation, Jarred Shaw a décrit des semaines très sombres, parlant du « point le plus bas » de sa vie au cours des deux premiers mois, avant de retrouver un semblant d’équilibre grâce à la prière, à sa foi et à l’accès à une salle de sport en prison. Il partage une cellule exiguë avec une douzaine d’hommes, mais dit « se sentir encore jeune » et espérer reprendre sa carrière. L’ambassade des États-Unis à Jakarta a indiqué être au courant de l’affaire, sans autre commentaire. En parallèle, le joueur collecte des fonds pour ses frais juridiques via une page de financement participatif.
Une mobilisation pour éviter un précédent dramatique
Pour l’ONG Last Prisoner Project, qui milite pour les personnes incarcérées pour des délits mineurs liés au cannabis, le cas Shaw « n’est pas isolé » : des peines extrêmes sont encore prononcées dans le monde pour des infractions non violentes qui « ne menacent pas la sécurité publique ». L’organisation rappelle que, malgré la légalisation récréative dans près de la moitié des États américains et l’usage médical autorisé dans presque tous les autres, des dizaines de milliers de personnes restent détenues aux États-Unis pour des délits de cannabis. L’ONG appelle à une mobilisation pour éviter un précédent dramatique et « ramener Jarred auprès de sa mère ».
Avant son arrestation, Jarred Shaw (2,11 m) avait passé trois saisons en Indonésie, marqué plus de 1 000 points, et contribué au titre 2023 avec Bandung. Sa fédération professionnelle, l’IBL, l’a depuis banni à vie. Sa carrière l’a mené d’Utah State à l’étranger (Argentine, Japon, Turquie, Tunisie, Thaïlande). En 2015, il avait été sélectionné par les Santa Cruz Warriors avec le 18e choix de la draft de la NBA Development League. En Indonésie, son cas évoque forcément celui de Brittney Griner en Russie - des contextes juridiques différents, mais la même ligne rouge : la tolérance zéro au cannabis appliquée à des athlètes étrangers, avec une judiciarisation qui peut virer au diplomatique.
Entre la gravité potentielle des charges et la lenteur procédurale, l’affaire illustre le choc des régimes : d’un côté, un sportif invoquant un usage thérapeutique en s’appuyant sur une tendance mondiale à la dépénalisation ; de l’autre, un État qui criminalise sévèrement toute importation de produits classés stupéfiants. À court terme, l’enjeu pour la défense est double : réduire la gravité de la qualification (revente/importation organisée vs usage personnel) et contester le poids retenu lié aux gummies, décisif dans l’échelle des peines. Sans inflexion judiciaire ou intervention diplomatique, le risque demeure maximal.
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