Lowry, un problème pour les Raptors ?

Pris dans une mauvaise passe pour l’instant sans conséquences, Kyle Lowry attire les regards sceptiques : et s’il était celui qui pouvait faire perdre Toronto ?

Lowry, un problème pour les Raptors ?
Kyle Lowry a eu l’occasion de tuer le match cette nuit. Les Toronto Raptors menaient de trois points, 97-94, avec à peine plus d’une minute à jouer. Le meneur All-Star s’est alors retrouvé complètement seul dans le corner. Une opportunité de marquer son premier panier de la partie. Celui qui compte le plus. Mais comme lors de ses quatre tentatives précédentes, il a raté sa cible. Au contraire de Malcolm Brogdon. Le jeune arrière des Milwaukee Bucks a planté deux paniers primés de suite pour remettre son équipe au contrôle. Cette fois-ci pour de bon. Les Dinos ont perdu leur septième match de la saison. Ils gardent tout de même la tête de la Conférence Est – et même de la NBA – mais cette défaite contre un concurrent direct, un autre candidat aux finales, fait déjà (un tout petit peu) réfléchir. C’est surtout la performance de Lowry qui soulève interrogations. Zéro point. Une bulle. Ça fait tâche pour un joueur de ce calibre dans une rencontre aussi attendue. Il a certes pris 5 rebonds et distribué 7 passes décisives, pour un différentiel de +7 en 34 minutes. Mais le zéro est marquant. Il est dans une spirale particulièrement négative. Principalement en termes d’adresse. Il a manqué 24 des 28 derniers tirs qu’il a pris lors des quatre derniers matches. Avec 25 tentatives à trois-points dans le lot, pour seulement 3 réussites. C’est l’une des mauvaises passes les plus difficiles de sa carrière. Kyle Lowry a connu chaque année des périodes de moins bien mais peut-être jamais aussi puissantes. Ses statistiques en décembre sont catastrophiques : pas un seul match à plus de 7 points et donc 3,8 pts à 14% aux tirs en cinq sorties. Il est complètement à côté de la plaque. Sachant qu’il s’était déjà troué sur quelques rencontres depuis le coup d’envoi de l’exercice en octobre. Est-ce un simple blocage mental ? Le joueur avoue lui-même que sa maladresse actuelle le rend anxieux – et c’est normal. Il y pense. Il veut se sortir de cette mauvaise passe. Ses coéquipiers continuent néanmoins de l’encourager à tirer. Ses coaches aussi. Mais Lowry et le staff ont un plan : rapprocher le joueur de la raquette. Il est parfois nécessaire de driver, de pénétrer vers le cercle et de tirer de plus près afin de se mettre en rythme. Commencer directement derrière l’arc comme il le fait soir après soir peut vite s’avérer contre-productif.

« Je dois aller un peu plus dans la peinture », avoue l’intéressé. Son coach, Nick Nurse, va dans le même sens : « Il lui faut plus d’opportunités dans la raquette. On doit l’aider à se frayer un chemin là-dedans pour qu’il puisse prendre des tirs près du cercle. »

Il est trop tôt pour s’inquiéter réellement pour Kyle Lowry. C’est l’une des valeurs sûres à son poste à l’Est. Il va retrouver du jus à un moment ou à un autre. Surtout qu’il compense autrement en attendant. Par des rebonds, éventuellement de la défense et surtout des passes décisives. Il distribue 10 caviars par rencontre pour la première fois de sa carrière et il est actuellement en tête de cette catégorie statistique avec une marge assez conséquente (le deuxième qualifié, Jrue Holiday, est à 8,9. Russell Westbrook est à 10,2 mais il n’a pas encore joué assez de matches pour être comptabilisé). Mais il y a tout de même un constat déjà plus ou moins clair : le vétéran peine dans les grands rendez-vous depuis le début de la saison. En tout cas, il a du mal à scorer quand son équipe affronte l’une des meilleures équipes de la ligue. 9 petits points à 3/14, en l’absence de Kawhi Leonard, lors du premier duel perdu contre les Bucks fin octobre. 14 points à 3/12 lors d’une nouvelle défaite contre les Celtics. 10 points à 4/14 quand les Raptors ont battu les Warriors. 7 points à 2/8 malgré la victoire contre les Sixers. Et donc zéro cette nuit. Ça dérange. Le facteur mental est souvent avancé pour Kyle Lowry. Un peu comme une moquerie, un marronnier sur sa capacité à se trouer lors des playoffs. Mais là, c’est de la saison régulière. Difficile de penser qu’il est sous pression pour un match de début de décembre alors qu’il entame sa quatorzième saison dans la ligue. Plus que l’impact de l’enjeu auprès de lui, il faut surtout se demander l’influence qu’ont les grandes rencontres sur ses adversaires. Les candidats au titre veulent briller lors des chocs. Le niveau est plus relevé. Les défenses plus serrées. Et c’est peut-être justement à ce moment-là que Lowry montre simplement ses limites. C’est un excellent joueur mais est-il vraiment en mesure de se surpasser et de prendre le dessus sur une défense pleinement engagée ? En a-t-il vraiment les capacités ? Et surtout, pour reprendre le cadre des playoffs, peut-il le faire suffisamment de fois sur une série au meilleur des sept matches ? Il va peut-être briller sur deux matches, assurer le minimum sur deux ou trois autres et se planter sur le reste. C’est peut-être là, le problème. Les Raptors n’ont jamais été excessivement mauvais en playoffs mais ils n’avaient certainement pas les armes pour rivaliser avec LeBron James. Le King n’est plus là. Il est parti à l’Ouest. Et la bataille pour sa succession s’annonce terrible. L’équipe de Toronto a une bonne tronche de favorite pour les finales NBA. Mais elle n’a pas deux joueurs classés parmi les vingt-cinq plus forts de ce championnat. Il y a Kawhi Leonard… et une superbe brochette de bons basketteurs comme Lowry, Serge Ibaka, Pascal Siakam, etc. Lowry n’est pas l’un des vingt-cinq meilleurs joueurs de la ligue. Les Bucks non plus, à vrai dire. Il y a Giannis Antetokounmpo puis d’excellents lieutenants comme Khris Middleton, Eric Bledsoe, etc. Milwaukee a d’ailleurs récemment libéré de l’espace sous le Cap pour éventuellement partir à la chasse d’une autre deuxième option offensive cet été. Les Celtics et les Sixers sont dans une autre situation. Ils ont certes de moins bons bilans, en tout cas pour l’instant, que les deux premiers de la Conférence Est. Mais ils ont plus de « star power ». Kyrie Irving et Gordon Hayward sont potentiellement deux joueurs du top 25. Potentiellement parce qu’Hayward continue de se remettre de sa grave blessure à la cheville. Joel Embiid et Jimmy Butler y sont aussi pour Philly. Jayson Tatum et Ben Simmons grattent à la porte. Les playoffs à l’Est seront particulièrement intéressants avec justement ces oppositions entre ces deux styles d’équipe. Les deux meilleurs joueurs – Giannis et Leonard – entourés du meilleur collectif prendront-ils le dessus sur les duos d’All-Stars ? Il n’empêche que Lowry risque d’avoir un rôle majeur. De facteur X. En bien… ou en mal. Il y a un moment où les Raptors auront besoin qu’il score dans les grands matches. Pour vraiment passer un cap. Et de ses performances dépendra aussi l’issue de la saison pour Toronto.