Il n’a fallu qu’une minute pour que le duel s'installe. À peine le match lancé entre les Lakers et les Suns, Dillon Brooks et LeBron James se sont retrouvés nez à nez. Un premier échange, une première friction, quelques coups d'épaule bien sentis et bien appuyés, à l'initiative du Sun évidemment, et très vite une première technique sifflée contre Brooks.
On joue depuis moins de deux minutes... Le décor est planté. Leur rivalité, nourrie depuis Memphis puis ravivée à chaque fois qu'ils se croisent, n’avait pas besoin de préchauffage.
Le duel s’est ensuite installé en filigrane du match, par petites secousses successives. Un écran un peu appuyé, un regard qui traîne, un contact qui dépasse la simple bataille d’espace. L’atmosphère est électrique, sur courant continu. Brooks cherchait le combat, LeBron répondait par le jeu, mais sans jamais se dérober quand la ligne était franchie.
Le deuxième gros accrochage est arrivé sur une action anodine en apparence. Les Lakers sont en attaque. Brooks est collé au King, comme toujours et le bump dès qu'il peut. LeBron va pour poser un écran pour son meneur, mais sur son chemin décide de lâcher un petit bump à son tour à son pote du soir. Brooks s’écroule et vend l’impact.
La séquence part en review, les arbitres hésitent, puis tranchent : faute offensive, pas de flagrante. Rien de spectaculaire sur la feuille de match, mais beaucoup de non-dits sur le parquet. LeBron lâche un petit "that's so f**king soft". Brooks a le sourire. La tension continue de monter.
Le troisième épisode a fait basculer la soirée dans un registre plus chaotique. 64-64. Le match est tendu. Brooks part en drive côté droit. Doncic fait faute. LeBron contre la balle après le coup de sifflet, Dillon la frappe et elle retombe sur l'épaule du King. Et là, LeBron pète un câble. Littéralement. Il sort de ses gonds, hurle, yeux révulsés. Il pousse même l'arbitre, ce qui, pour un autre joueur que lui, aurait certainement été synonyme d'expulsion. Ses coéquipiers et coach viennent le calmer. Dillon Brooks reste stoïque, petit sourire en coin. Il a réussi son coup.
L’action est revue pour un possible geste hostile. Verdict : faute défensive, Brooks obtient deux lancers logiques, mais LeBron est aussi sanctionné d’une technique pour comportement antisportif. À ce moment-là, le score est serré, les nerfs sont à vif, et chaque décision arbitrale devient un accélérateur.
Le point de rupture arrive dans le money time, dans une séquence folle de trois minutes. Alors que les Suns viennent de remonter un déficit de 10 points, Brooks pense avoir donné l’avantage 114-113 aux Suns sur un tir à trois-points magistral, il se retourne vers LeBron, poitrine contre poitrine. Coup de sifflet des refs !
Le contact est jugé excessif, la deuxième technique tombe, et l’expulsion suit. Brooks quitte le parquet la tête basse, convaincu d’avoir été provoqué et lésé sur l’action précédente (il demandait la faute sur son shoot). Mais la réalité du terrain, c'est qu'il a perdu à son propre jeu. Il reste 12 secondes à jouer. LeBron, lui, se retrouve sur la ligne des lancers pour sceller le match. Il en manque un, puis rentre les deux suivants pour fermer la porte, sur une autre décision litigieuse dont on vous parlait plus tôt ce matin.
Après la rencontre, LeBron James a calmé le jeu sans nier la réalité du duel. « Il aime se battre. Il va se battre. Je vais me battre aussi. On va se rentrer dedans. On essaie juste de ne pas dépasser la limite. Moi, je ne vais pas jusque-là. »
Interrogé sur la dernière séquence et sur le fait que Brooks avait déjà une technique, LeBron a balayé l’idée d’un calcul. « Qu’il en ait déjà une ou pas, ça n’a aucune importance. C’est une technique. Si c’en était une sur moi dans le troisième quart, alors c’en était une sur lui à ce moment-là. »
LeBron a aussi rappelé que, derrière le tumulte, le basket avait parlé dans les instants décisifs, notamment sur une action défensive clé en transition. « J’avais vu un highlight de lui récemment, contre Minnesota. Il avait fait exactement le même step-through. Quand il a feinté, j’ai su qu’il allait partir là-dessus. J’ai pu mettre la main sur le ballon et contrer le tir. »
Dans un match où l’émotion a souvent pris le dessus, LeBron a préféré élargir le cadre en soulignant l’apport collectif des Lakers. « Notre banc nous a fait gagner le match ce soir. C’est aussi simple que ça. » Une façon de refermer la parenthèse Brooks sans lui donner plus de place qu’elle n’en mérite, du moins officiellement.
Mais sur le parquet, personne n’était dupe. Entre Dillon Brooks et LeBron James, il ne s’agit pas d’un simple duel de circonstance. C’est une histoire longue, rugueuse, faite de provocations assumées et de réponses appuyées. Et cette nuit-là, à Los Angeles, elle a encore écrit un chapitre de plus.
