[ITW] Will Weaver : la vie de coach NBA, les Rockets et les analytics

Will Weaver, assistant des Houston Rockets cette saison, a accepté de répondre à nos questions avant sa participation au programme Jr. NBA Coaches.

[ITW] Will Weaver : la vie de coach NBA, les Rockets et les analytics

Arrivé en NBA en 2013, Will Weaver est devenu un spécialiste de la reconstruction. Avec les 76ers, les Nets, puis les Rockets, il a participé à poser les bases de jeunes équipes qui devaient tout reprendre à zéro. Il était là, au lancement de ces projets, avec Joel Embiid, D’Angelo Russell ou Jalen Green. Il a connu 16 saisons de coaching mouvementées, contrastées par ses passages en équipe d’Australie.

En amont de sa participation au programme Jr. NBA Coaches, on a pu l’interroger sur son expérience dans ces équipes en reconstruction, son passage aux Rockets et sur ses méthodes en tant qu’entraîneur.

BasketSession : Tu as 37 ans, ce qui est plutôt jeune pour un coach avec une telle expérience. À la fin de la saison, tu as décidé que tu ne reviendrais pas dans le coaching staff des Rockets l’année prochaine, quelle est la suite pour toi ?
Will Weaver : Je ne me sens pas particulièrement jeune quand je poursuis mon enfant de trois ans et demi et j’ai les cheveux gris qui devraient, je suppose, prouver que j’ai un peu coaché (rires). Ce que je garde en tête, c’est le nombre de joueurs dont j’ai pu suivre le parcours, alors qu’ils essayaient d’accomplir des choses vraiment difficiles. Je garde en tête le privilège d’avoir pu les aider à réaliser ces grands rêves. Pour la suite, je rêve d’un jour devenir head coach en NBA. Je suis déjà reconnaissant d’avoir eu la chance de l’être en Australie et en G League auparavant.

Tu as coaché des équipes en reconstruction à Philadelphie, à Brooklyn et à Houston. Peux-tu nous raconter cette expérience ? En quoi est-ce particulier ?
Will Weaver : Presque toutes les équipes de la NBA se battent jusqu’aux derniers spots des playoffs. Elles mettent tout en œuvre pour atteindre ce niveau. Le revers de la médaille, c’est qu’une fois cette période terminée, ils passent souvent à une approche plus axée sur les jeunes. C’est ce qu’on appelle une reconstruction. À Philadelphie et à Brooklyn, lorsque je suis arrivé, c’était le stade auquel se trouvaient ces deux équipes. Le fait que ce soit mes deux premières expériences en tant que coach au niveau professionnel, ça m’a donné l’impression de lire le début d’une histoire.

J’ai compris le travail ardu, la chance, tout le sang, la sueur et les larmes qui sont nécessaires à une équipe NBA pour devenir ce que les Sixers et les Nets sont aujourd’hui. Le fait d’avoir pu participer aux premières étapes de ce voyage est incroyablement édifiant et gratifiant. Quand je vois ce que sont devenus des gars comme Jerami Grant, Nerlens Noel, TJ McConnell ou Caris LeVert, qui n’étaient que des petits chiots quand ils sont arrivés en NBA… Nos liens sont particuliers en raison des expériences que nous avons partagées dans ces saisons où nous n’avons gagné que 20 ou 30 matches.

Au contraire, en G League et aux Sydney Kings, j’ai participé à des finales. Quand j’ai entraîné l’équipe nationale d’Australie, nous avons gagné une médaille de bronze aux Jeux Olympiques. Donc j’ai aussi connu les séries éliminatoires, où chaque tir est synonyme de vie ou de mort. Alors que pendant la saison régulière de la NBA, je me concentrais davantage sur le développement des joueurs. Je suis donc incroyablement reconnaissant d’avoir pu voir tout le spectre de ces expériences.

Puisque tu es souvent passé par là au cours de ta carrière, quelle équipe en reconstruction est actuellement la plus prometteuse selon toi et pourquoi ?
Will Weaver : Eh bien, je suppose que je peux d’abord parler de Houston. Ce qui est très excitant à Houston, je pense que c’est avant tout la qualité des personnes que sont Jalen Green, Josh Chistropher, Jae’Sean Tate, Kenyon Martin Jr et Alperen Sengun. Tous ces gars sont de super-humains. Je pense que chacun d’entre eux a la conviction de pouvoir devenir un grand joueur. Bien sûr, la question est de voir comment cette détermination réagit à l’échec.

La NBA est impitoyable et punit presque chaque erreur. Et l’apprentissage passe en grande partie par les erreurs. La résilience dont vous faite preuve est, je pense, l’un des meilleurs indicateurs pour savoir si vous êtes capable ou non de devenir le joueur que vous avez le talent de devenir.

En ce qui concerne ces gars-là, je pense qu’ils ont des panoplies assez étranges. S’ils finissent tous par devenir ce qu’ils pourraient être, on pourrait voir quelque chose de très différent par rapport à ce que l’on voit d’habitude en NBA. Et quelque chose de très excitant. Ce qui rend la ligue si attrayante, c’est qu’il y a plusieurs équipes qui vont se développer de cette manière et qui seront bientôt les Bucks, les Suns et les Warriors.

"J’ai compris le travail ardu, la chance, tout le sang, la sueur et les larmes qui sont nécessaires à une équipe NBA pour devenir ce que les Sixers et les Nets sont aujourd’hui."

Qui sont les joueurs que tu as préféré coacher et pourquoi ?
Will Weaver : Les plus récents, bien sûr, me viennent à l’esprit, comme Alperen Sengun. J’ai eu la chance de travailler avec lui la saison dernière. J’ai beaucoup d’estime pour lui en tant que personne et je pense qu’il a un avenir incroyablement brillant. C’est l’un des plus grands compétiteurs que j’ai côtoyés. C’est aussi une personne très douce. Mon fils l’appelle "Big Horsey Man", parce qu’il montait sur ses épaules. Et je pense que cela résume bien l’esprit qu’il apporte en tant que coéquipier et en tant que collègue. J’ai vraiment hâte de voir la suite de sa carrière.

Un autre joueur qui me vient en tête, c’est Matthew Dellavedova, que j’ai coaché en Australie. Je ne sais pas si j’ai eu un autre joueur comme lui. Je me souviens d’avoir joué contre la France, en 2014, et d’être allé le voir avant le match pour lui dire : "Delly, j’ai remarqué que lorsqu’ils sont en horns et que tu arrives, ils partent de ce côté…" Et il me dit : "Oui, donc si je peux couper la ligne de passes, ils devront revenir du côté fort et Nando de Colo sera sur sa main gauche."

Il m’a fallu environ trois semaines de travail pour comprendre ça et il l’a compris en 12 heures. Donc je pense que cela en dit long sur le QI basket de chacun d’entre nous (rires). C’est quelqu’un qui étudiait le jeu aussi dur — voire plus dur — que n’importe quel coach, et qui se démenait pour essayer d’aider ses coéquipiers depuis le banc. C’est un compétiteur acharné et l’un des plus grands professionnels que j’ai côtoyés.

Nous sommes en pleine Free Agency. Beaucoup d’agents libres vont changer d’environnement cet été. Est-ce difficile d’intégrer un joueur à son effectif après sa signature ou son transfert ?
Will Weaver : L’aspect humain de tout cela est constamment sous-estimé. Il faut comprendre, quand quelqu’un doit soudain déménager, la fatigue logistique qui en découle, la tristesse de quitter un endroit et l’anxiété d’arriver dans un nouvel environnement. Quand un agent libre signe ou qu’un joueur est transféré, il y a beaucoup d’émotions liées à cela. Je pense qu’en tant qu’entraîneur, notre travail consiste toujours à essayer de comprendre qui sont ces personnes et ce qu’elles vivent. Cette interaction personnelle est indissociable de l’interaction dans le jeu. Il y a toujours une dynamique psychologique dans chaque séance d’entraînement et chaque match de basket.

Je me souviens très bien d’un joueur NBA notable qui a pleuré le jour où Brandon Davies a été coupé par les 76ers quand j’y travaillais. C’était un excellent rappel pour nous tous que des amitiés et des relations fortes sont forgées dans cette saison de sept/huit mois où vous passez au moins six jours par semaine les uns avec les autres. Pour chaque opportunité qui vous enthousiasme, vous êtes tristes de quitter l’endroit d’où vous venez. Ou, du moins, certaines choses dans cet endroit vont vous manquer. Et tout le monde ressent la pression de devoir faire déménager ses enfants, les faire changer d’école et perdre les amis avec lesquels ils ont tissé des liens. C’est une réalité pour presque tous les joueurs.

Tu vas partager ton expérience avec une nouvelle génération de coaches dans le Jr Program. Alors, pour toi, quelles sont les qualités les plus importantes pour devenir un bon coach ?
Will Weaver : Tout d’abord, je suis très touché par le fait que quelqu’un se soucie de mon opinion sur ce sujet. Je pense que pour tous ceux qui ont eu la chance de travailler dans le basketball professionnel pendant très longtemps, l’humilité n’a fait que croître avec le temps. Nous apprécions notre chance d’avoir ces postes, qui sont très difficiles à obtenir. Et je pense que c’est par là que je commencerais : cet engagement et le fait de prendre du plaisir dans ce sport. Je pense que c’est le prérequis qui vient avant tous les autres.

En tant que coach, vous faites face à beaucoup de défis. Vous manquez des dîners, des anniversaires, des mariages… Ce sont des choses qui arrivent quand on voyage autant que nous. Je ne compte plus le nombre de bus dans lesquels je me suis assis. Et parfois, ces bus tombent en panne, les vols sont retardés, l’heure à laquelle vous êtes censé rentrer pour dîner change et vous le manquez. Donc être amoureux du sport, c’est un peu obligatoire pour vraiment aider les joueurs et les autres coaches. Ces défis sont épuisants, donc c’est essentiel.

Je pense aussi que l’ouverture est une caractéristique de plus en plus mise en avant dans le coaching moderne. J’apprécie vraiment l’opportunité d’apprendre des autres sports. J’aime beaucoup apprendre du football européen, car je pense qu’ils ont résolu ou qu’ils sont en passe de résoudre les mêmes types de problèmes que ceux que nous essayons de résoudre dans le basket américain. Ainsi, à chaque fois que j’ai voyagé, j’ai profité de l’occasion pour découvrir le football australien, le rugby, le cricket, le football, les sports olympiques, le cyclisme. Et chaque fois, je me rends compte de la facilité avec laquelle certains de nos problèmes ont déjà été résolus sur une partie de la planète. Et si seulement nous avions compris cela un an plus tôt, nous aurions peut-être gagné un autre match de plus. Cela explique pourquoi j’aime être en contact avec un large éventail de personnes.

Je sais que la vidéo et les analytics ont une grande importance pour toi. C’est en tout cas ce que disait Andrew Bogut lorsque tu l’entraînais à Sydney. Pourrais-tu nous en dire plus sur ces outils et sur la façon dont tu les utilises ?
Will Weaver : Je pense que tu as choisi les bons mots, ces outils font partie, je pense, de la panoplie de tout entraîneur moderne. Une grande partie de mon parcours consistait en une sorte de découverte de ces domaines et de la manière dont on peut les utiliser quand c’est approprié. On peut apprendre beaucoup de choses en regardant les vidéos. Et il en va de même pour la data. Les outils quantitatifs que nous avons en NBA nous donnent beaucoup d’informations sur ce qui s’est passé sur le terrain. C’est l’un des aspects les plus agréables de la NBA : vous êtes entouré d’analystes et de personnes très talentueuses, qui maîtrisent la technologie et qui peuvent aider les coaches à utiliser ces informations avec les joueurs.

À partir de là, vous pouvez comprendre ce qui s’est passé et aider les joueurs à changer quelque chose dans leur jeu ou, au contraire, à continuer sur cette voie. Il faut se demander comment aller de cette information à ce résultat et à quoi ressemble l’intervention entre les deux.

D’après mon expérience, la plupart des joueurs veulent être entourés de personnes qui peuvent réellement les aider à s’améliorer. Nous avons les mêmes intérêts. Les coaches veulent aussi que leurs joueurs excellent parce que cela va les aider en tant qu’entraîneurs et leur permettre de rendre leur équipe performante. Il n’y a pas de personne plus sceptique (vis-à-vis des analytics, ndlr) qu’Andrew Bogut sur Terre. Mais après avoir passé du temps avec lui avec la sélection australienne, nous avons développé une relation parce que j’étais prêt à lui dire la vérité et à lui montrer des preuves pour étayer cette vérité. Ce type d’interactions nous a amenés à vouloir retravailler ensemble à Sydney.


Le programme Jr. NBA Coaches - Online présenté par Gatorade® est hébergé sur OWQLO et propose 12 sessions virtuelles en direct de février à septembre pour les utilisateurs de l'application âgés de 16 ans et plus en France. La prochaine session avec l'ancien assistant coach NBA Will Weaver aura lieu le jeudi 14 juillet à 18h. Pour plus d'informations, visitez owqlo.comgatorade.co.uk ainsi que @NBAFRANCE sur Facebook et Twitter et @NBAEurope sur Instagram.

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Photo : Copyright 2022 NBAE, Logan Riely/NBAE via Getty Images