Russell Westbrook, la pire campagne de playoffs possible

Russell Westbrook est complètement à côté de la plaque depuis le début des playoffs. Le MVP s'est enfermé dans ses problèmes au pire moment possible.

Russell Westbrook, la pire campagne de playoffs possible
Défendre Russell Westbrook. Une mission. Presque un devoir à l’époque où la star, pas encore MVP, partageait la gonfle avec Kevin Durant au sein d’une équipe du Thunder athlétique, chaotique et terriblement charmante. Avec toutes ses qualités. Et tous ses défauts. Elle était à l’image de Russ, pourtant désigné comme le deuxième meilleur joueur de la franchise. Elle avait ses traits. Ce qui, avec le recul, aurait dû nous mettre la puce à l’oreille : quand tous juraient que le meneur All-Star irait se trouver sa propre team – il en avait en réalité déjà une – trop peu de monde ont songé à imaginer le départ de KD. C’est bien lui qui est parti. « Let Russ be Russ ». Un slogan. Un appel à plus de liberté : Westbrook a son style de jeu si particulier. Il ne sait pas faire autrement. Il le dit lui-même, il ne regarde pas de matches de basket à la télévision. Alors comment se remettre en question ? Pourquoi le faire ? Pourquoi prendre du recul sans avoir d’autres éléments de comparaison ? Il vient, il joue. Il donne tout. C’est ainsi même qu’il se définit. « Je fais tout sur le terrain. » C’est effectivement la manière la plus simple, et peut-être la plus vraie, de le décrire sur un parquet NBA. Après tout, il est le premier joueur de l’Histoire à enchaîner deux saisons de suite avec un triple-double au compteur. Ça sort donc du commun des mortels. La très, très, très large majorité d’entre nous réfléchissons. Trop et trop souvent. Nous prenons du recul. Nous cédons facilement au doute. Constamment dans l’analyse, l’adaptation. Nous essayons de rentrer dans des moules. Pas Russ. Il est lui-même. Il ne regarde pas ce qu’il y a autour, il se compare à lui-même et c’est certainement la marque des grands. Ça, ça agace ou ça fascine. Mais le plus souvent, ça rebute. Ça bloque. Par jalousie. Parce que Westbrook mène – spirituellement parlant – une vie que nous aimerions tous, d’une façon ou d’une autre, mener. Faire ce qui nous plaît. Juste être nous-mêmes. Sans codes. Sans scrupules. Alors il est parfois détesté. De ce dégoût naissent souvent des narrations absurdes. La superstar serait égoïste, malgré ses dix caviars par match. Parce que Russell Westbrook pense d’abord à Russell Westbrook et ses passes décisives seraient surtout le fruit d’une envie de faire gonfler ses statistiques personnelles. OK. Mais pas plus que John Wall, James Harden ou LeBron James dans ce cas-là. Ces gars conservent la balle pendant dix plombes et la lâche qu’à partir du moment où un coéquipier est vraiment absolument démarqué. En attendant, RW continue de filer la gonfle à Andre Roberson alors que ce dernier est incapable de viser une vache dans un couloir avec une balle de yoga. Là où d’autres patrons rouspètent quand leurs camarades manquent des tirs, lui continue d’alimenter sans cesse. Il soutient ses coéquipiers. Et il leur respect. Même leur adulation. Selon ses détracteurs, il serait pourtant un connard fini. C’est donc assez fort de se dire que cet « abruti » de base est admiré par l’organigramme de sa franchise, du comptable au GM en passant par le cuisinier ou le responsable du parking. Alors que le peuple pointait du doigt les performances récentes de Victor Oladipo comme preuve des méfaits de Westbrook sur ses partenaires – Oladipo était moyennasse à OKC, brillant à Indiana – le néo All-Star des Pacers a pris la parole pour casser les mauvaises langues. Il a insisté : s’il est aussi fort aujourd’hui, c’est justement parce qu’il a côtoyé le dernier MVP. Russ a constamment été mis sur le départ. Comme s’il ne pouvait se contenter d’un petit marché, lui qui serait donc une diva originaire de Los Angeles. Encore raté. Il a juré fidélité à Oklahoma City. Même après le départ de Durant. Il a dit qu’il resterait et il a joint la parole aux actes en prolongeant son bail. Un homme de parole. Pendant ce temps-là, KD ne fait pas autant l’unanimité auprès de ses ex-employeurs et il participait à des débats sur le net avec un faux pseudo, lisant au passage absolument tout ce qui pouvait se dire sur lui. Mais Westbrook serait le haineux du lot.

Russell Westbrook se fatigue... lui-même

Défendre Russ… c’est devenu de plus en plus dur. Parce qu’il s’est transformé en caricature de lui-même. Un peu comme ses artistes qui vieillissent mal, ne se renouvellent pas et forcent le trait sur leurs qualités premières. C’est ce qu’il fait sur un terrain. Il fut une époque où Westbrook savait couper. Jouer sans le ballon, au côté d’un Harden meneur de jeu lors des finales 2012. Un temps où il créait des mouvements. Où il était en mesure de jouer avec d’autres superstars. Cela semble de plus en plus incertain. Il est maintenant aligné avec Carmelo Anthony et Paul George. Un sacré trio sur le papier, même si Melo a (mal) pris de l’âge. L’équipe d’Oklahoma City est même plus forte que celle de l’an dernier. Mais elle est bien partie pour sortir au même stade. Le premier tour. Le Thunder est mené 1-3 par le Jazz. Et Westbrook souffre. Il a beau parler, il est dominé. Dépassé par un rookie, Donovan Mitchell, et un vétéran qui a mis sept piges à jouer les playoffs pour la première fois de sa carrière, Ricky Rubio. Ses stats, justement, ne parlent plus en sa faveur. 21,3 points, 11,8 rebonds et 8,3 passes, c’est solide à première vue. Mais 36% aux tirs, 21% à trois-points, 5,3 balles perdues et -11,3 de différentiel sur chaque match. Horrible. C’est d'ailleurs la pire campagne de playoffs de sa carrière. Le timing ne pouvait être plus mauvais. PG sera free agent cet été. Anthony peut-être aussi. Les a-t-il convaincus de rester ? Peut-il même encore jouer avec d’autres basketteurs de son standing ? Si élimination il y a, cette défaite, plus que toutes les autres, est celle qui devrait le pousser à se remettre en question. Il a 29 ans. C’est la meilleure période de sa carrière. C’est le moment même pour gagner. Mais plus que jamais, alors qu’il semblait avoir déjà prouvé, il va devoir montrer qu’il peut le faire en restant lui-même. En restant Russell Westbrook.