Journal de bord d’un Final Four totalement fou

Après un finish aussi cataclysmique, il fallait bien laisser passer quelques jours avant de revenir sur ce Final Four explosif.

Journal de bord d’un Final Four totalement fou
Après un Final Four aussi dingue, il fallait forcément quelques jours pour s'en remettre. Mais maintenant que la pression est retombée et que les fumigènes se sont dissipés, c'est le moment parfait pour faire le tri parmi les souvenirs et revenir sur 72h de folie. Récit.

Derrière la Sublime Porte

À Istanbul et nulle part ailleurs. Le week-end dernier et son épilogue improbable n’auraient pas pu se dérouler autre part que sur les bords du Bosphore. Il y a vingt ans déjà, lors de la dernière finale Euroleague dans la capitale turque, le Partizan Belgrade tapait Badalone sur un triplé désespéré de Djordjevic quasiment au buzzer. Depuis, Georgios Printezis, et ses petits hooks désarticulés à la Antawn Jamison, a rejoint les livres d’histoire. Moi j’étais là pour vous narrer ces exploits depuis Istanbul et avant que l’on passe définitivement à autre chose et qu’Olympiacos tente de détrousser leurs rivaux du Panathinaikos d'un autre titre en finale du championnat de Grèce, je me devais de vous raconter le Final Four Euroleague 2012, depuis les coulisses, derrière la Sublime Porte.

Efes secondaires

Le Final Four n’a pas encore tout à fait commencé que je cherche à présenter Istanbul – que je découvre moi aussi – pour les lecteurs de BasketActu. C’est d’abord le coach de Cholet, Erman Kunter, enfant de Sisli et ancienne star du Besiktas, qui répond à mes questions, mais depuis plusieurs jours, je suis sur une autre piste. J’ai le souvenir du premier match d’Iverson pour Besiktas. Ivy avait mis 15 pts et le cameraman fait au moins autant de gros plans sur un Français, dans les tribunes, l’ex-footballeur Pascal Nouma. En plus d’une bonne petite carrière en France, l’ancien attaquant du PSG et de l’OM, a fait deux grosses saisons à Besiktas et petit détail WTF, il a participé ces deux dernières années à deux émissions de téléréalité en Turquie, « Danse avec les stars » et leur équivalent de « Koh-Lanta ». J’obtiens finalement son 06 avant d’entrer dans l’avion et il me propose de le rappeler une fois arrivé à Istanbul. Neuf heures plus tard, je connaîtrai comme ma poche les deux boîtes les plus selectes d’Istanbul et aurai un léger aperçu du statut de superstar de Nouma en Turquie. Pas plus tard qu’hier soir j’ai découvert une vidéo sur le site du Voici local où j’apparais à l’arrière de son SUV. À Istanbul les paparazzi dégainent plus vite que Papanikolaou.

Le cœur sur la main

Dans l’avion du retour, mon nouveau pote Baris, un Turc résidant en Suisse comme moi, me raconte une blague : « Un Grec et un Italien vont se bourrer la gueule dans un bar. Qui paie l’addition ? Les Allemands ». A mon tour. « Un journaliste français et une journaliste française prennent le bus à Istanbul. Qui paie l’addition ? Les Grecs ». Vendredi après-midi, un bon köfte dans le ventre, les deux envoyés spéciaux de BasketActu cherchent leur chemin jusqu’à la salle depuis la place Taksim, un peu le centre névralgique d’Istanbul. Un petit groupe de fans du Pana nous prend sous son aile et nous emmène jusqu’au bus 71. Son chef de bande, un petit air de Zach Galifianakis, porte fièrement son maillot du Pana et nous parle du bon vieux temps du CSP Limoges. Quelques minutes après nous avoir confié que « Bohemian Rhapsody » était sa chanson préférée, il nous dit que nos tickets de bus, c’est pour lui. Le taux de chômage grec a beau être aussi élevé que le pourcentage à trois-points de Diamantidis, les fans des Greens ont fait le déplacement et se montrent aussi généreux devant deux petits Frenchies perdus qu’au moment de siffler Spanoulis ou Teodosic. Le Pana a perdu tous ses matches au Final Four mais ses supporters ont une nouvelle fois montré que personne ne leur arrivait à la cheville, surtout lorsqu’ils présentent des atouts charme tels que la femme de Jasikevicius.

Pas de quoi rougir

La dernière fois qu’Olympiacos avait croisé la route du CSKA, ils étaient rentrés au Pirée le short en bas des pieds avec une fessée de 32 pts. Samedi soir, un collègue journaliste nous explique qu’il a changé son papier à la dernière minute : à la corbeille l’article sur Teodosic, ce sera un focus sur Spanoulis parce que « tu comprends, avec ce qui va se passer demain, je risque de passer le week-end sans parler une fois d’Olympiacos alors que c’est quand même une belle histoire ». À vrai dire le seul à croire en Olympiacos, c’était Juan Carlos Navarro, croisé par hasard dans le dédale de la Sinan Erdem Arena et qui me confiait que les Reds étaient ses favoris. Toute la saison, les troupes d’Ivkovic avaient mouillé leur culotte dans les moments chauds : Prigioni les enterre au buzzer à Vitoria, Hines se fait bâcher par Shermadini à la dernière seconde à Cantu, Printezis se fait piquer le ballon à la sirène par McCalebb à Sienne. Et pourtant l’espace d’un week-end, ils vont rentrer tous les shoots importants : le trois points step-back de Spanoulis sur les bouclettes de Huertas dans la dernière minute de la demie face au Barça et le poussin Papanikolaou qui claque ses deux lancers à 10 secondes de la sirène en finale quand dans la même situation le vétéran Siskauskas tremble deux fois. Avec Spanoulis, Printezis ou Antic, les Reds ne sont pas pour moi une victoire de la jeunesse ou même de l’enthousiasme sur l’argent (Spanoulis est le joueur le mieux payé en Grèce). Ils incarnent toutefois la victoire d’un groupe, bien cadré, solidaire et au service de son seul leader, Vassilis Spanoulis.

La zone héros

Un autre collègue nous parle de sa rencontre avec le joueur deux semaines plus tôt autour d’une table de massage. Il avait été hyper sympa et avait même fait l’effort de se souvenir du prénom du journaliste. En revanche notre collègue ne lui a pas demandé s’il connaissait « Bref ». À ce sujet, je rêvais ce matin que Spanoulis me disait « Bref, je suis le MVP du Final Four et toi t’es qu’un connard de journaliste. » Quant à Printezis, il avait bien laissé toute son hésitation et sa timidité en salle de conférence de presse le samedi ! Lui le pur produit du centre de formation d’Olympiacos, à l’image aujourd’hui de Papanikolaou, Mantzaris et Sloukas, s’offre une incroyable revanche après un very bad trip de deux ans à Malaga. Le Final Four, c’étaient quatre games pour un écart total de 12 pts. Chaque match s’est joué dans les dernières secondes. On a plus transpiré à la Sinan Erdem Arena que dans les meilleurs hammams d’Istanbul.

Ėpilogue

Istanbul. Dans un décor grandiose, une forêt de minarets entre l’Europe et l’Asie, la mer était noire, la mosquée bleue et les vainqueurs rouges. Il fallait voir le grand bazar qu’ont mis les supporters de l’équipe de foot de Galatasaray après leur titre samedi soir ou voir les minettes s’affairer autour de Pascal Nouma au Reina pour voir que tout est possible à Istanbul, la ville où Sean Connery a serré la plus belle James Bond Girl de tous les temps dans « Bons Baisers de Russie » et où un jour Deron Williams a claqué 50 points dans un match.