Anthony Davis, DeMarcus Cousins, bienvenue dans le futur

Les Pelicans d'Anthony Davis sont opposés aux Kings de DeMarcus Cousins ce soir. L'occasion de faire le point sur le niveau spectaculaires des deux futures superstars de la ligue.

Antoine PimmelPar Antoine Pimmel | Publié  | BasketSession.com / MAGAZINES / Focus
Tout le monde prétend être dans le « turfu » (NB : Futur, pour les moins jeunes). Tout le monde prétend avoir un temps d’avance et chacun se veut visionnaire. Pourtant, on sait bien que seuls Shawn Marion, Marty McFly et la NASA peuvent se vanter de savoir ce qui sera à la mode dans dix ou vingt ans. Dans le sport professionnel, cette tendance se traduit par cette manie qu’ont les médias et les fans à anticiper l’avenir. Quelle sera la prochaine superstar NBA ? Qui sera le prochain Michael Jordan ? Le prochain LeBron James ? Ces prévisions, ces articles consacrés à des jeunes lycéens, ces débats, ces analyses viennent alimenter la « hype » qui entoure les stars en herbe avant même leur arrivée en NBA. On nous (vous ?) promet depuis déjà deux ans qu’Andrew Wiggins et Jabari Parker sont le « futur » de la ligue. Deux prodiges. Deux joueurs qui évoluent au même poste que Kevin Durant ou LeBron James, les deux meilleurs éléments de la NBA « actuelle ». [superquote pos="d"]Les évolutions successives de la NBA (règles, profils des joueurs, style de jeu, etc) ont entraîné le déclin progressif des pivots[/superquote]Il fut une époque pas si lointaine où les colosses régnaient sur la galaxie NBA. Si les géants dominants sont aujourd’hui perçus comme des dinosaures – par « géants dominants », on entend un pivot qui mène son équipe en finale de Conférence – il fut un temps où les Patrick Ewing, David Robinson, Hakeem Olajuwon et autres Shaquille O’Neal étaient au sommet de la hiérarchie. Ils étaient les patrons d’une ligue qui ressemble très peu au championnat d’aujourd’hui. Les évolutions successives de la NBA (règles, profils des joueurs, style de jeu, etc) ont entraîné le déclin progressif des pivots. Mais il y a encore un espoir. Deux hommes incarnent la relève, non seulement des intérieurs dominants, mais aussi celle de la ligue toute entière. Deux jeunes superstars déterminées à marquer leur sport de leur empreinte. Deux joueurs aux statistiques titanesques capables de faire plier une rencontre à eux seuls. Ces deux loustics s’affrontent ce soir pour la deuxième fois de la saison. Après avoir ébloui la planète basket lors de leur premier duel – et plus globalement à chacune de leur sortie depuis fin octobre – Anthony Davis et DeMarcus Cousins, respectivement 21 et 24 ans, se retrouvent ce soir à l’occasion de l’opposition entre les New Orleans Pelicans et les Sacramento Kings. Prenez votre ticket pour le futur, cramponnez-vous et préparez-vous à décoller, ça va secouer. [youtube hd="0"]https://www.youtube.com/watch?v=jkykugZdHqo[/youtube]

DeMarcus Cousins, le meilleur pivot de la ligue

Lorsque nous avons placé « DMC » en 18e position de notre top 100 des meilleurs joueurs NBA, lui attribuant de facto le titre honorifique de « meilleur pivot de la ligue », vous avez été nombreux à ricaner. A l’époque, nous avions défendu notre choix de la sorte.
« La jeune star des Sacramento Kings est à nos yeux le meilleur pivot de la NBA actuellement. Ou du moins, il sera considéré de la sorte par un plus grand nombre d’ici quelques mois. »
Nous avions eu tort. Oui, tort. Il n’a pas fallu quelques mois avant que DeMarcus Cousins soit considéré par une partie du public comme le meilleur joueur à son poste (l’autre moitié militant en faveur de Marc Gasol). Les chiffres parlent pour lui. Il est le cinquième meilleur marqueur de la ligue (23,2 pts par match) et le meilleur rebondeur (12,3 rbds). Avec un PER de 27,78, il se positionne comme le deuxième joueur le plus efficace de la ligue (premier parmi les pivots, évidemment) devant des superstars comme Chris Paul, LeBron James ou Stephen Curry. Au-delà des chiffres, le natif de Mobile, Alabama, sait tout faire sur un parquet. On a rarement vu un être humain de son gabarit – 2,11 m et 122 kg – se déplacer aussi bien sur un terrain, que ce soit avec ou sans le ballon. Cousins prend des rebonds, il remonte la balle, il marque près du cercle, en puissance et même parfois en finesse. Il est de plus en plus adroit à mi-distance. Sa vision du jeu est excellente et c’est un très bon passeur pour son poste (ne vous fiez pas à ses statistiques à la passe – 1,9). Le plus effarant ? Il a encore une vraie marge de progression. [superquote pos="d"]DeMarcus Cousins tourne à 26 points et 14 rebonds sur 36 minutes.[/superquote]La star des Sacramento Kings écope de bien trop de fautes (4,7 par rencontre !) ce qui pénalise son équipe… et ses statistiques. Cousins ne passe « que » 31 minutes en moyenne sur le parquet. Un joueur de son standing est censé rester cinq ou six bonnes minutes de plus sur le terrain chaque soir. Du coup, ses performances sont encore plus monstrueuses une fois ses statistiques rapportées sur 36 minutes : 26 points et 14 rebonds. Il faut remonter  le temps jusqu’en 1976 pour retrouver la trace d’un joueur alignant plus de 26 pts et 14 rbds (de moyenne globale et non sur 36 minutes – une nuance), en l’occurrence Kareem Abdul-Jabbar, l’un des plus grands pivots et joueurs de tous les temps. Pour marquer l’histoire de son empreinte et rejoindre les plus grandes légendes de la ligue, DeMarcus Cousins devra donc apprendre à limiter ses fautes. Mais ses progrès sont déjà palpables. L’expérience internationale – il a remporté la Coupe du Monde avec Team USA cet été – lui a fait le plus grand bien. Il est un meilleur leader pour les Sacramento Kings, une équipe qui gagne (8 victoires et 5 défaites, septième au sein de la terrible Conférence Ouest). Il est encore plus efficace que par le passé en attaque et il s’est réellement mis au diapason en défense. Ce secteur du jeu restait son principal point noir, en plus de son attitude jugée égoïste par une partie des observateurs. Mais Cousins a le mérite d’essayer et ses efforts finissent pas être récompensés. Les adversaires des Kings shootent à 43% de réussite près du cercle lorsque celui-ci est gardé par le pivot star de Sacramento. Nerlens Noel, Joakim Noah, DeAndre Jordan (hum…), Marc Gasol ou encore Steven Adams ont tous des statistiques moins flatteuses que Cousins dans cette catégorie. S’il n’aura sans doute jamais l’étoffe d’un candidat pour le DPOY, « DMC » a progressé en défense et il ne pénalise plus son équipe. De quoi réviser le jugement de certains observateurs à son sujet ?

Anthony Davis, le meilleur joueur de la ligue

Si nous devions justement refaire notre classement des 100 meilleurs joueurs – on le refera en fin de saison – dès aujourd’hui, Anthony Davis serait placé à l’une des deux premières positions. Bon, en réalité, LeBron James reste le meilleur joueur du monde mais ses débuts délicats avec les Cavaliers et les performances ahurissantes du jeune homme des Pelicans nous offrent au moins la possibilité d’hésiter au moment d’élire le « meilleur des meilleurs avec mention ». Il y a des dizaines et des dizaines de statistiques complètement dingues au sujet d’Anthony Davis. Il a un PER (Player Efficiency Rating) de 35,96. Bordel, 35,96. A titre d’exemple, Seuls trois joueurs ont dépassé la barre symbolique des 30 d’efficiency au cours des dix dernières années : LeBron James (quatre fois), Chris Paul et Dwyane Wade. Aucun d’entre eux n’a fait mieux qu’un PER de 31 (et des poussières). Flippant. D’autant plus effrayant que la star des Pelicans semble réellement en mesure de tenir le rythme toute la saison (sauf blessure). Ses progrès sont si rapides, si effarant… qu’on en devient presque à se demander à quel moment « Unibrow » est devenu aussi fort. [superquote pos="d"]Il est le deuxième meilleur marqueur de la ligue alors qu'il n'est même pas dans le top 10 des joueurs les plus utilisés...[/superquote]On a toujours su qu’il serait un défenseur d’élite. Il l’a démontré dès l’université et ses blocks ont fait le tour de la toile dès sa première saison en NBA. Il est d’ailleurs le meilleur contreur de la ligue (3,5 blocks) mais aussi le deuxième meilleur intercepteur (2,2 steals). Ok, ne cherchez plus le vainqueur du trophée de DPOY, donnez-le de suite à Davis. Ses bras gigantesques lui permettent de voler ou de stopper n’importe quel ballon mais sa défense ne se limite pas à ça. Il excelle sur pick&roll, il chasse les intérieurs fuyants derrière la ligne à trois-points grâce à sa vitesse latérale, il revient rapidement près du cercle pour annihiler toute pénétration vers le panier, il dissuade l’adversaire de se shooter de près et il parvient même à contrer les tirs en fadeaway grâce à ses tentacules (LaMarcus Aldridge en sait quelque chose). Il est juste sensationnel. Certains observateurs craignaient qu’Anthony Davis soit une copie améliorée de Marcus Camby. Qu’ils s’étouffent tous dans leur café. Plus sérieusement, la star des Pelicans est un joueur unique. Cessons les comparaisons avec Kevin Garnett, Tim Duncan… on n’a pas le souvenir d’un intérieur de son profil. Meneur au lycée, il est extrêmement agile balle en main et il court aussi vite que les arrières, voire même plus vite, comme en témoigne ses dunks à la pelle en transition. Il est impérial près du cercle, meurtrier dans la raquette et de plus en plus efficace à mi-distance (43,2% de réussite). Il n’hésite plus à faire feu à cinq-six mètres lorsque son défenseur recule ou lui laisse de l’espace. Son sens du placement est excellent et il bénéficie ainsi d’un grand nombre de paniers faciles juste en anticipant les mouvements de son adversaire et en coupant vers le cercle au bon moment (NB : il récupère aussi une quantité de rebonds offensifs de la sorte). Le « Marcus Camby » (…) du futur est déjà le deuxième meilleur marqueur de la ligue derrière Kobe Bryant avec 26,3 points par match. Et pourtant, Davis est sous-exploité par les Pelicans. Expliquons-nous. 27% des possessions offensives de New Orleans lui sont destinées, ce qui le classe à la 17e place des joueurs les plus utilisés… On rappelle qu’il est donc le deuxième meilleur marqueur de la ligue alors que son équipe pourrait jouer nettement plus sur lui. Il tente certes 18 tirs par rencontre (57% de réussite) mais même-là, on a le sentiment que les Pelicans devraient donner encore plus la balle à leur géant. Il domine déjà ses adversaires mais il doit apprendre à reproduire à l’infinie des performances similaires à celle réussie contre Utah cette saison (43 pts, 14 rbds). [youtube hd="0"]https://www.youtube.com/watch?v=VMxOUcNU2JI[/youtube] Son potentiel est monstrueux. Davis peut encore prendre du muscle – il a déjà gagné du gabarit – et développer son jeu dos au panier pour passer un cap supplémentaire. Un palier qui l’emmènerait tout en haut, parmi les plus grands des grands champions passés par cette ligue.

Jahlil Okafor, le premier choix de la draft 2015

Le premier pivot superstar, George Mikan, est né à Joliet, près de Chicago, en 1924. 69 ans plus tard, Anthony Davis voyait le jour dans l’Illinois. Quelques années plus tard, Jahlil Okafor apprenait les fondamentaux du basket dans son lycée de Chicago. Trois intérieurs, un Hall Of Famer, une superstar en devenir et un prospect extrêmement talentueux. Le cousin éloigné d’Emeka Okafor est le symbole du renouveau des pivots en NBA. Nous vous avions présenté le phénomène dans notre REVERSE#40 (le premier article de l’auteur de cette colonne, alors en stage, il y a bientôt deux ans…) et il la « hype » n’a cessé de grandir depuis. Surclassé avec Team USA U19 quand il n’avait que 17 ans, réclamé par Duke et son coach légendaire Mike Krzyzewski, Okafor est désormais le favori pour être sélectionné en première position lors de la prochaine draft NBA, en juin prochain.
[superquote pos="d"]Hakeem Olajuwon, Tim Duncan et Shaquille O'Neal, on a connu pire comme modèles.[/superquote]« On va l’avoir un an puis il va rejoindre la NBA », annonçait déjà coach K avant même le début de la saison universitaire.
Cet intérieur technique et robuste, formé aux cassettes vidéos de Tim Duncan, Shaquille O’Neal et Hakeem Olajuwon, est déjà le meilleur joueur de sa génération. Il est prêt et son court passage avec Duke n’est qu’un prétexte pour parfaire légèrement des fondamentaux déjà acquis, solidifier sa cote auprès des scouts et pourquoi pas décrocher un titre universitaire. Autre intérieur originaire de Chicago, Cliff Alexander est attendu comme l’un des tops picks de la prochaine draft. Nous aurions pu aussi citer Karl Town Jr, le prodige de Kentucky, à qui on promet déjà une belle carrière NBA. Tous ne marqueront pas la ligue comme l’on fait leurs glorieux aînés. Joel Embiid n’aura peut-être jamais un dixième du talent d’Hakeem Olajuwon et Jahlil Okafor n’a pas encore posé le pied en NBA. Mais DeMarcus Cousins et Anthony Davis passionnent déjà les foules. Les Pelicans et les Kings jouent pour une place en playoffs cette saison. Et oui, même au sein de la terrible Conférence Ouest. Ils échoueront peut-être en avril prochain mais ils sont dans la course. On ne parle pas seulement du futur de la ligue. Kevin Durant voyait Anthony Davis comme le prochain lauréat du trophée de MVP d’ici quelques années. Il a sans doute vu juste mais le gamin est en avance sur le timing. Demain ce n’est pas si loin. Le duel titanesque de ce soir n’est pas seulement un avant-goût de la ligue du futur… c’est aussi son présent désormais.
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