WNBA : joueuses vs la ligue, c’est la guerre

En pleines négociations sur le prochain CBA avec la WNBA, Napheesa Collier et les joueuses réclament leur dû, à juste titre.

WNBA : joueuses vs la ligue, c’est la guerre

Il y a quelques semaines, Dennis Schroder avait déclaré à sa manière que, quels que soient ses accomplissements, il ne se sentirait jamais considéré comme une légende du basket allemand comme Dirk Nowitzki. Un nouveau titre européen et de MVP plus tard, curieusement personne n’a osé rouvrir le débat au vu de la pluie d’insultes qui s’est déversée sur le joueur qui a eu le malheur de donner son avis sincère et plutôt éclairé sur une situation qui le touche lui et lui seul. Car sans surprise, l’armée des esprits tenant sur un clavier d’ordinateur ou de smartphone s’en est donnée à cœur joie, légitimant un peu plus le malaise ressenti par le meneur allemand qui sait bien qu’il n’est pas question que de talent. Réfléchir avant de parler, c’est ce que sait très bien faire également Napheesa Collier, Shai Mamou confirmera sans hésiter. Profitant de son statut de joueuse écoutée, elle a lu une déclaration (écrite, donc maitrisée) qui fera sans doute date dans l’histoire de la WNBA. En cause : l’arbitrage et la manière de gérer l’incroyable essor de la Ligue dont Cathy Engelbert est la patronne. La vice-présidente du syndicat des joueuses (et accessoirement co-fondatrice de la compétition de 3x3 Unrivaled) a semble-t-il brisé le cœur de sa commissioner qui ne comprend pas comment on peut à ce point lui manquer de loyauté.

Napheesa Collier n’a pourtant pas lancé une bombe, mais fait en sorte d’éviter qu’une encore plus grosse n’explose. Lorsque l’on est athlète professionnel(le), les deux choses les plus importantes restent l’intégrité physique et le revenu que l’on tire de son talent et de son travail. Comme la NBA au début des années 80 avec les arrivées de Magic, Bird et Jordan un peu plus tard, la WNBA devient une ligue de joueuses, dépassant le simple cadre du logo qu’elles portent sur leur maillot. Dire, même en privé, que Caitlin Clark n’est rien sans la WNBA, c’est là la pire analyse qui aurait pu être faite. Oui, la WNBA est un écrin unique (et qui reste à parfaire) pour développer les talents. Oui, la WNBA est la meilleure ligue du monde et rien ni personne ne le contestera. Mais non, la WNBA ne survivrait pas sans les stars qui la composent aujourd’hui. La différence de prix des billets d’un match avec ou sans la star du Fever d’Indiana en est la preuve parfaite. Avancer que Clark ne gagnerait rien si elle n'était pas dans la ligue, c’est presque dire qu’elle gagne déjà beaucoup trop. Or, si on lui attribue ce salaire, c’est que dans tous les cas il y a un propriétaire de franchise qui sait qu’il va gagner encore plus pour se payer un yacht encore plus gros.

Sans argent, on garde le côté « romantique » du sport, cette croyance folle que l’on puisse faire du sport de très (très) haut niveau pour le simple concept de gloire. Madame Engelbert ne semble pas avoir encore réellement compris (ou fait semblant de ne pas le comprendre) que sa jolie petite affaire est un business au sens le plus américain possible du terme : une machine à faire de l’argent, si possible beaucoup, si possible très vite. Et ça, fort heureusement, les joueuses l’ont compris, et pas qu’un peu. La WNBA passe de miettes de biscuit à parts de gâteau. Collier, Wilson, Clark, Reese, Ionescu, donnent énormément, voire peut-être trop quand on voit les blessures à répétition. Il est temps de leur donner ce qu'elles demandent, puis ce qu’elles méritent. Dire en substance « qu’elle se taise, sans nous elle n’aurait rien et ne serait rien » est une image catastrophique dans cette Amérique au gouvernement qui prône un retour au masculinisme décomplexé, crasse et écoeurant.

« Les joueuses devraient être sur leurs genoux à me remercier pour les droits télévisés que je leur ai obtenus. » Oui mais non, très chère Cathy, c’est vous qui devez leur dire merci, vous n’avez rien obtenu, elles ont apporté sur un plateau la simple possibilité d’aller récupérer cet argent qui leur appartient. Les faire passer pour capricieuses ou ingrates parce qu’elles demandent à être payées et protégées à leur juste valeur est aussi insultant que stupide, donnant aux petits esprits les graines pour faire pousser leur petite haine sexiste et mysogine. Surtout, avant de s’insurger et d’appeler à l’ingratitude générale, il faut que cette parole, ce malaise, soit compris, comme celui de Dennis Schroder. Car comme le disaient les poètes du 93 il y a 35 ans : « le monde de demain, quoi qu’il advienne leur appartient ». Et c’est tant mieux.

On est pas mal loti avec la fédération française aussi, d'ailleurs Janelle Salaün a refusé de serrer la main de Jean-Pierre Hunckler après avoir remporté la Supercoupe contre Villeneuve d'Ascq
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Totalement en accord avec tout ce que tout ce qui est décrit dans cette article, l la méconnaissance de la situation, le mépris et la condescendance de cette Engelbert laisse à penser qu'elle ne va peut-être pas rester longtemps, et tant mieux pour les joueuses. La déclaration de Napheesa Collier est fondamentale, voir essentielllllle (voix de Pierre Armand) pour la suite de l'évolution de cette ligue.
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Je ne suis pas un assidu forcené de WNBA mais il me semble que les proprios sont bien silencieux alors que l'exposition et les questions autour de la ligue n'ont jamais été si importantes.
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