La méthode Wembanyama : faire travailler le corps autant que l’esprit

Footwork d’Olajuwon, muscles en plus et échecs après l’effort : Wembanyama conçoit un jeu total, où la tête et le corps progressent au même rythme.

La méthode Wembanyama : faire travailler le corps autant que l’esprit

L’été de Victor Wembanyama a été un laboratoire à ciel ouvert. Entre rencontres inattendues (jusqu’à Daniel Radcliffe aka Harry Potter), passage dans un temple Shaolin et sessions techniques avec Hakeem Olajuwon, Kevin Garnett — après Jamal Crawford l’an dernier —, on devine une démarche volontairement éclectique : varier les influences, alterner terrain et hors-terrain, et nourrir autant la mécanique du joueur que le logiciel mental. Dans le CQFR du jour, Shaï et Antoine ont analysé les choix de Victor.

Le volet « fondamentaux » intrigue le plus. S’entraîner avec Olajuwon renvoie immédiatement au registre du poste bas : footwork, contre-mouvements, exécution sans déperdition d’appuis. L’objectif n’est pas de transformer son jeu pour le coller au cercle à plein temps, mais d’optimiser les quelques post-ups qu’il prendra : plus vifs, mieux enchaînés, avec des counters immédiats. Ce raffinement intérieur se superpose à ce que l'on imagine restera une grande partie de son arsenal offensif : un volume élevé à trois points — domaine où ses progrès sont manifestes — tout en devenant plus tranchant sur les touches proches du panier.

Le chantier physique accompagne ce plan de jeu. Wembanyama a expliqué avoir pris une bonne quinzaine de kilos depuis son arrivée en NBA. Plus de puissance sans perdre la mobilité : de quoi stabiliser les appuis, encaisser le contact, et rendre chaque séquence poste bas plus difficile à défendre. L’idée n’est pas d’ajouter 10 nouveaux moves, mais de réduire le temps d’exécution et d’élever l’efficacité de ceux déjà maîtrisés.

Travailler la lucidité en fatigue et l’analyse sous pression

La méthode s’étend au mental. L’été a aussi été consacré à des parties d’échecs après des séances épuisantes, pour travailler la lucidité en fatigue et l’analyse sous pression. Le principe est clair : simuler l’état de fin de match et maintenir la clarté décisionnelle. Dans le même esprit, les échanges avec Kevin Garnett ont surtout porté sur l’exigence mentale et le rapport à la compétition : comment cadrer l’énergie, comment imposer un standard.

Ces stages prestigieux ne sont néanmoins pas une garantie automatique de progression. Dwight Howard, lui aussi passé par Olajuwon, n’avait pas immédiatement transformé ses séances en résultats sur le terrain. Kevin Garnett a lui aussi eu ses « protégés » au destin inégal : Thon Maker ou Jeff Green annoncés comme futurs monstres, puis des trajectoires plus discrètes ; à l’inverse, Jaren Jackson Jr. a su se hisser au rang d’All-Star. Le message implicite : la transmission ne suffit pas, seule la capacité d’appropriation fera la différence pour Wembanyama.

Victor Wembanyama qui retweete ce dézinguage en règle de Karl Malone, quel héros !

Nourrir sa vision et sa mentalité

Un parallèle avec Kobe Bryant illustre bien l’esprit de la démarche de Victor. Comme l’ancien Laker, Wembanyama ne se limite pas à des influences purement basket. Il multiplie les échanges, les rencontres, même avec des personnalités extérieures au sport, pour nourrir sa vision et sa mentalité. Cette curiosité volontairement variée participe à construire un joueur qui ne travaille pas seulement son tir ou son corps, mais aussi son rapport à l’effort, à l’adversité et à la créativité.

Enfin, ce qui frappe, c’est sa manière de relier toutes ses passions à son développement. Que ce soit les échecs, les rencontres artistiques, les échanges avec des légendes ou l’entraînement pur, Victor ramène tout à une même logique : progresser comme basketteur et comme individu. Ajouté à un arsenal déjà très solide au tir extérieur, ce travail peut vite rendre ses post-ups létaux. Même s’il ne poste pas beaucoup, le simple fait de les exécuter avec précision et vitesse pourrait suffire à déclencher des prises à deux, créer des espaces, et transformer son jeu en un cocktail quasiment impossible à défendre.

Cet agenda est dense, mais cohérent. Multiplier les angles (fondamentaux, puissance, cognition) vise le même résultat : élever la qualité des décisions et la vitesse d’exécution. À court terme, il faudra sans doute un peu de temps pour retrouver le rythme officiel. Mais l’attente est posée : une fois la machine calée, le niveau de domination peut monter d’un cran, avec un profil capable d’enchaîner tirs lointains, finitions rapides près du cercle et lectures plus nettes dans le trafic.

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