Bismack Biyombo au Quai 54 : Africa Is The Future

Plus qu’un exemple de réussite ou un modèle pour la jeunesse africaine, Bismack Biyombo veut être un acteur du changement sur le continent qui l’a vu naître. Entretien militant.

Bismack Biyombo au Quai 54 : Africa Is The Future
[caption id="attachment_417744" align="alignright" width="300"] Cette interview est extraite du REVERSE #66[/caption] Comme nous vous l'annoncions sur BasketSession et dans REVERSE, Bismack Biyombo évoluera ce week-end sur l'asphalte brûlant du Quai 54. C'est un joueur en mission qui s'opposera à la crème du streetball mondial. Car il viendra non seulement pour gagner, mais aussi pour promouvoir son association Child Of Africa, dont il nous a parlé. Vous pouvez d'ailleurs aider Bismack Biyombo et son association en participant à la campagne de financement de ce projet. Il vous suffit de vous rendre sur https://www.bismackbiyombo.org/ et en cliquer sur le bouton "Donate" ! REVERSE : Dans un pays où le sport roi est le football, quelle place prend le basket au Congo ? Bismack Biyombo : Je dirais que le basket est à la seconde place maintenant au Congo. Comme tous les Africains, on grandit dans la pratique du football et, moi-même, j’y ai joué pendant mon enfance. On essaie de faire la promotion du basket, de voir comment aider nos jeunes à évoluer dans ce sport et à le pratiquer dans les meilleures conditions possibles. Petit à petit, on va y arriver. On a fait des camps à gauche à droite et même créé une académie pour aider les jeunes à réussir. REVERSE : En parallèle de ta carrière professionnelle, tu mènes divers projets. L’un d’entre eux, Child Of Africa, vient de voir le jour, peux-tu nous en parler ? Bismack Biyombo : A la base, je cherchais un moyen d’unir des forces vives qui souhaitent s’unir et travailler ensemble pour améliorer le quotidien des Africains. Comment faire pour qu’il y ait un engouement commun visant à mener des actions de développement en Afrique ? Sur notre continent, il y a beaucoup d’actions qui sont menées localement par des mécènes ou des personnalités et il y a aussi beaucoup d’aides qui viennent de l’extérieur. Comment ajouter à cela des projets pérennes visant à cibler des problématiques précises, menés non par chacun de notre côté, mais tous ensemble ? Il y a beaucoup de jeunes pour qui nous sommes des modèles, qui rêvent de nous ressembler parce que l’on s’est démarqué et que l’on représente une certaine forme de réussite. Je voulais donc faire quelque chose qui ne soit pas une action de Bismack, mais une action commune. Child Of Africa, c’est donc un mouvement ouvert à tous, qui est initié par des Africains pour aider les Africains. REVERSE : Tu n’es pas seul dans ce projet puisque tu as réuni d’autres personnalités, qui sont-elles ? Bismack Biyombo : Oui effectivement, j’ai souhaité réunir d’autres personnalités qui étaient déjà actives dans des projets de développement ou dans l’amélioration du quotidien des populations en Afrique. Parmi elles, figurent Didier Drogba, Djimon Hounsou, Fally Ipupa, Isha Sesay, Akon, Amadou Fall et moi. L’objectif premier était de trouver des personnes qui ont les mêmes idées, qui sont prêtes à s’engager et qui peuvent aussi mobiliser le grand public dans les causes que l’on veut défendre. On a conscience que les choses prendront du temps et que nous n’atteindrons pas des sommets la première année. On va y aller petit à petit. REVERSE : Tu étais déjà actif au Congo dans des projets qui te tenaient à cœur. Qu’avais-tu mis en place ? Bismack Biyombo : Nous avions mis en place des camps qui nous ont permis de détecter des jeunes. Ensuite, on a créé des académies où l’on encadre ces jeunes que l’on suit scolairement et sportivement et que l’on va essayer d’aider pour qu’ils puissent s’épanouir, étudier et obtenir un diplôme universitaire. Mais ça, c’était un des premiers projets. Aujourd’hui, j’ai commencé à construire des écoles. On a terminé une école à Goma qui est déjà active. C’est notre premier lycée, le second est actuellement en construction. Notre objectif est de construire trois écoles qui vont de la maternelle au lycée dans différentes régions du pays. Une fois cette étape atteinte, on va embrayer sur la construction d’une université. On veut créer des passerelles additionnelles qui vont nous aider à encadrer les enfants de l’école primaire à l’école secondaire, puis à l’université. Entre temps, on travaille déjà pour se constituer un réseau d’entreprises locales afin de mettre en place des forums qui lieront les étudiants diplômés au monde du travail. Certes, on veut faciliter l’insertion dans la vie professionnelle de nos jeunes en les encadrant dès le plus jeune âge, mais le but ultime reste tout de même de former de bons citoyens, éduqués, autonomes capables de se prendre en charge et de contribuer au développement du pays. On veut influer sur nos générations futures de manière efficace, avec un partenariat solide avec les grosses entreprises. On travaille également sur la réhabilitation des hôpitaux. Mais la finalité derrière tout cela reste de lier les enfants d’Afrique les uns aux autres, dans des projets participatifs qu’ils soient sur le sol africain ou ailleurs sur le globe. Créer un pont entre les Etats-Unis, l’Europe et l’Afrique.
« En tant que joueur professionnel, même sans le vouloir je suis l’un des ambassadeurs de mon pays. C’est encore autre chose d’accepter ce rôle. »
REVERSE : Est-ce que l’on peut dire que ton statut de joueur NBA te confère un rôle d’ambassadeur ? Bismack Biyombo : Que je le veuille ou pas, en tant que joueur professionnel et avec l’image que j’ai, même sans le vouloir je suis l’un des ambassadeurs de mon pays. C’est encore autre chose d’accepter ce rôle. C’est un honneur de représenter non seulement son pays, mais aussi le continent d’Afrique. REVERSE : Quel sera le tout premier projet de Child of Africa ? Bismack Biyombo : Le prochain projet sur lequel nous allons nous pencher touche les enfants qui travaillent dans les mines au Congo, notamment pour collecter le cobalt, métal nécessaire au bon fonctionnement de nos smartphones, tablettes, etc. Nous souhaitons leur donner l’opportunité de retourner sur les bancs de l’école, de grandir comme des enfants et d’avoir accès à l’enseignement. Le but étant de leur donner la capacité de devenir responsables et de prendre les bonnes décisions pour leurs familles et pour eux-mêmes. Autrement, beaucoup de maladies en Afrique sont la résultante de la vétusté des matériaux que l’on utilise, on veut donc œuvrer pour renouveler le parc d’équipements médicaux. Ce sont les projets que l’on vise dans un futur proche, nous sommes vraiment enthousiastes à l’idée de leur faire voir le jour. Je vous invite tous à unir nos forces pour donner non seulement de l’espoir, mais aussi des opportunités à la jeunesse africaine. Construisons ensemble une Afrique rayonnante avec le plaisir d’avoir contribué à son renouveau. https://www.youtube.com/watch?v=A8oiUixMJoo REVERSE : Comment est-ce que tout un chacun peut aider ou prendre part à Child of Africa ? Bismack Biyombo : La façon dont on peut aider Child of Africa est avant tout de suivre notre actualité pour savoir sur quel projet on se penche. On va commencer un crowdfunding le 2 mai 2018 pour permettre à tous ceux qui le souhaitent de s’impliquer et d’apporter leur pierre à l’édifice. On fera d’ailleurs une tournée en France, dans les médias, sur les plateaux TV et on envisage un ou deux évènements que l’on mettra en place lors de notre passage. On veut que ce soit accessible à tous : au jeune étudiant, au chef d’entreprise, aux Africains comme à tous les êtres humains. Le projet est initié par nous, mais doit être porté par tous.
« J’ai décidé de monter une équipe Child Of Africa et de participer au Quai 54. »
REVERSE : Est-ce que tu comptes mener une action particulière à Paris ? Bismack Biyombo : Paris est une grosse étape de notre campagne. Pour marquer le coup, j’ai décidé de monter une équipe Child Of Africa et de venir participer au Quai 54 World Streetball Championship. Quand j’ai vu les images postées par beaucoup de Congolais, j’ai tout de suite été séduit. L’année passée, quand Kemba Walker, Jabari Parker et Victor Oladipo sont venus, ça m’a permis de voir plus d’images. Quand ils m’ont parlé de leur expérience sur place, je me suis dit qu’il fallait que j’y prenne part moi aussi, mais en tant que joueur. De fil en aiguille, c’est devenu un objectif et, l’avantage, c’est que je peux promouvoir Child Of Africa et représenter le mouvement avec une équipe solide composée de joueurs liés à l’Afrique. En même temps, c’est un moyen de sensibiliser le public français qui comporte beaucoup de ressortissants africains ou de jeunes originaires d’Afrique. Ça prenait donc tout son sens pour moi et c’était super excitant de se dire qu’en 2018 j’aurai la chance de participer. REVERSE : Que peut-on espérer de la participation de Child of Africa au Quai 54 ? Bismack Biyombo : On va aussi réunir des joueurs venant de différents pays ce qui va nous permettre de jouer pour l’union et je crois que c’est une très bonne opportunité de promouvoir le mouvement, mais aussi de passer de bons moments avec mes frères et sœurs. D’un point de vue sportif, on va essayer de ramener le haut niveau au Quai 54 et de remporter tournoi. Bien que ce soit du streetball, moi j’aime jouer pour un enjeu. Celui-là en vaut la peine ! REVERSE : Pour finir, tu es le premier joueur africain que Michael Jordan a décidé de sponsoriser. Comment as-tu vécu cette nomination ? Bismack Biyombo : Quand Jordan m’a annoncé que j’allais porter sa marque, c’était comme un rêve. En grandissant en Afrique, je ne me souviens pas avoir porté une paire de Jordan. J’étais sous contrat avec Nike lorsque je suis arrivé en NBA. Je me posais des questions, je me demandais comment ils allaient gérer cette transition entre les deux marques. Ce qui est marrant, c’est la façon dont c’est arrivé. Je venais de m’acheter une paire de Jordan et, peu après, j’ai été invité chez lui. En voyant la paire, il m’a demandé si je l’aimais bien et si Jordan Brand me l’avait envoyée en cadeau. Je lui ai répondu que non, que je l’avais achetée en ligne. Il me dit « Tu es sérieux ? ». Trois jours plus tard, je recevais plus de dix cartons Jordan chez moi avec une multitude de produits. J’étais trop excité et je l’ai appelé pour le remercier et il m’a dit « Bienvenue dans la Team Jordan ». Pour moi, c’était comme un rêve. En tant que jeune ayant grandi en Afrique, j’ai toujours rêvé de jouer en NBA, mais jamais d’être privilégié comme ça. Pour moi, c’est comme une bénédiction !