Rétro Draft 2018:

Il y a des choses en NBA que je ne m'explique pas. Comme si le narratif prenait complètement le pas sur la réalité factuelle (Jokic MVP quasi unanime cette année alors que les 3 finalistes méritaient à peu près tous autant le trophée par exemple), comme si des bruits de couloirs rentraient inéluctablement dans les têtes des dirigeants et influençaient leurs choix et leur perception. La Draft 2018, reste à ce jour assez illisible, en particulier pour ce qui s'est passé autour du cas Dončić et de la hype énorme qu'avait Ayton à l'époque.

Attention, l'idée n'est pas de dire que j'avais tout vu avant tout le monde et que je suis plus compétent que des scouts NBA ou des GM, mais de pointer du doigt un épisode un peu absurde de l'histoire de la Grande Ligue, que nous, européens avions perçu différemment des américains à l'époque.

Pour rappel, voici le Top 10 dans l'ordre et quelques joueurs majeurs:

1. Ayton (Suns)

2. Bagley (Kings)

3. Dončić (Hawks puis Mavs)

4. Jackson Jr. (Grizzlies)

5. Young (Mavs puis Hawks)

6. Bamba (Magic)

7. Wendell Carter Jr (Bulls)

8. Sexton (Cavs)

9. Knox (Knicks)

10. Mikal Bridges (Sixers -> Suns)

11. SGA (Clippers), 12. Miles Bridges (Hornets), 14. Michael Porter Jr (Nuggets), 17. DiVincenzo (Bucks), 33. Brunson (Mavs)...

Trois équipes laissent passer Dončić...

Je passe sur les cas Gilgeous-Alexander et Brunson, honnêtement, il était très difficile de voir en eux des futures superstars à ce moment là de leurs carrières. Il y a toujours une petite part d'aléatoire dans les Drafts, surtout au delà du Top 5 et du Top 10. Les GM seront épargnés pour sur ce coup là.

En revanche...

Concernant Luka Dončić, je ne comprendrai jamais que trois franchises ne l'aient pas choisi. Certes il est toujours plus facile de critiquer les choix a posteriori, ça n'a souvent pas de sens de le faire des années après. Mais même à l'époque, du haut de mes 17 ans, j'étais déjà convaincu que Dončić était un talent générationnel, et j'imagine que c'était pareil pour la grande majorité d'entre nous, européens. A croire que les scouts des franchises NBA ont tous raté leurs avions pour Madrid.

Pour rappel, Luka à 17 ans, était déjà MVP de l'Euroleague, de l'Euro et des Finales de ces deux compétitions (et c'était à peu près la même chose en Liga et en Coupe du Roi). A mon sens, le Slovène était un numéro 1 de Draft aussi évident que Wembanyama l'an dernier, il a peut être un peu moins de potentiel (le français est le joueur 2K absolu sur le papier), mais avait déjà accompli plus de choses, plus jeune (c'est aussi dû à son poste, où l'on arrive à maturité plus tôt que chez les intérieurs). Il y avait déjà des certitudes immenses. Comment Wembanyama peut être un numéro 1 "no brainer" alors que 6 ans plus tôt, trois équipes laissaient passer sous leur nez un génie du basket ? Luka était grand pour son poste, avait un vista Teodosesque, était un scoreur lethal dès qu'il passait la ligne médiane, un maestro du pick&roll, un joueur clutch... le tout sur au plus haut niveau européen. Le seul problème qui était pointé du doigt au sujet de Luka, était sa défense, liée à son physique. Hormis le fait qu'aujourd'hui son physique n'est pas vraiment pénalisant pour garder son vis à vis quand il se le met en tête, je rappelle qu'Atlanta l'a échange pour... Trae Young, que le MVP en titre était... James Harden et que le meilleur joueur du monde était... Steph Curry (qui n'était pas encore un "bon" défenseur, comme en 2021-22)

Sacramento

J'ai souvent entendu des critiques sur le choix des Kings, celui de drafter Marvin Bagley III. Alors oui, mettons les pieds dans le plat de suite, il est désastreux. C'est le pire joueur du Top 10 avec Bamba (souvent blessé) et devant Knox. Des rumeurs courent au sujet d'un différend entre Vlade Divac et le père de Luka, qui lui même ne voulait pas rejoindre Sacramento. Quoi qu'il en soit, un club NBA se doit de drafter au talent quand il choisit dans le Top 3. Et c'est ensuite à l'équipe de tout mettre en œuvre pour développer sa pépite et lui donner envie de prolonger à l'issue de son contrat rookie. Mais bon, Divac voulait assembler une "jeune superteam" avec Fox, Hield et Bagley...

Atlanta

Ce n'est pas le fait de croire en Trae Young qui est dommageable, ni de voir en lui un futur franchise player, le joueur qui à lui seul cristallise quasiment l'attaque d'une équipe. Mais plutôt le fait de se passer de sa version améliorée. Luka était plus grand, plus costaud, plus expérimenté, aussi clutch, au moins aussi bon scoreur et passeur, moins animé par le "show" à l'américaine, plus tueur et moins exploitable en défense. Si Trae Young est devenu une star de la ligue, je ne peux pas m'empêcher de penser que ça ne pèse pas si lourd dans la balance face à un joueur qui a le potentiel pour rejoindre les plus grands de l'histoire. Et là encore, le gap entre les deux joueurs -celui qui sépare un excellent joueur d'un joueur all time- était constatable en 2018.

Phoenix

Les Suns ont drafté Ayton un peu pour les mêmes raisons qui faisaient saliver les scouts en voyant jouer Bagley: des qualités athlétiques hors normes. De la taille, de l'envergure, de la mobilité, un toucher excellent pour un tel gabarit... Ayton avait en plus des qualités  défensives certaines en tant que protecteur de cercle. Cependant, je trouvais déjà que les scouts s'emballaient un peu trop à son sujet. Lui et Bagley dominaient, physiquement, de la tête et des épaules, certes mais face à des joueurs universitaires d'un niveau basket et athlétique inégaux. Là où Luka était rayonnant face à des adultes référencés au niveau (FIBA) mondial. Ayton, -à l'image de son visage- avait quasiment déjà atteint à 19 ans une maturité physique et athlétique. Ce constat pouvait mettre la puce à l'oreille quand à la limite de son potentiel. D'ailleurs, après 6 saisons en NBA, ses moyennes de  points, rebonds, passés et contres sont les mêmes chaque année. Dominant chez les jeunes mais dans la moyenne chez les adultes. Le pivot des Suns est aussi le fruit de la mentalité américaine, qui conçoit le basket un peu trop souvent comme une succession de 1 contre 1, dont le but n'est pas de battre la defense adverse mais son vis à vis, et si l'on le domine ou l'humilie, c'est le graal. Peu importe si c'est un meneur qui cross un pivot au large ou un intérieur qui dunke sur son défenseur qui fait 12cm et 25kg de moins dans une Fac obscure.